Le matériel médical peut être difficile d’accès, qu’il s’agisse de contraintes économiques, géographiques ou personnelles. Les personnes dans le besoin bénéficient d’aides de l’État ou des communes dans lesquelles elles résident. Cependant, l’isolement et les déserts médicaux semblent représenter une frontière immense face à l’accessibilité. Libel’Up, jeune entreprise lilloise, accompagne les particuliers jusqu’au domicile pour pallier la nécessité et l’incapacité à se procurer ce matériel.
Si le solde naturel de la population française est au plus bas depuis 1945 et si l’espérance de vie a augmenté de 1,1% par rapport à 2023, la France voit sa population vieillir de plus en plus (selon le rapport de l’INSEE de 2024). Et si la population vieillit, c’est un signe alarmant pour les hôpitaux, EHPAD et SSIAD (Services de soins infirmiers à domicile) qui pourraient ne plus parvenir à satisfaire la demande en matériel médical. Une inquiétude que partage une médecin généraliste qui travaille en zone rurale dans un désert médical. Pour elle, une pénurie de matériel n’est pas anormal…
« Certains patients refusent du matériel parce qu’ils ne veulent pas devenir dépendants »
Une généraliste et titulaire d’une thèse sur les relations entre les généralistes et les gériatres explique.
Ayant travaillé en ville et en campagne, elle ne témoigne pas de patients dont les moyens financiers seraient le frein principal au non recours au matériel médical. Ce ne sont pas les aides qui manquent. Entre APA (Allocation personnalisée d’autonomie) pour les personnes âgées dépendantes, CSS (Complémentaire santé solidaire) pour les situations financières précaires, AMU (Aide médicale d’urgence) pour les situations irrégulières, MDPH (Maison départementale des personnes handicapées), et elle en passe… La généraliste soutient aussi que « la sécurité sociale recherche les personnes 100% dépendantes pour les prendre en charge ».
Ce qui engendre alors le plus souvent un manque de matériel pour les particuliers selon elle, ce sont les « pénuries de médicaments », le refus de « devenir dépendants » ou encore le fait d’être complètement isolés.
Libel’Up : la solution parfaite ?
Ce que propose l’organisation Libel’Up, c’est d’abord une solution écologique car ils « lutte[nt] contre le gaspillage du matériel médical » et le reconditionnement limite la production de CO2. C’est aussi une solution économique puisqu’ils veulent « offrir le bon équipement aux personnes renonçant à l’achat d’une aide technique faute de moyen ». Mais si la généraliste affirme qu’il « ne s’agit pas simplement d’un frein financier », Libel’Up promet une accessibilité du matériel à ses clients bien que le siège se situe à Armentières. Espace Santé, un des lieux de collecte du matériel médical dans le sud de Lille explique que le transfert du matériel « peut avoir lieu grâce aux associations, services et centres dans tout Lille ».
Alors que Libel’Up se démène pour offrir un accès total aux citadins des Hauts-de-France, quid des contadins ? Ces services dépendent du bon vouloir des métropoles et des communes. Dans les déserts médicaux et « pour les personnes complètement isolées ça reste problématique » expose la généraliste.
La communauté de communes dans laquelle l’interlocutrice travaille a mis en œuvre un « système de transport à la demande intégralement pris en charge pour parvenir à combler les difficultés à se déplacer des personnes dans le besoin ». Mais le système demeure temporaire. En attendant, il faut compter sur les proches ou les initiatives locales pour offrir leur aide à ceux qui en ont le plus besoin…
Zélie Bleton-Pascal
Crédit photo : Ma Laé Ferré et Libel Up
ZOOM: Prendre part au réemploi du matériel médical
Face au gaspillage et aux besoins croissants de nombreuses personnes en situation de précarité, la nécessité du réemploi du matériel médical se fait sentir. Plusieurs initiatives encouragent à contribuer à cette démarche solidaire et écologique. Dans les Hauts-de-France, le pôle Eurasanté a mis en place le projet Libel’Up. Il vise à collecter, reconditionner et redistribuer les aides médicales usagées, en panne ou non utilisées grâce aux dons de particuliers ou établissements médico-sociaux.
Cette initiative de reconditionnement du matériel médical permet aux citoyens de déposer leurs dons dans de nombreux points de collectes. Afin de faciliter le processus, il est même possible de faire une demande de collecte à domicile. D’autres organisations, comme Envie Autonomie, proposent aussi des solutions de récupération et de redistribution du matériel médical partout en France.
Parallèlement, certaines structures recherchent des bénévoles pour collecter, nettoyer, réparer ou redistribuer le matériel. C’est le cas d’Envie Autonomie, activité du réseau Envie : pionnier de l’économie circulaire. Cette filière nationale permet, sous le même format que Libel’Up, à des volontaires de s’investir directement dans la revalorisation des équipements. Dans la région, les sept magasins situés à Lomme, Tourcoing, Raismes, Amiens, Hénin-Beaumont, Saint-Quentin et Pierrefitte-sur-Seine proposent de rejoindre leurs structures locales, engagées dans l’économie circulaire du matériel médical.
En participant à ces démarches, le rôle actif de chacun permet la réduction du gaspillage et l’amélioration de l’accès aux soins pour tous. En alliant solidarité et engagement écologique, ces actions concrètes et accessibles réduisent le coût du matériel médical et créent de l’emploi.
Victoire Aubert
Zoom sur : L’Allemagne, pionnière dans le recyclage du matériel médical
« Reprocessing centers », réparation ou encore location d’outils médicaux, face à l’essor de nombreuses initiatives de réutilisation du matériel médical outre-Rhin, la France pourrait s’inspirer de ces techniques révolutionnaires pour transformer son système de santé.
Vidéo de Timoté Rivet
