Crédit : Léonie Castelain
Le biologiste Jacques Balthazart spécialisé en neuroendocrinologie a publié en 2010 un ouvrage intitulé Biologie de l’Homosexualité. Il y regroupe des études et des expérimentations sur des animaux pour montrer que l’orientation sexuelle humaine est déterminée avant la naissance, donc indépendamment de la volonté de l’individu, et ce de manière irréversible.
Dans son ouvrage, le biologiste explique que la découverte de l’homosexualité ou de la transsexualité pour un individu est souvent une source de souffrance. En France en 2019, 4,7% de la population a des pensées suicidaires selon SOS Homophobie contre 23% pour les personnes LGBTI et 60% pour celles agressées il y a moins d’un an. Internet est le premier contexte de LGBTIphobie, suivi des espaces publics et des proches, notamment, selon le rapport SOS Homophobie de 2020. Lorsque ce rejet émane des proches, il est souvent quotidien et cela peut avoir des effets néfastes ancrés chez l’individu LGBTI, surtout lorsqu’il s’agit d’un·e adolescent·e.
Une origine biologique déterminante
Les études sur le sujet prouvent qu’il existe un noyau dans l’aire préoptique à l’avant du cerveau qui diffère en fonction de l’orientation sexuelle. On parle de différenciation sexuelle entre les hommes et les femmes ainsi qu’entre les individus hétérosexuels et homosexuels. En partant de cette conclusion on peut alors établir un net contraste en fonction de l’orientation sexuelle. En effet, les hommes hétérosexuels ont un SDN (Noyau Sexuellement Dimorphique) au moins deux fois plus grand que celui d’une femme hétérosexuelle. De cette manière, les homosexuels ont un noyau plus petit et les homosexuelles un noyau plus grand. Ce noyau est déterminé durant la période embryonnaire et ne grossit pas à l’âge adulte car il n’est pas concerné par le phénomène de plasticité cérébrale. La biologie tient également compte de facteurs génétiques qui jouent un rôle dans la détermination de l’orientation. « Cela ne montre pas un phénomène de façon précise et irrémédiable mais cela suggère qu’il y a des influences biologique, hormonale et génétique qui, en interagissant, montrent que l’orientation sexuelle est fortement influencée voire déterminée par des causes biologiques prénatales », explique Jacques Balthazart.
Les thèses psychologiques infondées
Freud théorise l’homosexualité en expliquant qu’un·e homosexuel·le n’aurait pas fini sa construction sociale au niveau de l’orientation sexuelle. D’autres théories sont venues s’y ajouter comme le constructivisme ou le behaviorisme. Le point commun de ces pensées revient à expliquer que l’homosexualité est le résultat d’une construction sociale, donc un “défaut” dans l’éducation. Cependant, « tous ces mécanismes biologiques ont un effet alors que les mécanismes psychologiques postulés n’ont démontré aucune évidence reproductible, ce qui fait pencher la balance du côté de la biologie« , affirme Jacques Balthazart. Il précise aussi que son ouvrage vise à contrer la forte influence de la psychanalyse sur ces questions en France, pour laisser place à la science.
L’identité sexuelle est innée
L’identité sexuelle, autrement dit le genre, est caractérisée par un plus grand nombre de neurones dans le noyau d’un mâle indépendamment de leur orientation et inversement pour les femmes. Étant donné qu’il s’agit du même noyau que pour l’orientation sexuelle, la plasticité cérébrale reste sur le bord de la route. Encore une fois, ces mécanismes hormonaux et génétiques interviennent et montrent que les explications biologiques sont plus appuyées que les thèses psychologiques sur le sujet de la transsexualité notamment. Le biologiste explique qu’elle n’est pas un caprice et est « fermement établie » dès l’enfance indépendamment de l’éducation qui l’encourage peu dans les société occidentales.
SOS Homophobie note que les LGBTI sont de mieux en mieux acceptés dans la société mais “leur visibilité les expose davantage aux agressions”. C’était le cas sur les chiffres de 2013 en lien avec le mariage pour tou·s·tes et ces dernières années avec les personnes trans. Sauf que comme l’orientation et l’identité sexuelle ont une origine biologique, les motifs exprimés des violences à l’égard des LGBTI sont absurdes. La visibilité ne doit plus engendrer davantage de violence mais plus de tolérance.

