En 2017, seulement 2% de l’électricité produite en France provenait de la filière photovoltaïque. La région Hauts-de-France contribue, à son échelle, à cette production.
Bien entendu, pour produire ce type d’énergie, il faut du soleil, facile ! Et bien entendu, il est également facile de dire que l’ensoleillement n’est pas la caractéristique principale de la région. Comparativement, la production d’électricité liée au solaire en 2017 dans les Hauts-de-France n’est que de 131 GWh (gigawatt-heure) quand elle atteint presque 2500 GWh en Nouvelle Aquitaine. Mais le potentiel d’installation photovoltaïque reste important dans une région qui demeure très peu équipée. Mais alors, pourquoi l’énergie photovoltaïque est-elle si peu développée dans le Nord de la France ?
Pour répondre à cette question, nous sommes allés à la rencontre d’une association qui milite pour l’installation de panneaux à énergie solaire (photovoltaïques ou thermiques) dans le Nord et de son directeur, Thierry Janssoone. Solis, fondée en 2012, s’engage pour accélérer le développement des énergies renouvelables, rendre accessible l’énergie solaire et contribuer à l’indépendance énergétique de notre pays.
Pensez-vous que la région Hauts-de-France a un potentiel pour l’énergie solaire ?
Loin des clichés en raison de son climat et de son ensoleillement, le solaire est pertinent en région, il suffit déjà de comparer avec son développement en Allemagne et même en Angleterre. Les panneaux solaires baissent en rendement au-dessus de 25 °C. Par rapport à Apt – ville du Vaucluse, ndlr – qui bénéficie de plus de 80 % d’énergie solaire, le rendement est supérieur de seulement 30 % de production. De plus de nombreuses études ont démontré que le gisement sur les toitures existantes est très important : 5 GWc en Nord, Pas-de-Calais (SRCAE 2011).
Expliquez-nous le principe et la démarche de l’association Solis.
Développer les énergies renouvelables, produire une électricité « locale ». SOLIS, c’est une association qui a monté en 2012 une coopérative citoyenne de production locale d’électricité via des toitures solaires. Le modèle est celui-ci : collectivités locales et citoyens investissent ensemble dans des toitures solaires installées sur des bâtiments et équipements collectifs (écoles, gymnases, églises…). Ces toitures solaires produisent une électricité « propre », injectée sur le réseau local. Sur le territoire métropolitain, SOLIS a déjà mis en place quatre toitures solaires, produisant en moyenne 98 000 kWh par an. Soutenue par la MEL, elle s’est fixé l’objectif d’installer 25 à 30 toitures solaires d’ici à 2020.
GWc (watt-crête) : correspond à la puissance maximale d’un dispositif.
SRCAE : Schéma régional climat air énergie, crée avec les lois Grenelle I et II de 2007. A pour but de fixer des objectifs d’ici 2020 et 2050 concernant les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique, la réduction des gaz à effet de serre et des émissions de polluants atmosphériques. Ceci tout en prenant en compte les enjeux environnementaux, économiques, sanitaires, industriels et sociaux.
Avez-vous l’impression que les collectivités territoriales, avec lesquelles vous travaillez, sont à votre écoute et mènent des politiques dans le sens d’un développement durable ?
Beaucoup de collectivités n’ont pas encore pris conscience de l’avantage d’impliquer les citoyens dans la transition énergétique ou ne savent pas comment faire. Depuis 2015, la loi transition les incite en leur permettant d’investir en capital dans des sociétés de projet EnR – énergie renouvelable, ndlr. Heureusement que quelques collectivités pionnières nous font confiance et nous soutiennent pour mener à bien la transition énergétique.
Votre association prône l’énergie solaire comme alternative aux énergies fossiles. Pourquoi considérer que le solaire est l’énergie d’avenir ?
L’avantage du photovoltaïque, c’est sa proximité par rapport au lieu de consommation. Les panneaux posés sur les toitures résidentielles et de bâtiment d’activités professionnelles vont fournir une énergie compétitive et faire baisser la facture énergétique. Même si le temps de retour de l’investissement est encore un peu long, entre 12 et 15 ans, l’énergie autoconsommée est gratuite pendant encore au moins 15 ans.
L’électricité devrait augmenter fortement dans les années à venir rendant le photovoltaïque encore plus intéressant. Avec la production d’énergie renouvelable, il faut associer une démarche d’économie d’énergie et changer ses comportements, privilégier la sobriété et l’efficacité énergétique. Demain avec des batteries moins chères, il sera possible d’optimiser au mieux son autoconsommation, avec l’internet de l’énergie mis en avant par Jérémy Rifkin et la Troisième révolution industrielle, les producteurs pourront facilement échanger leur énergie et mutualiser sur le réseau public leur surplus d’énergie.
Octave Delepiere
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Voici un aperçu des initiatives prises dans le Nord, notamment dans la ville d’Erquinghem-Lys dans la Métropole lilloise.
Bérénice Del Tatto
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... le solaire en Allemagne.
Bien que la France développe sans cesse ses projets d’installations solaires un peu partout sur le territoire, elle reste cependant en retard. Elle ne peut rivaliser face à une Allemagne qui produit 35% de l’électricité d’origine solaire photovoltaïque de l’Union européenne (contre « seulement » 7,6% en France). Néanmoins, de nombreux projets apparaissent, comme celui d’un parc de 20 hectares de panneaux photovoltaïques dans le Pas-de-Calais, à Leforest.
Mais pourquoi certains pays comme l’Allemagne sont-ils plus en avance que nous dans ce domaine ? Cela s’explique par le fort investissement de Berlin dans les énergies renouvelables. Avec la Ernauerbare-Energien-Gesetz, la loi allemande sur les énergies renouvelables de 2000, la part d’énergies renouvelables dans la production allemande a presque triplé. Cependant, les contribuables paient cet investissement, seulement rentabilisé dans les prochaines décennies, ce qui constitue l’une de ses limites. Il faut savoir que le prix de l’électricité en Allemagne a doublé en moins de 5 ans et est deux fois plus cher (30 centimes/kWh) qu’en France (14 centimes/kWh).
La volonté d’une transition complète, ou du moins trop rapide, est donc à considérer avec précaution. C’est ainsi que des aides et subventions, nationales ou locales, pour les particuliers ont été mises en œuvre : des prêts à taux zéro pour l’installation de panneaux, une réduction de la TVA à 5,5%, des aides de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) voire de collectivités ou d’associations locales.
Benjamin Grischko