Solitude : les voisins comme réponse à l’isolement
Posted On 9 mars 2020
2
1.5K Views
La solitude et l’isolement social touchent toute la société française, sans distinction d’âge, de sexe ou d’origine ethnique. Selon un sondage du Centre de Recherche pour l’Étude et l’Observation des Conditions de vie (CREDOC), un Français sur dix serait en situation objective d’isolement, c’est-à-dire que 10% de la population française ne rencontrent jamais physiquement aucun membre de tous ses réseaux de sociabilité. La fondation de France explique que les voisins sont un bon moyen de lutter contre ce problème, mais aussi que les Français construisent l’essentiel de leur réseau social grâce à leur voisinage. C’est dans ce contexte que s’est développée l’application mesvoisins.fr, qui met en relation les voisins entre eux aux quatre coins de la France.
C’est en 2017 qu’Elise Magnin a l’idée de ce concept. Après avoir voyagé dans plusieurs grandes villes françaises pour ses études, elle regrette le manque de proximité entre voisins, à la différence de ce qu’elle avait vécu dans son petit village natal. “Elle a cherché à capter l’attention des gens où elle se trouvait pour créer du lien social“, explique Alixia Mainnemare, responsable presse et communication, mais aussi porte-parole de l’application.
Comme l’explique Alain Mergier lors d’une interview à Atlantico, ce n’est pas tant le fait de ne pouvoir compter sur personne qui pose problème dans la solitude, mais plutôt lorsque l’individu comprend qu’il n’y a plus personne pour compter sur lui. “On n’ose pas forcément aller toquer à la porte d’en face, ajoute la porte-parole. L’application facilite le premier pas.”
Mais alors comment expliquer que les grandes villes soient plus touchées par la solitude que les campagnes ? Alain Mergier apporte également des éléments de réponse dans cette même interview. Il y explique que la situation n’est pas comparable entre des villages où tout le monde se connaît et des villes où vous pouvez passer “une semaine sans rencontrer personne que vous connaissez.” Il ajoute également que d’autres caractéristiques, comme “l’hétérogénéité de la population” dans les grandes villes, expliquent ce phénomène d’isolation social. En résumé, “plus la ville est grande, plus les relations interpersonnelles deviennent complexes, comme l’affirme le sociologue. […] Plus la ville croît, plus l’anonymat fait de même.”
Il existe donc des initiatives cherchant à répondre à ce problème, dont l’application mesvoisins.fr. “Officiellement, c’est un réseau social. Mais on préfère parler d’outil au service des quartiers pour s’entraider, explique Alixia Mainnemare. C’est un peu comme une boulangerie ou un supermarché où l’on trouve des petites annonces, mais en version 2.0.” Aujourd’hui, ce sont plus de 420.000 utilisateurs dont 6532 Lillois qui sont inscrits sur le site.
Mais l’application ne répond pas seulement aux problèmes de la solitude. “Nous répondons vraiment à trois problèmes : l’isolement social, la notion de se sentir chez soi et dans une certaine mesure, la crise écologique”, assure la responsable presse et communication.
En effet, s’il est clair que l’application permet de recréer du lien social, comme nous l’avons montré précédemment, elle a aussi pour objectif de mettre en avant les produits locaux et les initiatives de quartiers. Dans ce cadre, les associations pourront bientôt se créer un profil pour se faire connaître dans leur quartier. Concernant l’enjeu écologique, les voisins organisent des marches de ramassage de déchets, des jardins ou des potagers communs.
“Le covoiturage grâce à l’application a explosé pendant les grèves, explique Alixia Mainnemare. De plus le fait de donner ou vendre des vêtements, des jouets dont on ne se sert plus, cela réduit les déchets de chacun.“
L’application continue à se développer et a pour objectif d’être présente prochainement dans la plupart des villes de France, mais aussi dans les campagnes afin que “tout le monde puisse profiter de la plateforme”, se félicite la responsable communication.
En mai 2017, à Villeneuve-d’Ascq, un étudiant était découvert mort dans sa chambre universitaire une dizaine de jours après son décès. Au-delà de l’aspect tragique de l’événement, ses voisins ont pointé du doigt un réel problème : l’absence de lien social dans les résidences étudiantes. Car si la vie étudiante rime, dans l’imaginaire collectif, avec sorties et bon temps entre amis, elle peut aussi rimer avec solitude et isolement. En effet, selon un rapport de l’Observatoire de la Vie Étudiante sur la santé des étudiants, 28% des interrogés déclarent avoir ressenti de la solitude ou de l’isolement durant l’année 2015.
Pourtant, si de nombreux étudiants débarquent chaque année dans des villes inconnues, la perspective de vivre dans des résidences étudiantes où l’on côtoie des gens de son âge n’a pas de quoi effrayer. Mais la réalité est tout autre, car à moins d’avoir les moyens de se payer une résidence privée, l’étudiant finit souvent au CROUS, dans des résidences sans lieu de vie qui ne sont finalement que des cités-dortoirs où le lien social est rompu ; c’est à peine si l’on connaît le visage de nos voisins…
Si dans les années 60 à 90, la vie dans une résidence étudiante (même modeste) ressemblait à une joyeuse colo, l’individualisme croissant dans la société, couplé aux obligations (jobs étudiants, par exemple) qui soustraient les étudiants à leur lieu de vie, ont ôté l’âme de ces résidences qui ne sont plus que des usines d’isolement et de solitude.
Très bon article : hâte de visiter cette boulangerie !
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.
pour plus d'infos