Une lutte quotidienne contre l’abandon des animaux
Depuis des décennies en France, la maltraitance animale et plus particulièrement l’abandon montent en flèche. Face à ce phénomène grave, il existe diverses initiatives dans l’optique de sauver les animaux, notamment l’encadrement renforcé du processus d’adoption et la stérilisation.
Tintin, Loulou ou encore Pépère : les Français regorgent d’imagination pour renommer leurs animaux de compagnie. Ces surnoms affectueux témoignent d’un lien puissant entre les êtres humains et leur petite boule de poils. Pourtant, les propriétaires de ces anti-dépresseurs sur pattes ne sont pas toujours tendres avec eux. Les chiffres liés à l’abandon des animaux sont affligeants. Selon la Société Protectrice des Animaux (SPA), près de 100 000 chiens et chats sont abandonnés chaque année en France et les refuges sont saturés. C’est pourquoi les initiatives se multiplient pour tenter de contrer ce fléau.
L’adoption, comment "chat" marche ?
À première vue, l’adoption dégage quelque chose de positif. Pourtant, il s’agit de l’une des premières causes de l’abandon des animaux aujourd’hui. En effet, nombreux sont les chats ou les chiens qui sont victimes d’adoptions compulsives. Cela signifie que les adoptants prennent en charge un être vivant sans être capable d’en assumer la responsabilité par la suite. « Ce n’est pas un jouet. Il est nécessaire de faire en sorte que la personne comprenne que l’animal est un être vivant qui implique énormément de choses », souligne Delphine Cichocki, présidente de l’association Anima’Dopt 62. Un phénomène qui a poussé députés et sénateurs à se mettre d’accord sur plusieurs mesures attendues. Ainsi, la vente en ligne d’animaux de compagnie est désormais restreinte et leur vente en animalerie devrait être interdite d’ici 2024. Des décisions motivées par « le sevrage trop précoce des chiots et des chats » ainsi qu’une « mauvaise socialisation de ces animaux » vendus en ces lieux.
De ce fait, refuges et éleveurs se mobilisent pour encadrer au mieux l’adoption des animaux. C’est pourquoi la plupart d’entre eux travaillent avec des familles d’accueil. Ce processus permet dans un premier temps d’observer l’animal pour s’assurer qu’il est en bonne santé. Dans un second temps, cela aide à s’assurer que la bête puisse disposer d’un environnement qui lui convient. Delphine Cichocki explique que « cette démarche permet de connaître les caractéristiques de l’animal par cœur pour qu’il trouve le meilleur adoptant qui soit ». En général, des nouvelles de l’animal sont même demandées jusqu’à la fin de sa vie. La phase post-adoption est donc tout aussi importante que celle de la pré-adoption.
« La stérilisation évite la prolifération »
Outre l’adoption compulsive, le manque de moyens financiers peut aussi expliquer l’augmentation constante du nombre d’abandons. « Les personnes âgées qui ont une petite retraite ne peuvent pas forcément payer les soins de leurs bêtes », constate Ginette Allart, présidente d’Adeo Animalis. Son association a mis en place une boutique associative et solidaire qui permet de récolter des fonds afin d’aider les gens en situation de précarité. « On paye une partie ou tous les soins et on a quand même entre 15 et 20 demandes par jour », rend compte Ginette Allart.
Par ailleurs, les campagnes de stérilisation des chats se multiplient dans toutes les grandes villes de France. « La stérilisation évite la prolifération. C’est essentiel pour éviter qu’ils attrapent des maladies, la durée de vie moyenne d’un chat errant est de seulement 5 ans », renseigne-t-elle.
Enfin, le manque de sensibilisation paraît problématique. Selon Delphine Cichocki, le constat est clair : « On ne sensibilise pas assez. Il faut inculquer aux gens le bénéfice de la stérilisation parce qu’aujourd’hui, si on a des associations pour la protection animale, c’est en grosse partie à cause de l’irresponsabilité des propriétaires d’animaux qui ne stérilisent pas. Et vis-à-vis des enfants, il faut leur expliquer le respect d’un être vivant, que ce soit un chat, un chien, une vache ou un petit escargot », fait-elle comprendre.
Hugo Saez
3 questions à Mélanie Godineau, vétérinaire en Ile-de-France
Vétérinaire en cabinet, Mélanie Godineau évoque les conséquences du confinement sur les abandons d’animaux et leur adaptation à un nouvel environnement. En fonction du contexte, les conséquences de l’abandon peuvent être plus ou moins perceptibles.
Est-ce que le confinement a augmenté la pratique d’abandon d’animaux ?
Les vétos en ville sont moins confrontés à l’abandon, nous voyons plutôt les gens qui récupèrent les animaux. Effectivement, nous avons pu observer qu’avec le confinement il y a eu une augmentation importante du nombre d’acquisitions d’animaux. Pas spécialement dans les associations, même si ça a pu arriver. Malheureusement on a aussi constaté une augmentation drastique du nombre d’abandons cet été.
A quel moment intervenez-vous dans le processus de récupération des animaux ?
Quand les gens les récupèrent, les animaux ont déjà passé un temps plus ou moins long en association. Ça dépend dans quel contexte ils ont été abandonnés : si il y a eu de la maltraitance, si ce sont des jeunes animaux ont-ils eu ce dont ils ont besoin au niveau psychique pour avoir un bon développement, est-ce qu’ils se sont adaptés à leur environnement. Ce sont ces facteurs qui vont modifier le comportement de l’animal.
Ce que l’on observe souvent chez des animaux abandonnés c’est le désir de rattachement, des animaux qui vont avoir du mal à se détacher si on ne fait pas bien le travail du nouveau propriétaire.
Est-ce difficile mentalement pour un animal de s’adapter à une nouvelle vie ?
Si l’animal est bien dans sa tête, non. Le chien va être content que l’on s’occupe de lui. Cela dépend du contexte, si c’est un jeune animal abandonné qui n’est pas resté longtemps en « transit » avec un milieu de vie correct avant, ça va bien se passer. C’est vraiment important de savoir ce qu’il s’est passé avant, combien de temps l’animal est resté en association. Mais la plupart du temps, l’intégration se fait plutôt bien, même sur des chiens adultes.