Parcoursup : la galère est gratuite, l’aide doit l’être aussi

Chaque année, l’ouverture de Parcoursup réveille les angoisses des lycéens et de leurs familles. Une jungle opaque où l’orientation scolaire devient un parcours du combattant. Face à cette incertitude, un marché très rentable émerge : celui des coachs privés. Contre plusieurs centaines d’euros, ces accompagnateurs promettent un suivi sur-mesure pour aider à naviguer sur la plateforme. Mais que faire quand on n’a pas les moyens ? L’association La Relève propose une alternative solidaire, loin du business de l’angoisse.

Chaque lycéen le sait : Parcoursup, c’est une épreuve en soi. Entre la complexité des algorithmes et le manque de transparence, l’angoisse grimpe en flèche. D’après le ministère de l’Enseignement supérieur, de nombreux lycéens ressentent un stress important pendant la période de Parcoursup. 

 

Un climat d’incertitude qui profite à ceux prêts à payer cher pour un accompagnement personnalisé. Les tarifs de ces coachs oscillent entre 270 et 670 euros, un luxe inaccessible pour de nombreuses familles. Une inégalité de plus dans un système déjà critiqué.

"Ce qui marche c'est l'entraide"

Basée à Metz, l’association La Relève refuse que l’orientation devienne un privilège. Son fondateur, Mehdi, le résume simplement : « Après 16 ans, on est souvent seuls face à ces choix décisifs, alors qu’on n’a pas toutes les cartes en main. » Pour pallier ce manque, l’association met en place des rencontres où des jeunes présentent leurs parcours, échangent leurs expériences et partagent des conseils concrets. L’objectif ? Démystifier l’enseignement supérieur et montrer que réussir ne se résume pas à un bon carnet d’adresses.

« Beaucoup de jeunes s’autocensurent parce qu’ils ne connaissent pas toutes les options qui s’offrent à eux. Nous, on est là pour leur ouvrir des portes », explique Mehdi. Un avis partagé par Jeanne, bénévole à La Relève : « Ce qui marche, c’est l’entraide. On se motive mutuellement, on déconstruit les idées reçues, et surtout, on prouve qu’il n’y a pas qu’une seule manière de réussir. »

Parcoursup : un système à refondre ?

L’opacité de Parcoursup laisse beaucoup trop de lycéens sur le carreau. En 2024, 85 000 candidats étaient encore sans affectation en fin de procédure, contre 77 000 l’année précédente. Un chiffre en hausse qui témoigne des limites du système.

Si des initiatives comme La Relève permettent de réduire certaines inégalités, elles ne sauraient se substituer à une réflexion plus profonde sur l’orientation en France. L’information doit devenir un droit, pas un luxe réservé à ceux qui peuvent se l’offrir.

Jules Boyard

 

  • Focus : La selection post-bac, vecteur d’inégalités

Comment la sélection post-bac accroît-elle les inégalités sociales dans l’enseignement ?

En 2014, les enfants d’ouvriers représentaient 11% des étudiants, selon le rapport d’Anne Brumer et Louis Maurin, directeurs des études de l’Observatoire des inégalités. Un chiffre qui peut paraître frappant au premier abord, mais qui témoigne de l’inégalité des chances existant dans la sélection post-bac. Cette différenciation est notamment le résultat d’une auto-censure des étudiants de milieux populaires, qui ont tendance à se sous-estimer par manque d’informations ou de confiance. Résultat : la plupart ne postulent même pas aux filières sélectives. Cette peur de l’échec peut être corrélée au manque de moyens financiers. Bien que les bourses contribuent à réduire les inégalités financières, les élèves issus de milieux populaires hésitent à engager des dépenses importances pour une carrière dont la réussite ne leur est pas promise.

Des inégalités qui se perpétuent…

Par ailleurs, les inégalités post-bac résultent également de la socialisation primaire de l’étudiant. D’une part, car les milieux ouvriers, généralement moins dotés en capital culturel – notion théorisée par Bourdieu – ont du mal à accompagner le parcours académique de leur enfant, ce qui joue un rôle important dans les lettres Parcoursup par exemple. D’autre part, la mise en place de rencontres auprès d’étudiants de CPGE dans les lycées réputés au détriment des lycées « classiques » renforce ces inégalités. C’est donc par tous ces éléments incorporés par l’individu de manière inconsciente au fil de sa socialisation qu’il existe une véritable inégalité des chances dans l’accès à l’enseignement.

Nathan Duvivier, étude sociologique des inégalités face à l’accès à l’enseignement

Vidéo

L'AFEV : quand la lutte contre les inégalités se joint à l'aide à l'orientation.

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