Décryptage de la tendance vintage : une prise de conscience face à la surconsommation ?
Dans notre ère de consommation, les productions polluantes sont nombreuses. L’industrie textile est l’une d’entre elle. Il faudrait ainsi trouver des alternatives pour repenser le modèle du marché de l’habillement selon les préoccupations environnementales au cœur de notre époque. Le vintage serait peut-être la clef.
Propos (by Bérénice)
Plus qu’un phénomène de mode, s’habiller vintage serait une solution face à cette surconsommation. L’idée est simple : se vêtir avec des pièces un peu datées remises au goût du jour. Les vêtements ont déjà été portés dans les années 1960 mais n’ont pas pour autant été jetés. Il est donc possible d’être à la pointe de la tendance sans entretenir le cercle vicieux du commerce actuel. Tout l’enjeu réside ici, s’habiller vintage, c’est s’habiller responsable.
700 000 tonnes de vêtements sont achetées chaque année en France, en moyenne 10 kilogrammes par personne. Un constat qui à priori ne choque pas bien que ce nombre soit considérable. Consommer des vêtements contribue à l’industrie textile et à l’emploi que génère celle-ci. Toutefois, la production de vêtements créée aussi des émissions de gaz à effet de serre qui font d’elle la seconde industrie la plus polluante derrière le secteur pétrolier. Les matières utilisées pour produire les vêtements en sont la cause : des engrais (pour faire pousser le coton), une grande quantité d’eau et de colorants chimiques. En s’habillant vintage dans les placards de nos grands-mères, les volumes produits pourraient aussi être réduits pour limiter la pollution qu’ils génèrent.
De plus, dans notre ère de surconsommation le schéma est tout tracé : on achète, on consomme, on jette. Plutôt que de jeter des vieux jeans il serait intelligent de les recycler. Le fait de se débarrasser d’un vêtement n’est pas sans conséquence : sa combustion entraîne des rejets de CO2 considérables dont la planète pourrait bien se passer. Le vintage serait ainsi une solution face à cela, les vêtements ne sont pas jetés mais réutilisés.
Aujourd’hui seul un tiers des vêtements usés est donné pour une seconde vie. Même si ces chiffres paraissent faibles, ils sont porteurs d’espoir. D’ailleurs, l’an passé le marché de l’habillement neuf était en difficulté. L’IFM (Institut Français de la Mode) note un recul de 3% des ventes du secteur. Cela est dû à la baisse les revenus des ménages (-1,3% selon l’INSEE) mais il ne serait pas trop incohérent de penser que les mentalités évoluent aussi.
Vintage engagé
Cet enjeu peut même aller plus loin en s’engageant dans des causes qui dépassent la lutte contre la surconsommation. C’est notamment le cas de la friperie lilloise Oxfam. Majdouline Msbai, sociologue spécialisée dans l’économie solidaire, a fait le pari d’ouvrir un dépôt-vente. Les clients déposent leurs vêtements inutilisés en échange de 70% du prix de vente. Les 30% restants sont reversés à l’association Oxfam France. Les fonds levés permettent ainsi de lutter contre les inégalités et la pauvreté dans le monde. La boutique accueille aussi des créatrices engagées. La marque « Louise Religieux » utilise les fonds de rouleaux de tissus pour faire des robes, « Povera » confectionne des headbands en collant, matériau qui ne se recycle pas. D’autres encore cachent les tâches et les usures pour donner une seconde vie au produit. Ainsi, rien n’est jeté, tout est remis sur le marché. Lise Boudhar, l’une des bénévoles rencontrés, explique : « Quand on achète du vintage on sait d’où ça vient, c’est souvent fabriqué en France et on est dans un esprit de seconde main. On se dit que si les vêtements ont pu traverser les périodes c’est qu’ils sont de bonne qualité. Le client se sent aussi responsable de ce qu’il achète en réduisant les conséquences qu’entraîne la surconsommation ». Mais bien sûr s’habiller avec des vêtements vintages a un coût et c’est ce qui bloque souvent les acheteurs. Ce frein est compréhensible mais les clients adeptes du vintage sont de plus en plus nombreux à mettre le prix pour soutenir cette économie responsable. Alors on ne jette plus, on sort de la surconsommation et en plus on sort de l’ordinaire avec des pièces uniques.
Friperie Oxfam en photos (by Benjamin)
Reportage (by Claire)
Pour cette interview nous sommes aller à la rencontre de Valérie, gérante de la boutique « Funny Vintage » à Lille, où l’on trouve principalement des vêtements, accessoires et déco des années 50 à 90. Derrière ces pièces mêlant style et originalité se trouve une réelle volonté de faire partie d’une consommation responsable en vendant des produits de seconde main.
Le vintage, véritable acte de conscience ou simple tendance ? (by Célia)
Si à l’origine, le principe d’acheter des vêtements de seconde main s’inscrivait dans une démarche de « slow-fashion », c’est-à-dire écologique et/ou économique, la donne change. De plus en plus, d’autres fanges de la population s’y rendent pour dénicher le vêtement unique qui les démarquera des autres. Ce ne serait pas un problème si cela ne causait pas l’augmentation des prix dans certaines boutiques. Pour les magasins d’ONG ou encore d’associations vendant des fripes, cela n’a pas eu de réel impact, ces organismes suivant un but bien précis. Le problème se pose au niveau d’autres chaînes de magasins, qui en ont profité pour augmenter leurs prix. Bien que les vêtements proposés soient toujours moins coûteux qu’à leur état neuf, ils deviennent tout de même moins attractifs pour les consommateurs initiaux. Attirant ainsi une nouvelle clientèle, ils sont une conséquence de l’embourgeoisement des quartiers.
A une plus grande échelle, autour des habits de seconde main s’est développé un réel business, celui du vintage. Beaucoup de pièces voient même leur valeur augmenter avec le temps. Les entrepreneurs sur Internet s’en sont vite emparés : de nombreux sites et applications, surfant sur la vague, donnent une seconde vie aux vêtements ou servent simplement de plate-forme d’échange entre utilisateurs. Cependant, si votre but est de chercher la bonne affaire, la tâche sera ardue.
De nos jours, les vieux vêtements que vous trouvez dans le grenier de votre grand-mère et que vous revendez à la braderie du coin pourraient valoir plus que vous ne le pensiez. L’expression faire du neuf avec du vieux prend tout son sens, car la mode d’hier est aussi celle d’aujourd’hui.
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