Mettre du beurre dans les épinards des producteurs
« À ma pomme », une Association pour le maintien d’une agriculture paysanne (Amap), se mobilise pour une rémunération plus juste des producteurs. Deux fois par semaine, ses membres se retrouvent dans la métropole lilloise pour la distribution des paniers bios et de saison. Une occasion privilégiée de recréer du lien entre producteurs et consommateurs.
Des miettes. C’est souvent ce qu’il reste aux petits producteurs après un bras de fer déséquilibré face à la grande distribution. Les rémunérer plus justement, tel est le combat des Amaps.
La précarité agricole s’est en effet érigée comme un enjeu majeur aujourd’hui. Et si la suppression des intermédiaires semble en être une solution possible, elle est rarement certaine : la vente directe sur les marchés ou à la ferme ne permet pas d’assurer des revenus constants. C’est pourquoi, certains se tournent vers d’autres modèles, comme celui des Amaps. En proposant aux consommateurs des abonnements annuels, elles apportent aux producteurs des revenus fixes, un espoir de sécurité financière.
Une proximité forte
Peu à peu, des Amap ont vu le jour afin de soutenir l’agriculture paysanne tout en privilégiant les produits locaux. Du côté de Lille, Yves-André Dardenne est maraîcher et apiculteur depuis 13 ans dans l’Amap “À ma pomme”, fondée en 2012. Le mercredi soir, Yves-André est à Lambersart pour emmener des paniers avec une grande variété de produits provenant de différents producteurs. Au menu : légumes, produits laitiers, viandes bovines, miels proposés aux consomm’acteurs de l’Amap. Des consomm’acteurs, car chacun met la main à la pâte, comme Gaëlle, une consommatrice qui aide, au moins deux fois par an, à la distribution.
Le lendemain, Yves-André et ses produits frais se rendent à Lille pour une livraison d’une cinquantaine de paniers. Ajoutée au marché, cette activité peut permettre d’assurer la sécurité de revenus fixes. Les consomm’acteurs signent avec leur producteur des contrats solidaires, payés à l’avance. En échange, les producteurs proposent aux consommateurs des produits de qualité. Edouard, « amapien » pour la deuxième année, confie : “C’est la qualité des produits locaux, bio et (distribués, ndlr) sans intermédiaire qui m’a séduit.” Seul ou en famille, chacun vient récupérer son panier dans une ambiance conviviale, car ici, tout le monde se connaît : il n’y a plus ce rapport de consommateur à producteur classique. Pour Yves-André, « ce ne sont plus des clients, ce sont des amis ». Il n’hésite pas à les accueillir chez lui pour leur montrer d’où viennent les produits. L’Amap permet d’instaurer une relation de confiance et de se nourrir non seulement de bons produits, mais aussi d’échanges avec les autres « amapiens ».
Amaps face aux grandes surfaces
Les Amaps ne peuvent bien souvent pas rivaliser avec la diversité de produits proposés et les prix affichés en grandes surfaces, qui continuent de séduire les consommateurs, surtout les plus précaires. Le nombre de personnes participant à ces initiatives reste ainsi restreint : “À ma pomme” compte 75 amapiens.
Mais au-delà de ces quelques limites, le modèle des Amaps permet de créer des liens directs et solidaires entre producteurs et consommateurs, ainsi qu’entre les consommateurs eux-mêmes. Un lien, qu’on ne retrouve d’ailleurs pas dans les supermarchés.
Ces initiatives permettent déjà de faire un pas en avant, vers un monde où les échanges directs sont restaurés, afin d’assurer aux consommateurs qualité et transparence, tout en garantissant aux producteurs de récolter plus que des miettes : une conquête du pain.
Arnaud Fischer
Le commerce équitable, garanti d'une bonne rémunération des producteurs étrangers
Le commerce équitable est aussi une manière de consommer en rémunérant les producteurs, notamment lorsqu’on ne peut pas acheter directement auprès d’eux.
Annaëlle Goupil
Zoom sur...
Et vous, pourquoi achetez-vous équitable?
Manger équitable a de plus en plus la cote ! C’est en effet ce que nous indique le baromètre Max Havelaar de la transition écologique de 2021 : 39% des personnes qui disent faire des courses hebdomadaires de produits alimentaires responsables ont pour motivation principale la juste rémunération des producteurs. Et pour être au plus près de la réalité, je me suis rendue directement auprès des consommateurs.
À l’université de Lille, l’association Les pieds sur Terre livre toutes les semaines des paniers pré-commandés par le personnel ou les étudiants. Leurs motivations sont assez claires. “Je suis pauvre“, me dit ironiquement une étudiante, mettant en avant le prix très avantageux de sa commande : 2€ pour le plus petit panier, difficile de faire mieux ! Au menu : Poivrons, courgettes, oignons… “C’est bio, local et ce sont de très bons produits.” Une deuxième cliente met également en avant le côté pratique de cette initiative. “On n’a pas besoin de faire le tour des marchés, ici c’est direct.” Aller chercher ses courses entre deux cours c’est la bonne solution !
Pour ceux qui ont le courage de se déplacer en magasin, c’est surtout la qualité des produits qui fait le change. À l’Épicerie équitable des halles de Wazemmes, plusieurs clients font l’éloge du café, moulu sur place, “bien meilleur que les autres”. Un homme au comptoir admet que, dans sa démarche, “ce sont les bons produits qui comptent, le label équitable c’est un plus“.
C’est ainsi surtout la qualité, l’aspect écologique et de saison qui convainquent la majorité des consommateurs. Une motivation qui assure tout de même une juste rémunération des producteurs locaux !
Margaux Guérif