Le nouveau défi de la consommation durable et responsable
Durant les deux mois de confinement, les Français ont appris à mieux consommer en faisant eux-mêmes leur pain ou en cuisinant des produits locaux. En écho à cette nouvelle mode, El Market, magasin éco-responsable à Lille, observe une hausse de sa clientèle depuis le mois de mai. Un nouvel élan écologique fait pour durer ?
Alors que le confinement a fait reculer le jour de dépassement de deux semaines cette année, l’opinion publique se réjouit de ce recul. Malgré tout, il faut rappeler que nous avons besoin de plus d’une Terre et demie pour subvenir à nos besoins annuels et qu’il n’y a rien de réjouissant à cela. Il est indispensable d’apprendre à lutter contre une surconsommation toujours plus importante. C’est dans cette logique d’apprentissage que le magasin El Market a été créé. Zoom sur ce concept de boutique ecofriendly.
Des solutions durables à portée de main
Consommer durablement devient un art de vivre accessible à tous. Quelques gestes simples peuvent réduire drastiquement la production de déchets comme par exemple faire ses propres cotons réutilisables ou encore acheter en vrac. Pour une consommation durable, il est aussi possible de faire appel à des magasins comme El Market.
Le magasin éco-responsable s’est installé à Lille en 2006. Il a été créé des mains d’un géologue environnementaliste français, Pierre, et d’une ingénieure dans le marketing social colombienne, Diana. Eux-mêmes symboles de la mondialisation, ils ont voulu fonder un magasin qui correspondait à leur éthique. Pensant d’abord se tourner vers le développement d’un café équitable, ils se sont vite rendu compte que le projet était trop lourd à porter à deux, préférant alors monter un commerce durable. Le créateur de El Market confie que « seuls Lyon, Lille, Nantes et Paris avaient cet esprit de solidarité et d’écologie qui nous permettait de nous installer durablement ». Pierre et Diana décident alors de s’installer dans la ville qu’ils connaissent le plus, Lille.
En plus du magasin physique, El Market est aussi un site internet où il est possible d’acheter en clic and collect ou de se faire livrer. Pour la livraison, ce sont des cartons soit recyclés soit ayant déjà servi (venant des fournisseurs par exemple) qui sont à nouveau utilisés. La livraison peut s’effectuer à vélo le samedi après-midi pour les Lillois. Un magasin écolo jusqu’au bout.
L'éco-responsabilité, un concept en pleine expansion
À sa création, la recherche de partenariat est complexe. En 2005, le couple se consacre aux produits durables, le magasin commence alors des partenariats dans le monde entier : Brésil, Chine, Inde…
Chaque produit doit respecter la charte éthique fixée par le couple, il doit être écologique mais respecter aussi la condition humaine (pas de travail des enfants par exemple). Petit à petit, le magasin se développe en agrandissant les gammes zéro déchet, végan ou encore locales. Ce développement a pu s’effectuer grâce à l’expansion de la pensée écologique dans le monde et donc à l’augmentation des fournisseurs possibles.
Pour Pierre, « le client choisi en premier en fonction de l’esthétique, donc le produit doit être d’abord beau, sinon il ne reviendra pas ou juste pour acheter un cadeau à Noël ». Pour fidéliser la clientèle, le couple est obligé de se concentrer sur l’aspect du produit. Mais pour eux le plus important reste toujours son éthique. « Quand un fournisseur nous envoie un produit on regarde d’abord l’éthique avant de regarder l’esthétique », avoue le créateur.
Maïlys David
Wazemmes, le quartier éco-responsable de Lille
EDITO : Consommer éco-responsable ? Pas pour tout le monde !
Recyclage, éco-responsabilité, éthique, bio ! Tous ces mots inondent notre quotidien et modifient nos pratiques de consommation. Alors être responsable, oui, mais pour qui ?
A Lille, El Market et encore beaucoup d’autres offrent, certes, une gamme très large de produits respectant les normes environnementales mais il y a un hic : leur prix. D’après une étude réalisée par Linéaires portant sur 218 catégories de produits issus de l’agriculture conventionnelle, leur équivalent bio serait en moyenne 75% plus cher, en super ou hypermarchés.
Pour consommer éco-responsable, il faut donc y mettre le prix. Or, le budget n’est pas extensible pour tout le monde. A travers les campagnes de sensibilisation, un message se diffuse ; marginalisation des plus précaires mais aussi culpabilisation. Le sociologue Jean-Baptiste Comby explique cette tendance des classes supérieures à promouvoir une « bonne conscience écologique ». Des pratiques minoritaires dans leur quotidien dont elles tirent une certaine reconnaissance sociale. Une remise en cause superficielle de leur mode de vie ne réduisant pas l’écart de leur empreinte carbone par rapport à celle d’un ouvrier pour autant. Par exemple, une étude réalisée en 2010 par François Lenglart montre qu’un cadre produit 8,1 tonnes de CO2 par an contre 5 pour un ouvrier.
Mais en attendant, consommer écologique ne reste pas impossible pour les petits porte-monnaies : des alternatives solidaires existent, comme la vente directe chez le producteur ou le magasin Superquinquin à Lille Fives qui fonctionne uniquement grâce à ses 1600 adhérents. Pour pouvoir s’y fournir, il faut s’acquitter d’une participation de 100 euros, valable à vie, et faire trois heures de bénévolat par mois. Les membres à faibles revenus ont droit à une souscription réduite : 10 euros au lieu de 100. Il est aussi possible d’adhérer à l’association Robin des bio dont on vous parle juste ici : http://le-chatillon-lille.fr/2020/10/02/bio-et-local-des-changements-de-consommation-au-coeur-de-notre-vie-quotidienne/
Maïa Delcourt