StadiumGO contribue à un football plus écologique
Créée en 2019 par Romain Lauvergnat, StadiumGo est une application permettant aux supporters de faire des covoiturages pour se rendre au stade. Alors que l’impact environnemental du football et la responsabilité des clubs professionnels sont de plus en plus dénoncés, la démarche dans laquelle elle s’inscrit est inédite en France.
Romain Lauvergnat est un homme pressé. Il faut s’accrocher pour espérer lui prendre quelques minutes de son temps afin d’évoquer son application. Entre réunions et divers déplacements, le fondateur de StadiumGO a fini par nous répondre. Drôle de coïncidence ! « Je suis un passionné de foot et j’ai commencé le covoiturage il y a bien longtemps. Je l’ai débuté il y a quelques années par souci d’économie. La dimension écologique est arrivée dans un second temps », explique Lauvergnat en préambule.
Pour l’instant, l’application ne propose que des trajets pour des matchs de football des quatre premières divisions masculines et des deux premières divisions féminines françaises. Mais, à travers StadiumGo, on trouve les valeurs et les engagements personnels du fondateur. « Je suis convaincu que si chacun fait un petit peu, on pourra faire beaucoup ensemble. J’essaie personnellement d’avoir au quotidien des réflexes plus écoresponsables. C’est notamment pour agir sur l’empreinte carbone du sport que l’on a créé StadiumGO. »
Un impact écologique accablant
Alors que Romain Lauvergnat nous rappelle que, « le football, c’est 35 000 tonnes de CO2 fabriqués chaque saison par les supporters des seuls clubs de Ligue 1 et Ligue 2 pour aller au stade », il sait que ce n’est pas son application qui permettra à elle seule de casser la dynamique actuelle du football français en matière d’écologie.
En effet, Le football est très impactant sur l’environnement. Les polémiques ne manquent pas autour de certains grands clubs et de leurs actions aux conséquences environnementales non négligeable. En France, le PSG et l’Olympique Lyonnais ont, par exemple, récemment effectué de courts trajets en avion plutôt qu’en train pour disputer un match. « Ces cas disent beaucoup de la société dans son ensemble », explique Aurélien François, spécialiste de la responsabilité sociale et environnementale des clubs de football. « Le football ne rend pas toujours soluble la question du développement durable. Mais comment avoir une volonté de développement durable pour des clubs sportifs au mode de fonctionnement par essence court-termiste ? », interroge le professeur à l’Université de Rouen.
L’objectif annuel des clubs est en effet très simple : remporter des titres pour certains ou éviter la relégation pour d’autres. Les enjeux sportifs et économiques passent donc bien avant les enjeux environnementaux dans les clubs.
Le début d’une prise de conscience …
Ainsi, la relation privilégiée qu’a créé Romain Lauvergnat avec des clubs de première division, comme l’Olympique de Marseille ou l’OGC Nice, montre bien un éveil écologique de leur part. De plus, le partenariat qui lie son application et la Ligue de Football Professionnel (LFP) s’inscrit dans cette voie. À son échelle, StadiumGO poussent les clubs à se responsabiliser davantage en termes d’environnement. « StadiumGO est une très bonne initiative, mais je serais curieux de savoir combien n’ont pas accès à ce service en raison de leur lieu d’habitation par rapport au stade. Cependant, en plus de la démarche écologique, cela créé du lien social entre les gens », rétorque Aurélien François.
De son côté, la LFP tente de sensibiliser au développement durable les différents acteurs du milieu : clubs, joueurs actuels et de demain, supporters. Elle a signé en avril 2020, un partenariat avec WWF France qui vise à accompagner les clubs dans la réduction de leur empreinte environnementale. En parallèle, dans son rapport « Jouons là collectif » pour la saison 2020/2021, la Ligue souligne que 100 % des clubs professionnels ont mis en place le tri des déchets dans leurs infrastructures ou ont prévu de le faire.
… mais le chemin est encore long
La responsabilité sociale des clubs de football est elle aussi mise en jeu. L’enjeu est de savoir si ces derniers se doivent de montrer l’exemple et donc de facto d’être irréprochables sur leur empreinte écologique. « Le champ de la responsabilité sociale du développement durable est plein de paradoxes. La FIFA est capable de donner beaucoup d’argent à une Fondation pour promouvoir le football sur tous les continents et à côté de ça vous avez une Coupe du Monde décriée pour la construction de ses stades et qui sera une gabegie écologique », conclut Aurélien François
Les enjeux sont colossaux et les arbitrages entre enjeux sportifs, économiques et écologiques sont difficiles à effectuer pour les clubs professionnels. De son côté, StadiumGO tente d’y faire face. Son rôle de précurseur pourrait bien s’avérer décisif dans la véritable transition écologique des clubs de football, si elle venait à se produire.
Thomas PalmierUn petit pont en avant, un grand pont en arrière
Stadium GO et les motivations de son fondateur semblent être l’arbre qui cache la forêt d’ignominies écologiques et humaines soulevées par la tenue de la Coupe du monde de football au Qatar, en 2022.
En février dernier, The Guardian a révélé que plus de 6 500 travailleurs immigrés avaient trouvé la mort dans les chantiers qataris depuis que le pays a été désigné comme hôte. Si le gouvernement local nie ce chiffre, le journal anglais affirme qu’il doit être en réalité bien plus élevé car les données de certains pays sont manquantes. Suite à ces révélations, seulement certains clubs norvégiens ont appelé au boycott de la compétition. Autant dire que l’impact est plus que modéré sachant que la Norvège n’a pas participé la Coupe du monde depuis 1998 et que, de leur côté, les grandes nations du football et les stars du ballon rond n’ont rien envisagé de tel.
L’aspect écologique risque également de prendre du plomb dans l’aile. Ce qui n’est pas étonnant puisque le Qatar émet le plus de CO2 par personne au monde, près de 50 tonnes par habitant selon Global Carbon Atlas. En plus de la construction de nombreux stades, le Qatar a également bâti une ville entière avec un réseau de métro et des aéroports. Le climat qatari a aussi obligé les organisateurs à décaler la compétition en hiver, mais le mercure avoisinera tout de même les trente degrés. Ce qui implique que chaque stade sera équipé d’un système de climatisation géant. Malgré tout, le ministre de l’environnement du Qatar a promis que le bilan carbone de l’événement serait neutre.
Paul Marcille
Les actions écologiques des clubs de football amateur
Entretien avec Thierry Guitton, président du CS Beaumontais
Entretien réalisé par Hugo Saez