Le greenwashing, le plafond vert de la consommation engagée
Ce samedi 23 septembre, un événement de vente de vêtements de seconde main était organisé au Grand Playground de Croix, par VinoKilo Events. Une centaine de personnes s’y sont retrouvées pour profiter d’une vente à la pesée : 1 kg de pièces “vintage” pour 45 euros. Un concept de plus en plus répandu, qui entraîne l’apparition d’un business, bien loin des promesses vertes et peu coûteuses.
“Ça fait 10 ans que j’achète des vêtements d’occasion, et je ne reconnais pas ce que j’ai connu dans ce salon“, nous raconte Géraldine. Bien loin de l’idée première de la seconde main, une démarche peu coûteuse et perçue comme écologique. En proposant la reprise d’un vêtement à un moindre coût, il s’agit aussi de réduire le gaspillage et la surconsommation entraînée par la fast-fashion.
VinoKilo Events récupère des vêtements auprès de diverses sources, notamment des dons, des achats en gros auprès de fournisseurs et des partenariats caritatifs. Les pièces sont ensuite minutieusement inspectées, afin de s’assurer qu’elles sont en bon état. Si besoin, elles sont nettoyées et réparées. Mais une vendeuse décrit aussi un processus bien plus complexe : “Quelqu’un collecte les vêtements pour nous et les envoie à Amsterdam. Je les récupère par camion. Après chaque événement, on les récupère, on les nettoie et on les renvoie ailleurs, en Allemagne par exemple.” Une telle organisation peut expliquer un prix qui dépasse celui de certaines enseignes traditionnelles. Une “honte” pour une adepte de la seconde main, qui estime que cette pratique devrait représenter “l’avenir“. Selon elle, les prix devraient cesser d’augmenter afin de conserver la valeur de la seconde main.
Un effet de mode qui transforme la pratique
Si les pratiques changent, c’est que la demande a augmenté. Un effet de mode, qui peut également entraîner une certaine superficialité dans la démarche des consommateurs. Ceux-ci s’arrêtent parfois à l’image conférée par la seconde main, sans se pencher sur l’acte réel d’achat responsable. Interrogée sur les raisons de sa présence, Salomé répond : “Aucune idée“. La démarche est souvent engagée, mais ne se questionne pas toujours sur les conséquences réelles. Dès lors, l’achat de vêtements de seconde main peut devenir une façon de se donner bonne conscience, tandis que les habitudes de consommation restent intactes. Un problème constaté par certains jeunes, qui pointent du doigt l’influence des réseaux sociaux. C’est ce qu’explique Amin, étudiant, qui consomme majoritairement des vêtements issus de la fast-fashion, et qui n’est “pas venu pour les principes de la seconde main“.
La “fast fashion” est un modèle commercial de l’industrie de la mode axé sur la production rapide et abordable de vêtements pour suivre les tendances en constante évolution. Cette approche implique des cycles de conception et de production courts, une imitation rapide des dernières modes, des prix abordables pour les consommateurs, ainsi que des préoccupations environnementales et sociales liées à la surproduction, à l’utilisation de matériaux bon marché, et à des conditions de travail parfois précaires dans la chaîne d’approvisionnement.
En outre, le business des vêtements de seconde main a évolué pour devenir une industrie prospère. Chez les personnes interrogées, certaines estiment que des entreprises ont capitalisé sur une tendance. Surfer sur la vague du “vert” sans véritablement s’engager, faisant ainsi du “green-washing”. Elles profiteraient de la cause écologique pour attirer un public engagé et prêt à dépenser davantage. Le capitalisme arrive donc à tout marchander en s’appropriant les vertus de la seconde main pour faire un maximum de bénéfices.
La seconde main s’impose aujourd’hui comme une tendance incontournable, derrière laquelle se trouve le désir collectif de trouver un équilibre entre style personnel et responsabilité environnementale. Les problématiques écologiques comme les questions éthiques poussent les consommateurs à repenser leurs choix et envisager un avenir où mode et durabilité seront des facteurs interdépendants.
Niya Pretot et Yanis Milliasseau
Retrouver l’essence de la seconde main
Les pionniers de la seconde main, tels qu’Emmaüs, aspirent à changer les habitudes de consommation en proposant une approche durable et éthique. Leur mission consiste à collecter des biens usagés, notamment des vêtements, pour les redistribuer aux plus démunis. Dans un monde obsédé par la “fast fashion” et la surproduction, leur engagement est plus essentiel que jamais.
Depuis ses débuts en 1949 sous l’impulsion de l’abbé Pierre, Emmaüs s’est imposée comme l’une des figures emblématiques de la seconde main. Son objectif : offrir une alternative à la “fast fashion” et à la surconsommation en encourageant la réutilisation.
Face aux évolutions rapides de la société et à l’avènement de l’ère numérique, Emmaüs a su s’adapter sans renoncer à ses valeurs fondamentales. La création de la plateforme en ligne est une illustration parfaite de cette capacité à évoluer. Cette plateforme lui permet de toucher un public plus large et de faciliter les dons et les achats en ligne, tout en générant des fonds supplémentaires pour soutenir ses missions sociales.
Grâce à cette nouvelle approche, Emmaüs continue d’explorer de nouvelles façons de maintenir des prix abordables pour les produits de seconde main.
En encourageant la réutilisation, en adaptant leurs méthodes aux besoins actuels et en exploitant la puissance du numérique, ces pionniers de la seconde main dessinent un avenir plus durable pour la société de consommation.