Mon enfant, ma bataille : quand les pères demandent la garde
Autorité parentale, garde alternée et exclusive, droit de visite. Face à la justice, les droits des pères sont relégués à la faveur de ceux de la mère. En France, des associations cherchent à venir en aide à ces pères abandonnés mais leurs recours restent encore limités.
Dans sa chanson de 1980, Mon fils, ma bataille, Daniel Balavoine chante l’histoire d’un père qui se bat pour la garde de son enfant. 40 années se sont écoulées et malgré quelques avancées en faveur des droits des pères, comme le rallongement récent du congé paternité de 11 à 28 jours, cette chanson reste plus que jamais d’actualité.
Une décision « stéréotypée »
La notion majeure débattue devant la justice lors des séparations avec enfants est la question de la garde. Juridiquement il existe deux types de gardes : l’exclusive et l’alternée. Le type de garde est instauré à l’amiable lorsque les parents sont d’accord. Cependant, dans la majorité des cas, c’est au juge aux affaires familiales que revient la décision et cette dernière, souvent stéréotypée, se solde en garde exclusive pour la mère. Théoriquement les juges font du « cas par cas » pour rendre leur décision, mais « les chiffres démontrent qu’il n’y a en fait que deux cas : la mère est d’accord avec le type de garde ou ne l’est pas ». Même si la décision finale est contestable, elle engendre alors une bataille judiciaire entre les parents dont le père sort majoritairement perdant.
40%
Des enfants voient rarement leur père suite à un divorce
20%
Des enfants ne voient plus leur père suite à un divorce
"Contre les discriminations, contre l'ignorance dont nous sommes victimes"
C’est à ce stade, et parfois même avant, qu’interviennent les associations qui viennent en aide aux pères divorcés ou en situation de séparation. Président bénévole de SOS Papa, la plus influente association de pères en France et en Europe, Jean Lazeau se bat « pour la résidence alternée, pour la co-parentalité, contre les discriminations, contre l’ignorance dont nous sommes victimes ». Pour lui, il s’agit d’un « mécanisme général de discrimination du père » qui n’est pas la seule victime : « Les enfants et tout l’entourage paternel, dont de nombreuses femmes, en souffrent fortement. » Son association offre donc un soutien psychologique et juridique aux pères qui se déroule en deux étapes. Tout d’abord le père assiste à une étude en groupe bénévole au cours de laquelle chacun expose sa situation et profite de l’expérience d’autres pères. Puis, en adhérant à l’association, le père est reçu seul par un avocat bénévole pour approfondir le problème juridique et les stratégies à adopter. Pour les non-adhérents, l’association dispose d’avocats conseillant gratuitement dans leurs permanences. Jean Lazeau a aussi rédigé avec des avocats des propositions de nouvelles lois plus égalitaires et au bénéfice de l’enfant qu’il prône avec l’aide d’autres associations à travers des pétitions et des témoignages. Cette association ainsi que d’autres ont réussi de cette manière à rallier des parlementaires à leur cause et peuvent être « présents » lors des débats parlementaires.
1350 suicides parentaux par an
Cette situation peut avoir de lourdes conséquences, un cas de séparation sur 130 mène à un suicide parental. A raison de 175000 séparations avec enfants mineurs chaque année, il y a donc 1350 suicides parentaux par an dont 1000 de pères. La gravité de cette situation est rarement mesurée et les nombreux faits divers relatifs à cette lutte sont rapidement oubliés. Jean Lazeau regrette cette situation qui est « déplorée par une grande majorité de femmes qu’on n’entend bien sûr jamais ». En effet, la voix des hommes et des femmes qui luttent pour les droits des pères n’est pas entendue car leur combat est trop souvent minimisé.
– Lalie Bourgeois
Témoignage de Jérôme pour qui tout n'est pas négatif
L’enfant, une source d’argent
Un divorce apporte aussi une problématique économique. Comment se partager les biens ? Comment les dettes sont-elles reparties ? Et bien d’autres questions demeurent.
L’enfant est alors lui aussi une source d’argent. Même en cas de garde alternée, il peut y avoir pension alimentaire s’il y a un écart de revenu entre le père et la mère. Dans les divorces à l’amiable ce sont les ex-époux qui fixent le montant mais en cas de désaccord le juge devra en décider. De plus, un enfant est une aussi une source d’aides de l’État pour le parent qui en aura la garde.
Il est impossible de se placer en tant que juge. Néanmoins le fait de donner le plus souvent la garde de l’enfant à la mère (dans 80% des cas) n’est-il pas aussi révélateur de la différence économique entre les hommes et les femmes ? Ou cela est-il plutôt sociologique et il réside dans une vision de la femme comme une bonne mère ?
98%
Des personnes au foyer sont des femmes
18,5%
C’est la différence de salaire entre un homme et une femme
Mais pour des raisons économiques même si l’enfant rapporterait de l’argent à la mère, celle-ci préférerait sans doute avoir une égalité de revenus avec les hommes. De plus, le temps passé à l’éducation des enfants ne serait-il pas plus rentable en travaillant ? Le calcul est même plutôt négatif pour la mère qui ne touche d’argent pour elle-même mais pour son fils.
– Julien Carpentier