Logement intergénérationnel : pour vivre à deux, il n’y a pas d’âge

by Zoé Picard

Se loger est un vrai défi pour les étudiants lillois. Le marché de l’immobilier est complètement saturé. Lille, troisième ville étudiante de France, voit sa demande augmenter, mais son offre diminuer. Les étudiants doivent trouver des alternatives et, Karla Deplanque, étudiante en L2 de HSI a trouvé sa solution dans le logement intergénérationnel, chez Marie-Claude.

Karla n’avait personne pour faire une colocation, mais elle ne voulait pas se jeter dans le grand bain. C’est lors de ses recherches sur Leboncoin et Facebook qu’elle a trouvé sa solution : Marie-Claude. Une chambre étudiante à 350 euros charges comprises, une alternative économique parfaite pour éviter de faire face à la vie parfois solitaire des étudiants lillois. 

Réalisation : Diane Thiann-Bo Morel

Et la solitude, ce n’est pas qu’un problème étudiant. Le logement intergénérationnel peut aussi être une solution pour les personnes âgées isolées de ne pas vivre seules. Marie-Claude Thiery, 86 ans, est particulièrement touchée par ce problème : « Depuis que mon mari est décédé en 2010, la maison est vide. J’habite toute seule. Je sais que j’ai de la chance parce que j’ai des enfants et des petits enfants qui se rendent disponibles, mais ce n’est pas toujours facile. » En écoutant attentivement ce qu’elle raconte, notre cœur se serre en l’écoutant parler. Nous parlons du logement intergénérationnel : « Je ne connaissais pas. Je connaissais le viager, mais je ne savais pas qu’on pouvait s’organiser de cette manière pour loger des étudiants sous nos toits. »

Une deuxième maison et une deuxième grand-mère

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Maison de Marie-Claude et Karla. Photo Marushka Charrier

Marie-Claude publie uniquement sur des plateformes comme Leboncoin ou Facebook. Elle loue à des étudiantes, et est motivée par l’envie d’aider des jeunes filles en début de parcours universitaire. Pour Karla, cette solution présente de nombreux avantages. Elle apprécie d’avoir quelqu’un sur place, un environnement rassurant et propice aux échanges. Karla trouve que c’est parfois difficile d’être loin de sa famille et Marie-Claude le sait. Ayant connaissance de ce que peut ressentir Karla, la propriétaire n’hésite pas à inviter des gens à la maison pour que Karla se sente entourée : « Toutes les deux semaines la propriétaire organise une soirée entre voisins. Ma coloc et moi on est toutes les deux invitées. On se sent comme à la maison ! »

Bien que le cadre soit convivial, le contrat inclut tout de même quelques règles spécifiques : les locataires n’ont pas le droit d’inviter des amis dans le logement, mais la famille est la bienvenue. Karla précise : « Ça reste sa maison avant tout. »

Et Marie-Claude est aussi soucieuse de la sécurité et du bien-être de ces invités : « Elle aime qu’on la prévienne de nos allers et venues. Si on ne donne pas de nouvelles pendant trop longtemps, elle s’assure qu’on aille bien. »

Une expérience enrichissante et abordable

Le logement intergénérationnel présente une solution efficace pour les étudiants avec un budget limité, qui ne veulent pas affronter la vie étudiante seul. Avec un loyer abordable et la bienveillance d’une propriétaire qui souhaite offrir un cadre sécurisant, Karla apprécie grandement cette expérience. Elle bénéficie d’un logement à proximité de la faculté, dans un environnement rassurant et chaleureux. Pour de nombreux étudiants, ce type de solution est une alternative précieuse pour commencer leurs études dans de bonnes conditions.

Alexandre Sessa-Thiery

Réalisation : Diane Thiann-Bo Morel

Côté culture

À la rencontre des âges

L’Etudiante et Monsieur Henri (2015), film de Ivan Calbérac, nous plonge directement dans l’intergénérationnel. Bien que fictionnelle, leur rencontre permet de mettre en image l’interdépendance entre les générations à travers la cohabitation.

Quand une jeune Orléanaise sonne, monsieur Voizot, 78 ans, ouvre la porte avant de la claquer aussi sec. L’annonce d’une location de chambre dans son appartement a été postée par son fils, il est encore capable de s’occuper de lui-même tout seul. Mais un budget à 250 euros par mois ne se refuse pas, alors Constance appuie de nouveau sur la sonnette.

Le chauffe-eau est cassé depuis 5 ans ? Une simple nouvelle tentative de la part du septuagénaire pour repousser cette étudiante venue troubler son train-train quotidien.

Et puis finalement, piochée au sort parmi une multitude de candidats « tous plus médiocres les uns que les autres », Constance traîne ses valises dans sa nouvelle chambre, entamant par-là sa cohabitation si particulière.

L’un et l’autre se découvrent au fur et à mesure. Si la première s’écroule en pleurs, il faut attendre une note de piano pour que la sensibilité du second émane timidement. Les touches noires et blanches, aussi différentes que les deux personnages, les rassemblent. Créant des liens d’abord fébriles, l’interdépendance les rendra pourtant indéfectibles.

« Vous n’allez pas attendre d’avoir mon âge pour faire ce qui vous plait, on a qu’une vie Constance ». Ainsi les générations qui les séparent sont porteuses d’espoirs, de rêves à accomplir. Lui qui a passé sa vie à faire un métier qui ne lui convenait pas, il ne veut pas de ce destin pour la jeune étudiante, alors pendant qu’elle vérifie que sa Ventoline est bien posée à côté de son oreiller, lui, s’affaire pour son avenir.

Eva Pirot

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