Ilyes Magri, vecteur de la mobilisation des jeunes à Roubaix
Posted On 22 octobre 2019
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Bonne humeur, convivialité et persévérance règnent pendant les cours de Capoeira (art martial afro-brésilien) dispensés aux jeunes de la Mission Locale à Roubaix. Il faut dire que le professeur, Ilyes Magri, surnommé « Madeira » y est pour beaucoup : en associant des chants en portugais, de l’histoire de l’art martial et de la pratique, celui-ci réussit à s’adapter selon les goûts et les envies des participants. Cette activité est l’une des nombreuses proposées par Ilyes aux jeunes de l’association. Entré il y a un an dans l’organisme pour y faire un service civique, il y travaille désormais en tant qu’animateur, emploi qu’il combine avec son autre profession : professeur de Capoeira.
©récit photo : Adrien Chapiron
Depuis qu’il travaille à la Mission Locale de Roubaix, Ilyes organise et anime quotidiennement des ateliers pour les jeunes en situation de réinsertion professionnelle. « Je mène mes différents projets car je suis roubaisien et je vois bien qu’à Roubaix, ce n’est pas toujours tout beau tout rose. Il y a certaines problématiques comme le mal-être social ou le cloisonnement culturel, et je veux essayer de lutter contre ça à mon échelle ».
L’idée dans les différents projets est de rendre acteurs les jeunes dans la collectivité**. Cela passe aussi bien par des ateliers dispensés pour tous les jeunes Roubaisiens (cours de français dans l’optique d’inclure les migrants, organisation de débats avec les jeunes), que par des projets dans lesquels les jeunes de la Mission Locale mettent leurs compétences au service des autres. « Pour moi, c’est important de montrer que la jeunesse roubaisienne est capable de se mobiliser et de faire pas mal de choses », explique Ilyes. Les jeunes de la structure vont d’ailleurs s’activer très prochainement. En effet, Ilyes est en train d’organiser une maraude. Le but est de récolter, avec l’aide de ces jeunes, des denrées alimentaires, produits hygiéniques et vêtements afin de les redistribuer aux personnes dans le besoin dans la période de Noël. Cinq autres jeunes auront aussi l’opportunité de partir avec l’animateur au Portugal. L’idée de ce voyage est de prêter main-forte à une association venant en aide aux enfants en situation précaire.
La multiplicité de projets portés par Ilyes, à seulement 24 ans, a de quoi épater. Pourtant, travailler à la Mission Locale n’est pas sa vocation à la base. C’est son service civique, réalisé l’an dernier dans la structure, qui lui a donné envie d’y travailler en tant qu’animateur pour « aider les gens ». Il explique que cette activité lui a notamment permis de développer une sensibilité qu’il n’avait pas auparavant : « Avant de faire mon service civique, j’étais très pessimiste, je portais un regard noir sur tout, je me disais que le monde était comme ça et que je ne pouvais pas le changer. Aujourd’hui, je suis dans une autre optique, je sais que je ne peux pas changer le monde mais si je peux améliorer quelque chose, si je peux aider des jeunes à aller mieux, alors je le fais ».
©rédit photo : Adrien Chapiron
La capoeira, sport qu’il affectionne particulièrement, a aussi été vecteur de son engagement envers les jeunes. En effet, ayant déjà donné des cours à un aveugle, à des personnes en situation de handicap mental, à des enfants, ou encore à des seniors, cela lui a permis de développer des compétences qu’il transpose ensuite dans ses projets à la Mission Locale.
Ainsi, sensibilité, bienveillance, Capoeira et projets, termes qui résument les valeurs et actions d’Ilyes, donneront peut-être l’envie aux jeunes Roubaisiens de se mobiliser dans leur ville.
Aodren Combot
©récit vidéo : Camille Goncalves Abongo
Lors de notre entretien avec Ilyes, celui-ci nous a expliqué la naissance de la capoeira comme art martial.
La capoeira est une pratique difficile à décrire. A la frontière entre la pratique martiale, les acrobaties, la musique et l’expression corporelle, la capoeira témoigne de la pluridisciplinarité de sa pratique. Cet art martial afro-brésilien naquit au XVIe siècle dans un contexte de colonisation et d’esclavagisme. Les Portugais en débarquant sur le territoire souhaitèrent assujettir les indiens de la tribu des tupi-guarani mais jugés trop faibles pour travailler, leur choix se porta sur les Africains. Ainsi, des milliers de Congolais, Sénégalais, Guinéens…furent déportés jusqu’au Brésil. Les esclaves n’ayant pas le droit au port d’armes développèrent un art de combat mêlant des techniques de combat à des mouvements de danse basés sur l’observation des animaux.
Les colons voyant d’un très mauvais œil cette pratique décidèrent de l’interdire dès 1814. Cependant l’influence de celle-ci ne disparut pas. Elle s’étendit à d’autres groupes à Salvador, à Rio de Janeiro et Sao Paulo.
Le XXe siècle constitua une véritable révolution pour la capoeira. Elle fut légalisée en 1930 grâce à deux maîtres brésiliens de la capoeira : Mestre Bimba et Mestre Pastinha. Tous deux contribuèrent à légitimer sa pratique par son institutionnalisation. La discipline martiale organisée au sein de l’académie remplaça la pratique vulgaire de la rue généralement associée à la capoeira de l’époque.
La capoeira aujourd’hui, « s’ouvrir aux autres, s’ouvrir à soi », Ilyes
En tant que professeur de capoeira, Ilyes témoigne de son apport social et culturel. Celle-ci permet de rassembler initiés, débutants, personnes en situation de handicap avec la même volonté de pratiquer cet art. Elle est créatrice de lien social et permet l’ouverture à la culture internationale.
Clara Geoffroy
©récit photo : Adrien Chapiron
**Ilyes était aussi présent lors d’un projet musical de L’ARA en partenariat avec la Mission Locale luttant contre l’exclusion sociale et prouvant qu’il est possible de faire de la musique peu importe l’âge et les compétences.
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