Clémence Fourel
Zoom sur la Fondation « le Refuge », centre d’accueil pour LGBT+
Reconnue d’Utilité Publique, la Fondation « Le Refuge », a pour objet de prévenir l’isolement et le suicide des jeunes LGBT+, de 14 à 25 ans, victimes d’homophobie ou de transphobie et en situation de rupture familiale.
Implantés dans les principales métropoles européennes telles que Lille, Bordeaux ou encore Montpellier, ville de sa création, le but de la Fondation est simple : proposer aux jeunes en détresse , un hébergement dans des appartements-relais mais aussi un accompagnement social, psychologique et juridique.
Le centre d’accueil n’est pas en reste, les 455 bénévoles ont déjà accompagnés 8503 jeunes depuis la création du Refuge en 2003. Ces adolescents sont principalement rejetés de leur famille qui n’acceptent pas leur homosexualité : « […] à 15 ans, on peut se retrouver dehors en plein hiver » souligne l’humoriste et marraine de l’association Muriel Robin.
La motivation des bénévoles, en plus d’apporter leur aide précieuse, est souvent la même : faire bouger les choses. Pour Olivia Chaumont, bénévole de la Fondation, c’est un véritable honneur car « quand on est une personne transgenre, qu’on a côtoyé l’ostracisme, la discrimination et le rejet ; […] alors il est naturel de donner un peu de soi pour faire avancer les choses.
La Fondation n’a cessé d’évoluer depuis sa création et compte aujourd’hui plus de 16.000 donateurs. Elle a dû se renouveler durant la crise sanitaire face aux conditions difficiles mais surtout face à des demandes de suivis en hausse dû au confinement.
Hugo Crabos
Le Liquium : un espace où chacun trouve sa place
Liquium en latin signifie « oblique », autrement dit, hors du droit chemin ou ce qui est hors-norme, comme nous l’explique Myn : « On n’est pas ce que la société attend de nous d’être ». Des mots qui traduisent bien une société patriarcale, encore marquée par un idéal religieux et conservateur en ce qui concerne les questions d’orientation sexuelle, de genre et de couple.
Le Liquium, bar hétéro-friendly, ouvre ses portes en 2014 à Lille, rue Jeanne d’Arc. Myn, son propriétaire, militant actif dans les associations LGBTQIA+, souhaitait créer un établissement « en dehors du milieu associatif, un lieu communautaire et alternatif à ce qui existait déjà [bars de nuit exclusivement gays, NDLR] ». Offrir un espace où l’exclusion n’est plus, où LGBTQIA+ et hétérosexuels se côtoient dans la bienveillance et la bonne humeur. Le ton est donné à l’entrée : « Ici bière pression, pas d’oppression ». Ce projet naît dans un bar associatif auquel le jeune Lillois participait tous les jeudis soirs. Une envie qui prend vie et qui montre bien que si la société évolue sur la perception des personnes LGBTQIA+, il reste que ces établissements sont encore nécessaires. « Le jour où l’on pourra se dire que l’on n’a plus besoin de ce type d’établissement, c’est que les choses auront avancé, même si c’est déjà le cas sur certains points. »
Casser l’isolement dans lequel se retrouvent enfermées certaines personnes LGBTQIA+, c’est aussi ce qu’offre ce bar. « Le lien communautaire est important à mon sens, tout comme il est important de pouvoir se dire qu’on n’est pas tout seul. ». Entrer dans un lieu communautaire peut d’abord effrayer. S’accepter tel que l’on est et faire son coming-out n’est jamais, ou presque, chose facile, tout comme conscientiser et accepter d’appartenir à une communauté. Mais cette communauté est aussi là pour apporter son soutien. Pour Myn, cet établissement est aussi un lieu où chacun peut solliciter de l’aide. Les vécus se croisent et les questions trouvent leur réponse. Ce bar est donc avant tout un lieu d’inclusion, tant pour les personnes qui se cherchent, que pour celles qui veulent passer une bonne soirée ou qui veulent faire des rencontres, peu importe leur orientation sexuelle.
Créer des safe places (lieux sûrs) où préjugés, violences et remarques désobligeantes n’ont pas leur place, c’est aussi désirer que ce type de lieux devienne une norme. « J’aspire à ce que tous les bars soient comme ça. » Un espoir qui deviendra peut-être réalité dans les années à venir, les mentalités ne cessant d’évoluer.
Mathilde Tassin