56, c’est le pourcentage d’êtres humains qui habitent en ville, soit 4,4 milliards de personnes autour du globe. L’urbain : majoritaire certes mais viable sur son modèle actuel ? WOODII, petite jungle dans la ville, redéfinit les codes de la ville actuelle en ajoutant le végétal au programme.
Les visages de la ville évoluent à une vitesse folle, sans toujours se préoccuper du réchauffement climatique qui commence pourtant déjà à lui poser problème. L’urbanisme local attribue à chacun son rôle et permet de repeindre la ville en vert, par petites touches.
Pollution, inondations, canicules intenses… L’urbain ne cesse de s’étendre et le modèle de la ville grise reste trop présent face aux défis climatiques actuels. Aujourd’hui, la ville est synonyme de concentration, d’agglomération voire de manque de place. L’aménagement est alors une chasse au moindre m² où le vert n’a pas toujours de rôle.
De plus en plus, la ville, telle qu’elle est, peine à attirer. Ce fut flagrant à l’annonce du confinement, le rural attire car offre une image de cadre de vie sain, aux valeurs modernes. La ruée vers les campagnes est telle qu’on voit fleurir le terme d’exode urbain.
Pourtant, par leur importance politique, sociale et démographique, les villes ne peuvent être laissées sur le côté. Elles doivent être actrices de leur propre métamorphose. Elles renferment un potentiel d’innovation et de changement inestimable.

Le local avant le global
Tout ça commence au niveau local. Si les politiques publiques ont du mal à enclencher la transformation à grande échelle, ce sont les citadins qui prennent alors le rôle de bâtisseur de la ville de demain. Et c’est possible pour… tout le monde ! C’est ce que mettent en avant Victoria et Florent, gérants de WOODII, jardinerie urbaine et engagée. Si le vert n’est plus dehors, le couple ramène la nature à la maison.
Amoureux de plantes depuis des années, c’est le confinement qui fait germer cette envie un peu particulière. Ils contactent La Centrale, projet similaire à Grenoble « en accord avec leurs valeurs » et s’organisent pour offrir un lieu d’échange, ouvert à tous. Florent, informaticien pour le service public, et Victoria, qui travaille alors dans le domaine culturel, lâchent tout pour lancer leur propre jardinerie en plein cœur de Lille. Il a fallu tout reprendre : autodidactes, le duo avaient tout à apprendre et il faut « énormément de travail pour comprendre les plantes » affirme Florent, lunettes sur le nez et conseils plein la tête.
WOODII c’est leur univers, un poil humide, petite jungle dans la ville. Sur des étagères de 3 m de haut ou suspendu au plafond, le végétal est partout, sous toutes ses formes, aussi évident que leur passion commune.
“Ca nous semblait normal de faire notre part la dessus”
Pour le couple, la prise de conscience est totale et le but clair : « ça nous semblait normal de faire notre part là-dessus« , affirme Florent.
L'ambition de la transmission
Tous les choix sont réfléchis pour coller aux valeurs d’écologie et de consommation raisonnée et locale. Les idées se multiplient pour offrir une boutique écoresponsable, réellement : terreau en vrac (et sans tourbe !) pour éviter la surconsommation, pots en plastique recyclé grâce à l’énergie éolienne, bougies en cire de soja fabriquées en France…
Si c’est l’isolement qui inspire ce projet au couple, il veut justement transmettre pour « ceux, notamment en appartement, qui ont subi le confinement comme [nous] eux« . Ils sèment les graines de l’écologie pour faire des urbains les jardiniers du futur.
“Ce qu’on aime, c’est échanger, montrer qu’il y a d’autres possibilités”
Mi-septembre, ils organisaient un événement « troc de bouture », où chacun vient échanger ses plantes. « Ce qu’on aime c’est échanger, personne ne sait tout, on en apprend aussi tous les jours et avec ces ateliers« , partage Florent, convaincu que la discussion, c’est le meilleur moyen d’éveiller les consciences. Et c’est pas fini, les ateliers (soins, rempotage, création de terrarium…) reprennent au printemps !
Milane Guillemet–Renaud
Photos Le Châtillon

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Nouvelles nuances de vert en ville
La ville sait-elle encore jouer avec la palette de couleurs que propose la nature ?
Avec la bétonisation des sols et l’artificialisation des villes, la nature tend à disparaître du paysage urbain. Cependant, l’utilisation de ces nuances de vert est possible grâce à la végétalisation des villes.
L’avantage écologique est peut-être le plus intéressant aujourd’hui. La nature permet une réduction de la concentration en particules fines dans l’air, grâce à sa filtration. La végétalisation produit un filtre naturel qui décontamine les sols et les cours d’eau.
La nature en ville accroît le bien-être de la population, mieux respirer, encourage la pratique sportive. Pouvoir se ressourcer et ainsi se réapproprier la nature en fonction des fresques qu’elle crée. Un exemple frappant est celui des périodes de canicule, les espaces verts en ville humidifient l’air et amènent de l’ombre.
Cet apport de vert dessine aussi l’arrivée d’une biodiversité florissante comme celle des insectes, indispensables au maintien de cette végétalisation.
Chaque tableau doit être pensé pour espérer le chef-d’œuvre, la végétalisation des villes doit donner lieu à une organisation méticuleuse. Une connaissance du milieu et des espèces de la région, la mise à disposition de points d’eau et un entretien régulier pour mener à bien ces projets mis en valeur par le “permis de végétaliser”.
En vigueur depuis 2015, ce permis permet aux villes et à ses habitants de lancer des projets qui ramènent la nature en ville.
Divers intérêts entraînent la végétalisation des villes, il appartient à chacun de peindre de nouvelles villes avec les couleurs que nous offre la nature.
Chloé Valette
