L’art de recycler
Posted On 17 mai 2019
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C’est un atelier soigneusement rangé aux murs de bois agglomérés où ponceuses, scies et marteaux en tout genre se partagent l’espace. L’endroit rêvé de tout menuisier. Pourtant, d’étranges objets prennent forme ici. Ils résonnent, produisent des sons. Sébastien Faszczowy, le maître des lieux est ce qu’on appelle un luthier sauvage. Une profession presque unique en France puisqu’il confectionne des instruments de musique avec… des matériaux de récupération ! Vieux canapés, boîtes de conserve, chutes de bois… tous ces éléments serviront au bout du compte à donner vie, quelques heures de travail plus tard, à un instrument de musique 100% recyclé.
Cette démarche, Sébastien la conçoit avant tout comme un « petit acte politique de résistance à la société de consommation ». Face à l’obsolescence programmée, au gaspillage devenu monnaie courante, à l’enjeu climatique, son activité est devenu un véritable laboratoire d’expérimentation à la fois écologique et solidaire. Musicien intervenant depuis plus de 10 ans auprès de plusieurs associations de la Métropole lilloise, il fait régulièrement découvrir aux enfants cette manière originale de pratiquer la musique : « J’essaie de les convertir et de leur dire que faire de la musique ne coûte pas des milliers d’euros et qu’on peut soi-même construire des instruments avec comme seuls matériaux de l’imagination et des objets jetés. […] D’ailleurs, j’aime leur dire que la lutherie sauvage date de la préhistoire en fait et que les premiers instruments n’étaient que des objets du quotidien dérivés pour faire de la musique. »
Si Sébastien ne se définit pas comme « artiste » mais comme « simple artisan », sa créativité l’amène à montrer une autre idée de l’écologie et du recyclage parfois proche de certaines pratiques artistiques contemporaines. Le monde de l’art n’a, en effet, pas attendu les sommets sur l’écologie ni les règles de recyclage pour s’emparer des déchets et les utiliser comme matériaux. Déjà en 1958, Picasso réalisait l’une des ses plus célèbre sculptures avec comme seuls éléments une selle et un guidon de vélo créant ainsi Tête de Taureau. L’objet récupéré n’est alors pas utilisé pour ce qu’il représente mais comme matière première brute pouvant être modifiée et devenir tout autre chose. Fabien Charlet, artiste lillois, est l’un des continuateurs de cette pratique, à l’exception près qu’il donne aux objets récupérés une utilité et une place dans nos salons. Mieux connu sous le nom de Fabulin, ce pro de la récup’ transforme ce qu’il trouve en luminaires.
Créateur contemporain, sa passion du design et du bricolage est désormais son métier. Tuyaux, verres, pièces de mécaniques et divers objets constituent son magasin pour créer appliques et lampes presque sorties d’un livre de Jules Verne.
Désormais, la réincarnation des déchets ou des objets d’hier en œuvres d’art de demain n’est plus une pratique atypique. Depuis 1991, celle-ci est la pierre angulaire de la « braderie de l’art » à Roubaix. Cet espace de création éphémère hébergé à la Condition Publique propose à 150 artistes de transformer, ré-associer, ré-inventer les matériaux usagés offerts par plusieurs entreprises de la métropole engagées sous le label Re-collect. Dans ce capharnaüm artistique de 24 heures seulement, des petites mains façonnent la matière, pendant que des yeux les regardent ébahis. Ces adeptes du recyclage artistique (Upcycling en anglais) se retrouvent ici pour mettre leur talent au service de l’environnement. Ainsi, grâce à cette démarche « zéro déchet », des milliers d’objets retrouvent une nouvelle vie et de nouveaux propriétaires prêts à les acheter entre 1 et 300 euros. Loin de n’être qu’une affaire de poubelles tricolores, le recyclage devient pour ces artistes une manière de penser différemment leur savoir-faire. Mais l’art de recycler peut gagner tous les citoyens : les « tutos recyclage » fleurissent sur internet pour proposer mille et une façons de transformer ses déchets en objet design !
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“Ne pas toucher” : l’instruction que vous pouvez voir dans chaque exposition où vous allez. Celle qui vous rappelle à l’ordre de ne pas toucher les œuvres qui vous sont présentées. Et bien à l’exposition Murmur, c’est possible ! Vous pouvez enfin toucher tout ce qui vous entoure. C’est à La maison Folie Wazemmes que ça se passe ! Murmur est une exposition sonore participative. Elle a besoin de vous pour prendre vie ! C’est David Bausseron, guitariste, performer et manipulateur d’objet, qui a imaginé l’exposition comme une grande salle de musique.
Vous créez de la musique et des sonorités surprenantes à partir d’objets de récupération. Des objets qui avaient une tout autre utilité avant d’atterrir entre vos mains. Vous transformez des objets essentiellement métalliques en batterie. Le but de l’exposition n’est pas de créer de belles et harmonieuses mélodies, mais de savoir apprécier les sons tels qu’ils le sont. Il existe mille et une façons de tapoter, secouer ou remuer un objet ; et celui-ci ne vous livrera jamais la même sonorité que vous venez de produire. Il faut donc prendre le soin de s’écouter et d’écouter les autres pour être dans une ambiance constamment changeante.
Exposition murmur ©Léa Rochefort – Anaëlle Hadj-Rabah
L’exposition touche à son terme, mais pour les plus intéressés d’entre vous, le jeudi 21 mars à 19h, aura lieu un orchestre bruitiste. Ce sera David Bausseron qui le dirigera, accompagné de ses 70 musiciens, pour un concert gratuit !
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