La solitude, sentiment prégnant d’une jeunesse ultra-connectée
À l’ère du numérique, les jeunes, à qui l’on reproche d’être trop connectés ou de passer trop de temps sur leurs téléphones, sont-ils vraiment aussi entourés qu’on le croit ? En effet, si internet et les réseaux sociaux sont de puissants outils de communication, ils ne semblent pas suffire à prévenir des risques de la solitude, surtout en cette période de confinement.
Internet est omniprésent. Les réseaux sociaux ont envahi le quotidien. Ils sont devenus une part importante de la vie des jeunes. Les chiffres illustrent parfaitement ce phénomène. Selon une étude de 2019 du JDN, 81 % des 16-25 ans ont un compte Instagram. 44 % des jeunes ont déclaré ne pas pouvoir se séparer des réseaux. Pourtant, la solitude a réussi à se glisser, à se répandre chez cette jeunesse ultra-connectée. Ainsi, selon le psychologue Djelloul Belbachir, invité de la matinale de RMC en janvier 2020 : « C’est chez les 15-30 ans que le sentiment [de solitude] est le plus fort, le plus violent. »
L'adolescence, une étape difficile
La solitude trouve différentes sources. Elle peut être liée à un déménagement, des problèmes familiaux, une pression scolaire… Sabine Chatroussat, psychologue, précise : « La solitude ne vient pas forcément de la quantité de notre réseau relationnel, mais de sa qualité. » Pour elle, elle fait partie intégrante de l’expérience adolescente. Cela s’explique par le fait que c’est une période difficile à passer. En effet, l’adolescence marque la transition du monde de l’enfance au monde adulte. À cette période, l’adolescent doit affronter de nombreux bouleversements physiques ou encore sexuels, ce qui entraîne une sensation d’insécurité, une perte d’estime de soi dans certains cas. Selon Sabine, « la solitude ce n’est pas forcement être seul, c’est aussi se sentir seul ». D’ailleurs, le sentiment de solitude n’est pas toujours là, à planer au-dessus de nos têtes. Il peut aussi bien être ponctuel que chronique. Pour Chloé, une étudiante de 19 ans, il s’agit d’un moyen de protection : « Pour éviter d’être blessée par des émotions fortes, je crée une bulle autour de moi. Dans ces moments-là, je me retrouve seule. » Selon Inès, sa solitude à elle provient plutôt d’un sentiment d’incompréhension : « Lorsque j’observe le monde qui m’entoure, j’ai l’impression de ne pas être normale, pareille qu’eux… Des fois je m’en fous complètement mais par moments, ça me fait me sentir seule, incomprise. » En bref, le sentiment de solitude varie selon les individus.
“La solitude ce n’est pas forcément être seul, c’est aussi se sentir seul”
Pourtant, selon une étude de chercheurs de Darmouth, elle proviendrait d’une petite zone du cortex préfrontal médian, associée au « concept de soi ». Cette étude a démontré que lorsque l’on pense à soi-même, une certaine zone s’active. Cette même zone s’activera lorsque l’on pense à des amis. Cette activité entraîne une sorte de « constellation » qui établit des connexions. Chez les personnes se sentant seules, cette constellation diffère, entraînant une certaine déconnexion. C’est de là que proviendrait le sentiment de solitude.
Pour en sortir, chacun ses méthodes. On peut par exemple se plonger dans un autre monde, comme celui du dessin, des jeux vidéo. Pour Chloé, ce sera celui de la musique. En effet, elle confie : « Quand je m’ennuie, je joue du piano de longues heures ». Avoir un animal de compagnie est aussi une solution puisqu’il demande de l’attention affective, de s’en occuper un minimum. Mais un animal cela nécessite de la place, ce que tout le monde n’a pas. Inès, qui a déménagé sur Lyon pour faire ses études, a une autre solution : « Quand je me sens seule, je regarde des photos, de mes potes, de ma famille. Ça me rappelle de bons souvenirs et après ça va mieux.
“Il existe un ministre de la solitude au Royaume-Uni, alors pourquoi pas en France ?”
Quant à Sabine, elle préconise de faire plus de prévention, de former le corps enseignant à aider leurs élèves, de mettre plus de budget dans la lutte contre l’isolement scolaire et surtout d’être à l’écoute. « Il existe un ministre de la solitude au Royaume-Uni, pourquoi pas en France ? »
Mais être seul, c’est bien aussi. C’est même normal dans une certaine mesure. Un bon moyen pour vaincre la solitude c’est aussi d’apprendre à vivre avec elle. Apprendre à aimer passer du temps avec soi-même, pour soi-même.
Elisa Lenglart Leconte et Léa Galasse
IL EXISTE DES NUMEROS GRATUITS LORSQU’ON SE SENT SEUL, QU’ON EST EN DEPRESSION
- SOS Dépression : 01.40.47.95.95 ( ouvert 24h/24)
- Fil Santé Jeune : 08.00.85.85.5
ZOOM
La solitude et ses effroyables conséquences sur la jeunesse
Vous avez déjà entendu ou vous allez entendre au moins un jour dans votre vie (si tant est que vous en vouliez) votre enfant vous dire “Maman, Papa je suis tout seul à l’école, je n’ai pas d’amis.” Cette phrase pousse généralement les parents à s’inquiéter. Cette angoisse est tout à fait légitime au vu des conséquences potentiellement terribles de la solitude.
En effet, on entend beaucoup parler de la solitude chez les personnes âgées mais beaucoup moins de celle qui touche les jeunes, et notamment les jeunes adultes et adolescents. Or, selon une étude de la Fondation de France réalisée en 2017 sur ce sujet 6% des jeunes entre 15 et 30 ans seraient en situation d’isolement, de solitude extrême. Numériquement, ce chiffre représente environ 700 000 jeunes. Selon la même étude, environ 1,4 million de jeunes auraient un réseau relationnel faible. Mais alors, quels sont les risques potentiels de cette solitude ?
La dépression, risque majeur de la solitude
Pour le psychologue Vincent Lapierre (interrogé sur le sujet le 23 octobre 2018 dans l’émission Le Journal de La Santé sur France 5) le premier danger “est la dépression“. En effet, la Fondation de France a observé une hausse du taux de dépression de 7 points chez les jeunes isolés par rapport aux autres jeunes de leur âge. Les enfants sont seuls et pensent que c’est de leur faute, ils s’enferment alors dans une spirale négative auto-flagellante qui renforce cet isolement.
La dépression peut malheureusement dégénérer, s’allier à des addictions notamment en matière de drogues et d’alcools, et parfois dans le pire des cas s’accompagner d’idées suicidaires. Heureusement la Fondation de France montre que ces dérives liées à la dépression sont en baisse, ce qui laisse de l’espoir !
Zachary Manceau
VIDEO
Discord et internet pour lutter contre l'isolement
Vidéo réalisée par Tamara Courtay