Depuis 2006 le jeu vidéo est considéré comme le dixième art. Cependant, une partie de la population en a encore une image négative. Face à cela, l’association Vegacy met en œuvre des initiatives pour redorer l’image des jeux vidéo.
Alors que les gouvernements des quatre coins du globe critiquent les effets néfastes des jeux vidéo sur les jeunes, l’incompréhension se creuse. Après le discours de Donald Trump en 2019 accusant les jeux vidéo d’avoir contribué à la violence dans une fusillade au Texas, c’est à l’aube des émeutes de l’été 2023 que le président français Emmanuel Macron prend la parole dans un tweet : « On a parfois l’impression que certains d’entre eux vivent dans la rue, c’est les jeux vidéo qui les ont intoxiqués. » Et malgré ses excuses, cette phrase fait écho à tous les débats politiques qu’il y a autour du jeu vidéo. Alors qu’il fait peur à certains à cause du risque de dépendance qui plane dans l’esprit collectif, Deborah Bellange, directrice financière pendant dix ans au sein de l’entreprise française d’édition et de distribution de jeux vidéo Focus Entertainment explique : « Le jeu vidéo est un des seuls endroits où un enfant a le droit à l’erreur, il doit persister pour réussir… il crée des gens optimistes dans le monde du travail, des gens qui savent se dépasser, qui cherchent toujours des solutions aux problèmes. » Et c’est d’ailleurs l’objectif de l’association Vegacy.
Basée à Lille, elle regroupe une dizaine de bénévoles et de salariés avec pour objectif de promouvoir l’e-sport auprès des jeunes et des moins jeunes. Elle cible des personnes de 12 à 80 ans à travers des événements, des tournois, des missions locales ou encore un espace sénior pour les plus âgés. « À Vegacy, on fait au mieux pour changer l’image néfaste des jeux vidéo en apportant un cadre à la pratique de l’e-sport », explique le président de l’association Hafid M’Sili. Bien que le jeu vidéo ait toujours été un minimum reconnu par l’Etat, l’e-sport a souvent été mis de côté ou pas assez valorisé. « C’est plus le côté professionnel et business qui est mis en avant que la structuration du monde amateur. C’est là qu’on peut avoir des projets dans des collèges, des lycées, des centres sociaux ou dans des clubs », précise-t-il.
Vegacy a aussi pour objectif d’intervenir dans le milieu de l’insertion pour montrer toutes les ouvertures que peuvent apporter les jeux vidéo. Pour se faire, l’association organise des sessions d’entraînement e-sport pour que les jeunes sortent et se retrouvent autour des jeux vidéo. De cette façon, le président assure avoir touché mille personnes et accompagné 200 jeunes. Il ajoute : « Grâce à notre bon réseau, quand un jeune vient nous voir en nous disant qu’il cherche un taf ou une formation on peut le renvoyer vers des propositions d’emploi dont on a entendu parler, même pour des petits contrats. » En effet, plusieurs membres de l’entreprise ont fait une formation de coach d’insertion par le sport qu’ils transposent aux jeux vidéo.
Bien qu’ils n’aient pas vocation à prendre la place des Services publics de l’emploi (SPE), ils servent de passerelle entre le demandeur d’emploi et les SPE. Vegacy n’oriente pas que vers les métiers de l’e-sport mais aussi vers différents métiers qui peuvent y être reliés comme le graphisme. Le secteur du jeu vidéo est une véritable source d’emploi que l’Etat finance en partie avec des crédits d’impôt. Il est aussi un pilier conséquent de la culture que les politiques désirent financer et promouvoir afin de développer le soft power.
Soigner par le jeu vidéo
35 millions, c’est le nombre de joueurs de jeux vidéo en France. Pourtant, pour une grande partie de la population, le jeu vidéo peut-être à l’origine de la violence. Michael Stora, psychologue et psychanalyste, dément cette idée : « Le jeu vidéo n’est ni la cause ni forcément une solution pour réduire les violences. Il faut remettre le jeu vidéo à ce qu’il est : un plaisir et un loisir. »
Effectivement, beaucoup d’études tendent à montrer que la pratique des jeux vidéo va avoir tendance, avec l’immersion, à baisser la violence. Pour cela, le psychologue explique : « je sélectionne des jeux vidéo précis et narratifs comme Shadow of the Colossus. Les jeux vidéo sont des espaces de projections où les jeunes, à travers leur avatar, vont vivre des aventures, affronter des monstres et peut-être des monstres intérieurs ». À l’inverse, il explique qu’un jeu compétitif pourrait engendrer du stress et/ou de la frustration.
Ainsi, utiliser le jeu vidéo comme médiation thérapeutique peut aider certains jeunes à trouver les mots en se racontant. Mais pour les personnes qui réussissent à parler et à trouver les mots, il n’y a pas de réelle utilité à soigner par les jeux vidéo. Cependant, bien que cette technique par l’immersion fonctionne, elle ne met pas tout le monde d’accord et beaucoup de pédopsychiatres ont encore des résistances.
Léonor Marlasca