L’insertion professionnelle : la clé pour l’insertion sociale
© Pauline Brault
Selon l’INSEE (Institut National de la statistique et des études économiques), le taux de chômage en France s’établit à 9,1 % de la population active en 2018, soit 2,5 millions de personnes. Parmi eux, les jeunes et les non-diplômés sont les deux catégories les plus touchées.
En effet, le taux de chômage des non-diplômés est près de quatre fois plus élevé que celui des personnes qui disposent d’un diplôme supérieur à bac +2 en 2017. Cette situation est directement liée à la « sacralisation » du titre scolaire. Le diplôme est considéré comme un atout essentiel et INDISPENSABLE : ceux qui n’en possèdent pas passent en dernier !
Cette triste situation va en réalité beaucoup plus loin : de nos jours, on s’inquiète beaucoup plus du déclassement des diplômés que du non-classement des jeunes peu diplômés, le plus souvent issus des milieux populaires. Ce qui pose un véritable problème d’un point de vue sociologique comme l’explique Pierre Bourdieu dans son ouvrage Les Héritiers sur la reproduction sociale. Selon lui, l’école est une institution reproduisant les inégalités, les exigences et les critères du système d’enseignement jouant au détriment des classes défavorisées. Au bout du compte, comme l’accès au diplôme est lui-même très lié à la position sociale des parents, les enfants de cadres deviennent bien plus souvent cadres eux-mêmes que les enfants d’ouvriers. De ce fait, les jeunes non-diplômés issus des milieux populaires partent avec un désavantage considérable : la réussite reste possible, mais au prix d’efforts incomparables à ceux des diplômés.
Pour réduire ces inégalités d'insertion, l’État met en place plusieurs dispositifs :
– Pour les moins de 26 ans, le parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie (PACEA) est proposé. Tout au long de ce dispositif de 12 mois, un conseiller accompagne le jeune en cours d’insertion en lui proposant plusieurs phases d’accompagnement comme : des périodes de formation ou encore des périodes de mise en situation en milieu professionnel. L’ensemble de l’offre de services de la Mission locale peut également être mobilisé : accompagnement à la création d’activité, parrainage, mission de service civique.
– Les dispositifs « deuxième chance » sont financés par le ministère du Travail, l’EPIDE et les écoles de la deuxième chance (E2C). Ils offrent une remise à niveau sur les fondamentaux scolaires, notamment, en lecture, écriture et calcul, et accompagnent des jeunes motivés dans la construction de leur projet personnel.
– Le contrat d’apprentissage repose sur le principe de l’alternance entre enseignement théorique en centre de formation d’apprentis (CFA) et l’enseignement du métier chez l’employeur avec lequel l’apprenti a signé son contrat. Il permet l’acquisition d’une qualification professionnelle (diplôme, titre, certificat de qualification professionnelle…) reconnue par l’État.
– Le parrainage pour l’emploi facilite l’insertion professionnelle des jeunes pour qui l’entreprise est un monde difficile d’accès.
Le métier de travailleur social présente une aide précieuse pour ces jeunes, comme l’explique Isabelle, assistante sociale : « Le travailleur social a le statut d’accompagnateur. Il peut intervenir auprès de tout public (personnes âgées, handicapées, en insertion sociale, SDF, ou enfants) dans le cadre d’entretiens individuels ou collectifs afin de favoriser leur bien-être, leur insertion sociale et leur autonomie. » L’objectif est d’accompagner au mieux la personne en lui permettant de trouver les ressources dont elle a besoin pour améliorer sa situation : « Par exemple, il nous est possible d’aider une personne à la création d’un dossier fond solidarité pour résoudre ses difficultés de règlement de loyer », témoigne Isabelle.
De nombreuses associations voient également le jour comme par exemple Cap Énergie qui oriente son action vers les personnes adultes handicapées et en voie d’exclusion dans une perspective d’insertion-réinsertion par le travail et l’activité économique dans les Hauts-de-France ; ou encore La Bouquinerie du Sart qui propose un emploi aux personnes sans logement qui sont actuellement pris en charge en centre d’hébergement sur la métropole lilloise.
Le travail – et au sens plus large, l’insertion professionnelle – représente la clé d’une bonne insertion sociale. Ainsi, pour pouvoir bénéficier par exemple d’un logement autonome, l’emploi semble être une condition impérative. Cependant, l’accès à l’emploi pour TOUS reste toujours compliqué. Les mesures mises en place par l’État, le métier de travailleur social ainsi que les associations représentent des solutions prometteuses pour lutter contre le chômage et la précarité en France.
Loredane Binet
ZOOM SUR...
Les invisibles de Louis-Julien Petit
De l’humanité, de l’espoir et une réalité dépeinte avec justesse. C’est ainsi que Louis-Julien Petit signe son quatrième film en salles depuis le 9 janvier, Les invisibles. Et il fait du BIEN.
Alors on le sait, début janvier c’était aussi la reprise. Vous étiez occupé à vous rendre à la salle pour utiliser votre forfait que vous abandonnerez sûrement d’ici mars, et c’est une excuse légitime pour ne pas être allé dans les salles obscures. Voici donc un recap pour les retardataires :
Les invisibles de quoi ça parle ?
Audrey (ici campée par Audrey Lamy), travaille dans un centre de jour pour femmes SDF qui est contraint de fermer. L’équipe de travailleuses sociales décide alors de donner une chance à ces femmes invisibles de réintégrer le marché du travail. Mais surtout, de reprendre leur vie en main.
L’une des qualités de ce film est la justesse par laquelle il met en avant le quotidien de ces héroïnes. Une réalité malheureusement encore trop présente en France, où selon les derniers chiffres de l’INSEE datant de 2012, plus d’un tiers des SDF sont des femmes. Et s’il semble qu’elles soient rares, c’est en réalité là où le titre voit juste : c’est davantage qu’elles sont invisibles.
Une difficulté supplémentaire face à un marché du travail a priori déjà hors de portée. Car si les travailleurs sociaux fournissent bien un accompagnement et que les SDF ont les capacités et la volonté, l’intégration reste tout de même compliquée. Selon l’INSEE en 2014, un quart des SDF travaillaient et 39% le souhaitaient.
Alors un conseil : on laisse de côté les préjugés, on va voir Les Invisibles et surtout, à l’approche de la journée internationale des droits des femmes, on les célèbre toutes plus que jamais.
Coline Grancher