La faible concurrence, l’ambiance et l’originalité sont devenues des atouts essentiels pour les friperies lilloises. Quatre gérants et employés de boutiques solidaires, vintage ou « un peu des deux », reviennent sur ce qui leur permet d’être une solution alternative aux grandes enseignes de mode.
Lorsque l’on discute avec des gérants et employés de friperies, on comprend rapidement qu’il y a une réelle différence entre « s’habiller en seconde main », peu importe le prix et l’endroit, et « s’habiller en fast-fashion », cette dernière désignant un pan de l’industrie du prêt-à-porter dont le rythme de renouvellement des collections est effréné. D’un côté, il y a la pièce unique, de l’autre la production en série et la surconsommation. « L’avantage de la friperie, c’est que tu as une pièce qui est quasiment unique car elle a vieilli d’une certaine manière, là où en fast-fashion, tu vas trouver un milliard de fois le même manteau, un milliard de fois le même pantalon », nous raconte Zaki, gérant de Yemma. Face à une industrie polluante, surconsommatrice et aux modes changeantes, les magasins de seconde main préfèrent attirer les clients grâce à des vêtements qui se démarquent par leur intemporalité.
Une faible concurrence permise par l’originalité
Les clientèles divergent profondément en fonction des friperies car la plupart des boutiques s’attachent à créer leur propre « identité » vestimentaire. Ainsi, les plus « vintage », dont les vêtements datent de plus de vingt ans, peuvent assumer une gamme de prix parfois plus élevée que le neuf en se cachant derrière une « sélection » de vêtements rares et de qualité. Fred, employé chez Mad Vintage, précise : « Pour moi, dans les fripes, il n’y a pas de concurrence. À part au niveau des prix, […] mais la clientèle vient ici car c’est de la pièce unique ». Le gérant de Yemma, Zaki, complète : « On va aller chercher un produit spécifique. Le but pour nous c’est pas de faire de la quantité, mais c’est de faire de la qualité. » Justifié comme une manière d’éviter la surconsommation en achetant moins, mais mieux, il est pourtant possible de réduire les pertes simplement en commençant par éviter de jeter ses pièces à la fin d’une saison ou d’une mode, comme le font la majorité des friperies.
« On n’est pas obligé de venir ici pour acheter, mais pour discuter avec les gens », Emma, cofondatrice et cogérante de Frip’Up.
Bien plus qu’un achat
À cela s’ajoute le plus souvent une ambiance soignée qui souligne l’esthétique de la boutique. Des vêtements nettoyés et triés par couleur, du café, du thé et des œuvres d’artiste exposées gratuitement : Frip’Up est même devenue une « extension de la maison » selon Emma, sa cofondatrice et cogérante. « C’est un petit lieu culturel ici. On n’est pas obligé de venir ici pour acheter, mais pour discuter avec les gens. » Plus qu’un moyen alternatif vestimentaire, certaines friperies cherchent à installer une vraie proximité avec leurs clients.
Au-delà du lien social de proximité, acheter en friperie peut aussi être synonyme d’action sociale. « C’est plus qu’un achat. C’est un achat responsable, écologique et solidaire », selon Hafida, responsable du magasin Oxfam de Lille. Du côté des boutiques solidaires, tous les budgets et tous les styles sont possible grâce aux dons et au travail de bénévoles. En plus d’offrir la possibilité à des personnes à faible revenu de se vêtir, cela permet surtout de contribuer au financement des actions de l’association propriétaire. « Quand on achète à Oxfam, à Chez Henry, à l’Armée du Salut ou Emmaüs, c’est un peu plus que d’acheter de la seconde main. Là, il y a un petit plus : on soutient une action. »
Lucie GRIVEAU
Zoom sur … l’attractivité des friperies à l’ère des réseaux sociaux
Les friperies utilisent depuis quelques années les réseaux sociaux et notamment Instagram afin de se rendre attractives et d’être connues du grand public.
Fleurissant à tous les coins de rues, ces magasins de vente de vêtements de seconde main se démarquent des grandes enseignes de type fast fashion de par leur éthique.
Afin de se rendre visibles, les friperies s’approprient le réseau social Instagram pour faire leur publicité en visant des publics précis. Néanmoins, leur utilisation de ce réseau varie selon le profil du magasin.
La cocréatrice de Frip’Up affirme que leur utilisation d’Instagram reste ponctuelle. Néanmoins, les clients affluent davantage lorsqu’ils « se montrent physiquement à la caméra ».
Ici, les réseaux ne sont pas vus de prime abord comme un moyen de faire de la publicité, mais comme une façon de créer un lien virtuel avec les clients.
C’est aussi ce que met en avant le gérant de la friperie Yemma qui explique que les réseaux sociaux leur permettent de se rapprocher de leurs clients, ce que les grandes enseignes n’ont pas.
Enfin, les friperies publient des stories (des courtes vidéos éphémères) et des posts en portant les vêtements mis en vente. La friperie Slowmod propose régulièrement des idées de tenues à porter. Les clients découvrent l’enseigne avant même de se rendre sur place.
Afin de se démarquer des grandes enseignes et d’attirer les consommateurs, les friperies s’appuient sur les réseaux sociaux pour créer un lien de proximité avec leurs clients.
Abigail DOS SANTOS