Les coopératives bio s’organisent face à la demande croissante
L’agriculture biologique est en pleine expansion en France. Le système coopératif se veut comme l’un des fers-de-lance de la quasi-industrialisation des produits bios.
Dans les Hauts-de-France comme partout sur le territoire, le bio est en pleine explosion. Parmi les principaux acteurs de la région, certaines coopératives présentent un chiffre d’affaires impressionnant, comme Norabio et ses 20 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019. Le secteur croît sans cesse et semble en bonne voie d’industrialisation. De là à remplacer l’agriculture conventionnelle ? “L’idée n’est pas de confronter les modèles“, déclare Alexandre, cogérant de Vert’ige côté production. “C’est de garantir au modèle bio une réelle place sur le marché, sans reproduire les erreurs de l’agriculture intensive“.
200 000 personnes et représente 8% de la surface agricole de l'hexagone.
Le bio en explosion dans les Hauts-de-France
Il faut dire que dans les Hauts-de-France, les chiffres du bio sont impressionnants. Fin 2019, plus de 45 000 hectares de surface agricole étaient dédiés à ce type de culture, ce qui correspond à plus de treize fois la superficie de la ville de Lille. Selon l’association Bio en Hauts-de-France, la partie production de la filière générerait quant à elle 6 500 emplois. Autant dire que le bio est en bonne voie pour occuper une place déterminante dans l’environnement agricole de la région. La demande en constante évolution, ne devrait qu’accentuer le phénomène. A Philippe Henry, président de L’Agence Bio, d’expliquer cette montée en puissance : “[Le succès du bio] ne doit rien au hasard. Il est le fruit de l’engouement et du soutien des consommateurs d’une part, de la mobilisation et de la structuration de tous les acteurs de la filière bio d’autre part.”
Le secteur se structure, la coopérative se fraye un chemin
Alexandre est producteur à Wavrin, à une dizaine de kilomètres de Lille. Il cogère la société Vert’Tige, une ferme biologique qu’il a rejointe dans les années 80 et où il s’occupe de la production agricole. En parallèle, il est actif dans la coopérative Norabio, l’une des plus importantes du Nord en terme d’agriculture biologique.
Avec un fonctionnement plutôt démocratique, où la voix de chaque producteur pèse à égalité, la coopérative se présente à ses yeux comme une manière de faire peser la voix des producteurs bio dans les négociations commerciales. “Cela permet de maintenir les prix, d’avoir une vraie force de négociation. C’est un outil pour maximiser nos revenus en fait. Aujourd’hui on a des fermes de 200 hectares, d’autres beaucoup plus petites, avec des enjeux économiques différents. Le but c’est aussi de continuer à faire vivre ces différentes typologies de fermes. On a un tas de mesures économiques qui permettent aux producteurs de différentes tailles de s’entendre, en finançant des projets d’installation ou en rémunérant mieux les petites productions.”
A l’avenir, l’enjeu pour les professionnels du secteur va être de maintenir une réelle diversité de fermes, en terme de taille et de production, tout en travaillant sur des volumes de grande ampleur. Les coopératives biologiques pourraient en tout cas représenter une vraie solution afin de pallier efficacement les difficultés du secteur agricole conventionnel.
Quentin Saison
Edito : Le bio, une question de temps.
Le bio “coûte trop cher”, le bio “est une arnaque”, “le bio est un effet de mode réservé aux bobos”. Le bio, c’est surtout la cible des railleries de ceux qui ne prennent pas le temps.
“Le prix moyen en bio est 75% plus élevé qu’en conventionnel selon une étude“, pouvait-on lire comme titre de Sud-Ouest le 7 mai dernier. L’étude en question réalisée par Linéaire ne concernait pourtant que les produits bio vendus en supermarchés et hypermarchés. Il va sans dire que ces infrastructures ne représentent pas les valeurs du bio. D’un point de vue symbolique donc, mais aussi dans les faits.
Le bio, c’est une démarche, c’est prendre le temps de bien faire les choses. En mangeant bio, on accepte de prendre plus de temps pour notre alimentation, mais ce n’est pas une perte de temps, loin de là. On peut adapter notre mode de vie pour le meilleur : aller au marché le dimanche matin, rencontrer et soutenir le producteur qui vient vendre ses produits frais et locaux. Et cela a un prix similaire à celui proposé en grande surface*. Les produits eux seront souvent meilleurs en goût, meilleurs pour la santé, et pour l’environnement.
Alors oui, ça ne sera pas des courses de dix minutes après le travail. Il faudra prendre de son temps. Se lever un dimanche matin et se rendre au marché. Mais l’ambiance y est tout autre, faire les courses devient une sortie plutôt qu’une corvée. Le bio, c’est une discipline dans laquelle on est récompensé du temps qu’on lui consacre.
Angellina Thieblemont
*Les produits évoqués sont des produits bruts (légumes, fruits, farine…). Le coût des produits transformés est autrement plus important, tout comme dans l’agriculture conventionnelle. Dans un axe de réflexion similaire, on peut prendre le temps de transformer les produits soi-même à partir de produits bruts.