Le projet Kaps : trouver un logement tout en s’engageant dans son quartier
Le projet Kaps fonctionne selon un principe simple : des jeunes de 18 à 30 ans partagent une colocation au sein de logements sociaux et dédient 5 h de leur semaine pour mener à bien des actions solidaires. Une façon de remédier à la difficulté que beaucoup d’étudiants rencontrent pour se loger tout en redynamisant les quartiers au travers d’initiatives communes.
« La précarité étudiante tue ! ». Ce type d’affiche est visible dans de nombreuses universités françaises ces dernières semaines, où la révolte semble être à la hauteur du malaise. Le mal-logement fait partie intégrante de ce phénomène de précarisation où 19% seulement des étudiants ont réussi à trouver un logement en-dessous de 300 € dans les principales métropoles. Pour autant, il ne faut pas voir ce problème comme une fatalité. Il existe aujourd’hui des alternatives pour trouver un logement décent et à prix moindre. Le projet Kaps en fait partie. Une « kolocation à projets solidaires » inspirée des Kots-à-Projet en Belgique où des jeunes de 18 à 30 ans s’installent dans des logements sociaux en colocation de 2 à 4 personnes, à un prix tout à fait convenable, qui oscille entre 200 et 300€. En contrepartie ces derniers doivent s’investir dans leur quartier à hauteur de 5 heures par semaine. Pour Margaux, étudiante à l’université de Lille et kapseuse depuis 2 mois, s’engager pour son quartier « ce n’est pas un sacrifice mais un engagement positif ».
Des kolocataires engagés pour faire revivre leur quartier
Les actions solidaires sont à l’initiative des kapseurs et portent sur différentes thématiques : environnement, culture, sport… Les jeunes sont libres de mettre en place ensemble de projets qui leur tiennent à cœur. Louis, kapseur depuis quelques jours et passionné de musique, souhaite par exemple mettre en place des projets autour de la musique avec des enfants. L’apprentissage musical est en parfaite adéquation avec le projet car « cela permet d’aider à faire vivre un quartier qui n’a pas l’opportunité d’être attractif et de pousser les jeunes vers un éveil culturel ». Margaux, quant à elle, participe à des actions autour du thème éco-citoyenneté pour revégétaliser son quartier de Pont-de-Bois à l’image du « J’aime le dimanche ». Un dimanche par mois, les jeunes invitent les habitants de leur quartier à participer à des activités qui peuvent aller de la plantation d’arbres, de plantes comestibles, au recyclage ou bien à la création de jardinières. Ces actions solidaires, les habitants doivent ensuite se les approprier pour continuer à les faire vivre. Le kapseur est finalement un lien entre la mairie, les personnes qui habitent autour des logements sociaux et les habitants du quartier eux-mêmes.
Cette réelle complicité qui anime les kapseurs entre eux, vient d’une volonté commune de stimuler des quartiers trop souvent gangrénés par des a priori. Ces différentes actions solidaires sont des occasions pour les habitants de HLM d’être écoutés, en étant à l’initiative de projets multiples. « Les gens ont une image très négative des quartiers où se trouvent des HLM. C’est pour cette raison que j’ai cette envie de déformer ce stéréotype en le rendant plus jovial » explique Louis, enthousiaste. La durée d’engagement au sein d’une KAPS est d’un an avant de laisser sa place à un(e) autre futur(e) kapseur(se). C’est pour cette raison que les projets s’écrivent souvent sur le long terme afin que les nouveaux colocataires puissent reprendre le flambeau.
Une organisation unie et fraternelle
Cette initiative est encadrée par des salariés de l’AFEV, une association d’éducation populaire créée dans les années 90, qui a porté ce projet. Les coordinateurs de ce projet Kaps sont des tuteurs de jeunes en service civique qui, eux-mêmes, accompagnent les kapseurs au quotidien pour les aiguiller au niveau des différents quartiers et des missions qu’ils doivent remplir. Mais cette hiérarchie est loin de sauter aux yeux tant les différents corps qui forment ce projet semblent converger vers un même but : « Créer des rencontres entre des étudiants, des plus jeunes et des familles issues du même quartier », comme le rappelle Charlotte, salariée de l’AFEV.
Pour renforcer le lien qui unit les volontaires participant au projet, des rencontres interkaps sont organisées tous les mois afin de travailler sur la gestion de projets tout en s’amusant par l’intermédiaire de jeux et d’activités ludiques. Cet échange mensuel a pour but de rassembler les différents kapseurs, le temps d’une soirée, pour qu’ils puissent se rencontrer et partager leurs idées de projets, eux, qui le reste du temps, restent regrouper au sein de leur colocation et de leur quartier d’appartenance. De quoi consolider une équipe d’une cinquantaine de kapseurs sur Lille et de plus de 600 au niveau national. Une ouverture aux autres permettant de combiner actions solidaires et logements à prix bas, c’est un défi que chacun peut relever grâce au projet KAPS.
Adrien CHAPIRON
Vidéo réalisée par Aodren COMBOT
ZOOM SUR…
L’accompagnement de l’AFEV
Au-delà du projet KAPS, l’AFEV propose un programme d’accompagnement bénévole pour les étudiants en soif de découverte culturelle et de transmission de savoir. L’association d’éducation populaire, présente dans toutes les villes universitaires de France, propose aux étudiants de passer deux heures par semaine avec un enfant issu d’un quartier populaire.
Diverses missions
L’objectif ici est de créer un lien entre étudiant et enfant à l’aide d’un accompagnement personnalisé autour de la scolarité et de l’ouverture culturelle. Le programme s’adapte aux besoins personnalisés de chacun et se développe tout au long de l’année.
Dans un premier temps, l’enfant peut obtenir un suivi sur ses savoirs scolaires et sa méthodologie de travail. Grâce à son expérience et ses connaissances, l’étudiant apporte un soutien à l’enfant, dans les matières souhaitées par ce dernier, et peut le conseiller sur la méthodologie et l’organisation de son travail. La deuxième mission mise en avant est l’ouverture ludique à la culture. En fonction des goûts de chacun, l’étudiant peut proposer des activités aussi bien sportives que culturelles, à l’instar d’une sortie au musée, au cinéma, ou encore à un match de foot : tout ce qui pourrait permettre à l’enfant de découvrir les potentialités de la ville, et de lutter contre les inégalités de quartier, laissant ainsi place à de bons moments passés en binôme.
Les salariés, bénévoles et volontaires en service civique insistent aussi sur l’importance de créer un lien avec le reste de la famille. Ainsi, ils incitent les familles à participer avec le binôme aux activités qu’ils organisent tout au long de l’année, comme à une après-midi jeux de société par exemple.
Lou VAN CAUVENBERGHE