Mettre en lumière tous les humoristes
Posted On 7 décembre 2019
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Un nouveau concept se développe depuis peu à Paris et dans les grandes villes comme Lille : les scènes ouvertes. Des théâtres, bars ou caves réservent une scène à des humoristes débutants ou plus confirmés. Le développement des scènes ouvertes correspond-il à une évolution des modes de consommation d’humour ?
En humour aussi, les temps changent. Le public ne se contente plus d’aller voir les vedettes que les méga-productions et la télévision lui proposent, lui imposent. Les zéniths et les casinos remplis par Gad Elmaleh, Florence Foresti, Jamel Debbouze ou Franck Dubosc ne correspondent plus à la (complète) réalité de l’humour. Le grand public veut désormais découvrir par lui-même des artistes, ses artistes. La consommation d’humour prend ainsi une dimension plus personnelle. Les petites salles fleurissent. Dans cette perspective, un nouveau concept prend de l’ampleur : les scènes ouvertes. Rien qu’à Lille, de nombreux théâtres, bars et caves réservent une scène aux futurs talents de l’humour. Le Tcha Tcha, la Fabrik, le Spotlight…
Ce dernier lieu est géré par Isabelle et Marc, des pionniers dans le monde de l’humour. Il y a déjà dix ans, ils s’aperçoivent qu’« il n’existe pas de vrai lieu de théâtre pour laisser s’exprimer les nouveaux talents ». Ils décident donc d’offrir leur salle, leur scène et leur lumière à des humoristes de niveaux différents, des débutants aux plus confirmés. Quatre fois par semaine, cinq ou six artistes se relaient pour tester leurs blagues ou présenter un morceau de leur spectacle.
Et l’idée plaît. La salle du 100 rue Gambetta et ses cent cinquante sièges sont souvent débordés. Une clientèle plutôt jeune apprécie le concept. Comme Jade et Chloé qui saluent « la bonne ambiance, la bienveillance » qui règnent. Les étudiants et jeunes actifs sont très largement majoritaires dans l’audience. Explication : il suffit de payer une consommation pour assister à une heure de spectacle.Les scènes ouvertes valent donc une sortie culturelle à moindre coût. « C’est très abordable et très divertissant », explique Aline, une habituée des lieux. Le concept des scènes ouvertes poursuit la vision de Jean Zay et André Malraux : il démocratise la culture. Le rire, nécessaire au bien-être humain, devient accessible à tout le monde. Les moins aisés, les étudiants, tous peuvent s’offrir une séance d’humour.
Ce qui compte, ce n’est pas la taille de la salle, c’est le talent de l’humoriste
Les scènes ouvertes traduisent également un lien de proximité accru entre les artistes et leur public. La poignée de vedettes d’autrefois a été submergée par une marée de nouveaux talents. L’offre humoristique augmentant considérablement, la consommation se retrouve logiquement éparpillée. Les comédiens privilégient donc des plus petites salles afin de les remplir mais également afin d’aller conquérir le public en allant jouer au plus près de lui. Ces petites salles ont désormais l’opportunité d’accueillir les grands noms actuels de l’humour, parmi lesquels Vérino, Gérémy Crédeville ou encore Les Jumeaux. Ces derniers sont des exemples de réussite du concept des scènes ouvertes. Surnommés « les enfants du Spotlight », ils y ont fait leurs classes et cartonnent aujourd’hui dans toute la France.
« Ce qui compte, ce n’est pas la taille de la salle, c’est le talent de l’humoriste », résume Ludivine. Les scènes ouvertes permettent justement de développer ce talent. Les humoristes saisissent volontiers ce concept pour se faire connaître d’abord, se faire aimer ensuite, se faire adouber enfin. La diversité de l’humour est représentée sur scène : stand-up surtout, impro beaucoup, mais aussi mime, comédie, absurde et magie. « Ça permet de découvrir pleins de trucs différents, de voir les nouveaux humoristes », commentent Clément et Quentin.
Ainsi, les scènes ouvertes promeuvent l’égalité. Égalité du public face à l’accès à l’humour, à la culture. Égalité des humoristes face à l’accès au public, à la reconnaissance.
Thibaut Le Besne
Le concept des scènes ouvertes est ce qu’il y a de mieux pour les humoristes afin de tester leurs vannes. Pendant plusieurs heures, les artistes défilent, les micros s’échangent et les blagues fusent. Certaines font rire, d’autre pas. Mais ce qui est sûr, c’est que tout au long de la soirée, des centaines de blagues sont échangés. Les humoristes peuvent alors constater le talent de leurs compères, s’en imprégner… Mais jusqu’où ? Jusqu’à le pomper ? N’existe-t-il pas en effet une tentation de piquer quelques vannes à ses collègues ?
A l’heure ou un internaute anonyme qui se prénomme Copycomic balance les plagiats les plus flagrants dans le domaine du stand-up, on pourrait presque comprendre que certains humoristes soient réticents à l’idée de partager leurs vannes devant une dizaine d’autres comiques.
Les scènes ouvertes du Point – virgule, qui existent depuis plus de 40 ans, connaissent selon sa directrice les répercussions de l’affaire Copycomic : « Certains ne veulent plus faire de scènes ouvertes de peur de se faire piquer leur vannes. » Cette réticence de la part des comiques provient sûrement de la complexité du pompage entre humoristes. Copycomic a en effet montré les techniques des grands pompeurs. Comment s’y prendre ? Prenez la vanne, déguisez-la, changez-en la couleur, modifiez quelques mots, et le tour est joué !
Amis humoristes, si une vanne vous fait rire, une seule chose à faire : Riez !
Martin Cribier
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