Petit sac de course en coton présenté comme une alternative aux sacs plastiques, le tote bag est devenu un accessoire de communication que s’arrachent les professionnels du marketing. Rencontre avec Alice de Zero Waste Lille et Annick Jehanne de Fashion Green Hub.
Sac fourre-tout, simple, pratique et surtout éthique, le tote bag a bonne presse. Apparu dans les années 70 comme le sac de course « zéro déchet”, ce sac en coton réutilisable est aux antipodes de son cousin en plastique. À la mode, un nombre incalculable de tote bags défile dans les rues puis remplissent nos placards. Porté sur l’épaule et visible de tous, ce sac est régulièrement orné de slogans ou de dessins témoignant le désir d’un monde plus vert. Le potentiel marketing du tote bag est alors indéniable. Alice, présidente de l’antenne lilloise de l’association zéro déchet Zéro Waste France et Annick Jehanne, cofondatrice et coprésidente de l’association d’entreprises désirant une mode plus écologique Fashion Green Hub, se sont penchées sur le “phénomène tote bag” passant de l’idée d’un objet écolo vers l’idée d’un objet de com’.
Pris d'assaut
À l’instar du panier en osier sur les plages, le tote bag s’est fait une place de choix dans le quotidien des Français. Cela s’explique par ses prix de production et de vente relativement bas, sa qualité, et son côté écolo.
Pratique, écologique et économique, le tote bag a peu à peu suscité l’intérêt des industriels. Le petit sac en coton s’est alors métamorphosé en un objet de communication véhiculant l’image des marques qui le produisent. La réputation d’objet éthique du tote bag permet effectivement aux marques de transmettre des valeurs et des idées tout en installant un sentiment d’appartenance dans l’esprit des consommateurs : on parle de fidélisation du client. Puis, de fils en aiguille, le tote bag est devenu un goodies de référence offert à la fin des séminaires mais aussi des expositions. Les écoles et universités ont aussi été séduites par le petit sac en coton qui, au même titre que les pulls à l’effigie des établissements, offre aux étudiants un sentiment d’appartenance à une promotion.
Nombre de tote bags en circulation viennent du Bangladesh.
De ce fort engouement découle une surconsommation puis une surproduction qui, selon Annick Jehanne, mettent en péril l’idée d’un tote bag 100% éco-responsable : “Nombre de tote bags en circulation viennent du Bangladesh. Ils ne coûtent que quelques centimes à produire et on les traite alors de la même façon que les sacs plastiques. C’est là qu’est le problème.” En effet produire au Bangladesh dit “usine textile du monde” est un sérieux avantage pour jouer la carte des prix les plus bas et faciliter l’achat de tote bags. La main d’œuvre est peu chère (un ouvrier bangladais toucherait en moyenne 83€ par mois) et les matières premières sont moins coûteuses que le coton : utilisation fréquente du polyester qui empêche le recyclage. De cette manière, la sur-production semble faire basculer le tote bag zero déchet à la limite du sac polluant.
Produire éthique
Pour éviter le phénomène de surproduction émanant des tote bags, il suffit de « ne pas en faire la collection » souligne Alice de Zero Waste Lille. En effet, face à la demande grandissante de tote bags par les consommateurs, leur production s’accroît. Seulement, un sac en coton traditionnel doit être réutilisé au minimum 7100 fois pour être écologiquement amorti. Un chiffre conséquent que tend à rendre atteignable l’équipe de Zero Waste Lille avec des initiatives comme « Rien de Neuf » dont l’objectif est tout simplement de « préserver les ressources de notre planète en essayant d’acheter le moins d’objets neufs possible ». De son côté, Annick Jehanne de Fashion Green Hub précise que s’il faut « cesser la surconsommation » de ces sacs pour éviter une « hyperproduction », leur simple production n’est pas un crime. Pour les 250 entreprises de textiles adhérant à Fashion Green Hub, le recyclage et la production locale semblent être les clefs d’une production éthique du textile et des totes bags. Cependant, bien que le système de production proposé et initié par Fashion Green Hub soit une aubaine pour l’idée d’un sac et plus largement d’un textile éco-responsable, le coût d’achat reste élevé pour le consommateur. Mais le tote bag écolo-éthico-marketing semble possible, puisque l’association coprésidée par Annick Jehanne prévoit de produire ses propres tote bags 100% made in Hauts-de-France.
Morgane Burlotto
Crédits photos : Sandra Bouillard
7100
7100, c’est le nombre de fois où notre tote bag doit être réutilisé pour jouir de ses compétences écologiques selon un rapport publié en février 2018 par l’Agence danoise de protection de l’environnement. Oui, malgré son apparence d’alternative idéale au sac plastiques à usage unique, le tote bag a en fait une empreinte écologique plus importante que que l’on pourrait l’imaginer.
Pour comprendre ce phénomène, il est intéressant de s’attarder sur la façon dont la plupart de ces petits sacs sont fabriqués : sans surprise c’est avec le coton. Le coton a en effet beaucoup d’avantages en tant que matériau recyclable. Il est d’ailleurs aussi bien utilisé dans la grande distribution que dans les maisons de haute couture. Oui, mais cependant, il fait partie des fibres textiles naturelles très gourmandes en eau. En effet, selon les techniques, pour produire 1kg de coton il faut entre 5400 et 19000 L d’eau. À cela, il faut préciser que le coton bio nécessite pour la même quantité produite, 30% d’eau supplémentaire en moyenne qu’un coton traditionnel.
Mais alors quel lien avec les tote bags ? Bien, il faut savoir que la plupart des tote bags sont fabriqués en coton bio ce qui explique l’importance de leur impact écologique. Mais ce n’est pas tout, il faut aussi additionner à la facture écologique, le rapatriement des matières premières qui est très polluant, mais aussi tout le phénomène du downcycling ou sous-recyclage que subit l’industrie textile en France.
Clara Scielle
Tuto, faire son tote bag maison
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