À l’heure où tout semble vouloir aller plus vite, de nouveaux maux apparaissent pour des êtres pas forcément adaptés à cette accélération permanente. Les thérapies alternatives pourraient s’imposer comme des solutions, imposant leur rythme et une écoute “bio-logique”.
Le monde actuel va toujours trop vite, si bien qu’il est difficile pour l’homme de suivre la cadence. Dans une société où l’on est constamment sollicité, pressé, à la recherche de la productivité, l’homme paye aujourd’hui le prix fort. Burn-out, stress, anxiété… voici le revers de la médaille. Pour parer à ces maux, les praticiens se sont ouverts, en se tournant notamment vers des techniques plus douces. Nombreuses, les pratiques thérapeutiques séduisent aujourd’hui de plus en plus de Français à la recherche d’une alternative plus à l’écoute du corps et de l’esprit.
Certains ont tout essayé en matière de médecine conventionnelle, sans parvenir à se défaire de leurs maux. Ils se sont alors tournés vers des thérapies alternatives, mais est-ce que ça marche vraiment ? Guy Barbier, praticien de fasciapulsologie, une thérapie manuelle qui libère les mémoires traumatiques du corps et de l’esprit, en est la preuve. Salarié pendant dix ans dans une grande entreprise, il fait un burn-out et sa santé se dégrade. Son dos est bloqué et les médecins lui assurent des anti-douleurs à vie. Mais son problème vient en fait des intestins, enflammés, qui bloquent le mouvement des fascias qui les entourent. Ces derniers étant attachés aux lombaires, ils tirent dessus jusqu’à déformer son dos, entraînant un blocage complet. Ces informations, c’est avec la fasciapulsologie qu’il les a apprises. Après un long traitement, il est guéri et sa vie en est tellement changée qu’il décide de devenir fasciapulsologue à son tour.
Vision holistique
Les thérapies alternatives s’intéressent au patient dans sa globalité, en tant qu’être physique et psychologique. Dans ce sens, elles sont donc plus à l’écoute de la personne que la médecine conventionnelle. Cependant, elles n’ont pas vocation à la remplacer car elles ne traitent pas les mêmes problèmes. Laurence Hervouet est praticienne de la méthode Feldenkrais, une pédagogie qui propose une expérience corporelle pratique de la perception de soi, en s’appuyant sur le mouvement et s’adressant au fonctionnement de l’individu. Elle affirme ainsi : « On ne cherche pas à remplacer, on complète. » C’est aussi ce que défend Chantal Carrier, créatrice du Mouvement Régénérateur ®, une méthode corporelle et respiratoire qui initie au développement de l’état méditatif. Elle déclare: « Pourquoi opposer la médecine conventionnelle aux thérapies alternatives ? On sait les manques de l’une et ceux de l’autre (…) Quand on est malade, on est bien content que la médecine allopathique existe. » Il s’agit donc beaucoup plus de changer le regard des gens sur la vie et sur le monde pour améliorer leur quotidien. Selon Rajalakshmi Chellappan, praticienne de médecine ayurvedique, qui permet l’harmonie du corps et de l’esprit par des massages et des conseils sur notre mode de vie, la médecine douce cherche à guérir les racines de nos maux. C’est pourquoi, il n’est pas nécessaire d’être malade pour suivre ce type de traitements.
« On est menés par le rythme du numérique. Or, si une machine peut fonctionner longtemps sans s’arrêter, ce n’est pas le cas de l’Homme. Nous ne prenons plus le temps de reprendre contact avec nous-même. »
Chantal Carrier, créatrice du Mouvement Régénérateur ®
Les hommes ont besoin d’alterner activité et repos. Or dans une société où tout va trop vite, « les gens sont souvent loin d’eux même », affirme Laurence Hervouet. Le stress, l’anxiété, tant de pathologies qui résultent de notre mode de vie, et qui nous éloignent de nous-même. « On est menés par le rythme du numérique. Or, si une machine peut fonctionner longtemps sans s’arrêter, ce n’est pas le cas de l’homme. Nous ne prenons plus le temps de reprendre contact avec nous- même », affirme Chantal Carrier. Les thérapies alternatives présentent en ce sens une réponse à tous ces maux puisqu’elles offrent la possibilité de se recentrer sur soi et d’apprendre à entretenir une relation plus saine avec le monde extérieur, vers lequel nous sommes irrémédiablement tournés.
La France tend à reconnaître de plus en plus ces thérapies alternatives, même si elle reste très en retard par rapport à certains pays. En Inde, par exemple, la médecine ayurvedique est apprise au cours des études de médecine occidentale. Cette différence réside en partie dans notre lien très distant avec le corps. En Inde, au contraire, on se rapproche du corps au travers de la théorie des cinq éléments qui composent à la fois l’univers, et le corps humain. Rajalakshmi Chellappan illustre cette théorie ainsi : « C’est comme l’électricité. Ce n’est pas possible de la voir, mais elle est là. » Cependant, notre lien avec le corps tend à se resserrer, notamment depuis la loi du 4 mars 2002, qui reconnaît le titre d’ostéopathe. Si les autres thérapies alternatives ne rentrent aujourd’hui que dans la sphère du Bien-être, elles suivent progressivement leur chemin et séduisent de plus en plus de Français sur leur passage.
Anna Govin
Zoom : Qu’en pensent les scientifiques ?
Il y a quelques années, l’avis des scientifiques sur les médecines complémentaires était assez tranché dû à l’absence de preuves scientifiques quant à leur efficacité. Soit les études n’étaient pas assez conséquentes pour en tirer des conclusions, soit elles montraient au contraire l’inefficacité de ces méthodes. Cependant, les mentalités ont évolué et la règle du « si ça fonctionne tant mieux » devient centrale. C’est notamment la position du psychiatre Jean Oureib, qui recommande certaines médecines alternatives à ses patients, dans des cas précis. L’Académie Nationale de Médecine reconnaît l’utilité de ces méthodes dans certains cas, si elles sont bien encadrées et suivent un avis médical. C’est pourquoi, on observe une pénétration importante des médecines complémentaires dans le milieu hospitalier, par exemple, l’acupuncture pour prévenir les nausées et les vomissements induits par la chimiothérapie.
Cependant, le corps scientifique insiste sur le fait que ces médecines sont complémentaires et ne remplacent en aucun cas la médecine traditionnelle. Il ne faut également pas oublier qu’elles peuvent avoir des effets secondaires et être dangereuses si elles sont utilisées à la place de traitements reconnus.
L’absence de reconnaissance par l’état de certaines de ces thérapies complémentaires entraîne un déficit de cadre qui favorise l’installation de charlatans et augmente la défiance des scientifiques à leur égard. Le psychiatre Jean Oureib fait alors remarquer qu’elles peuvent devenir le terrain de chasse de dérives sectaires et sont donc à proscrire pour des patients fragiles psychologiquement.
Les thérapies complémentaires oui, mais pas pour n’importe qui, pas n’importe comment, et non comme substitution aux médecines traditionnelles !
Manon Papin