Culture et solidarité, une alliance forte face à la crise
Posted On 30 novembre 2020
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Où et comment passerons-nous les fêtes de fin d’année ? En famille ? Avec nos proches ? Ou bien seuls, cloîtrés dans nos bunkers ? Peu importe, le choix ne se posera pas, comme tous les ans, pour près de 250 000 Français sans domicile fixe. Salles de concerts fermées, spectacles annulés, culture étouffée. Depuis mars 2020, rares se font les apparitions des comédiens, danseurs, peintres, chanteurs et musiciens à l’exception des supplications aux gouvernements successifs. Concerts solidaires, prêts de locaux ou dons d’artistes, culture et santé ne font plus qu’un en s’entraidant pour faire face à la pandémie. Le 31 octobre, ce sont les chanteurs-lyriques de l’Opéra-Comique de Paris qui se sont unis pour un concert solidaire diffusé sur France Musique, sous l’œil de Roselyne Bachelot, ministre de la Culture. Les 21 673 euros récoltés seront reversés aux artistes les plus démunis.
Dans la capitale des Flandres, pas question de laisser les salles de spectacles vides plus longtemps. Si la musique, les cris de joies, les applaudissements et les envolées lyriques ne se réapproprieront pas tout de suite la salle de l’Aéronef, au coeur du centre d’Euralille, la solidarité, elle, ne saurait refuser un tel espace. Depuis mardi 10 novembre, la salle de spectacle et de concert s’est transformée en point de collecte pour le Secours populaire du Nord. « De l’utilité du non essentiel », voici le nom de la campagne solidaire de l’Aéronef.
Dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux, l’établissement déplore subtilement d’être considéré comme « non essentiel » à la vie des Lillois. « Accepter l’idée d’être désigné comme non essentiel renvoie à une certaine vision de l’avenir et de l’autre. Ne plus vous accueillir pour quelques semaines c’est faire une croix sur ces moments de partage entre les artistes que l’on invite, vous et nous. C’est aussi mettre au placard une grande partie du sens de ce que l’on fait au quotidien […] Mais nous vous proposons aujourd’hui de nous rejoindre pour donner un coup de main aux plus fragiles d’entre nous en participant au projet que nous co-construisons avec le Secours populaire. »
Du lundi au vendredi de 11h à 15h, et les samedis et dimanches de 10h à 12h, les Lillois sont invités à « déposer [leurs] colis de denrées (tous types, frais ou non) au profit des plus démunis. Les produits d’hygiène (hygiène menstruelle notamment) sont également les bienvenus ». En collaboration avec le collectif d’artistes plasticiens Le 9e Concept, il sera aussi possible, au prix de 23 euros, d’« acheter l’une des 5 sérigraphies créées pour l’occasion […]. L’intégralité des bénéfices sera reversée au Secours Populaire pour l’action Les Pères Noël Verts »
Jean-François Groult, coordinateur du pôle lillois du Secours populaire, alerte sur une « explosion des fréquentations de nos permanences, de l’ordre de 30 à 40% ». Au micro de France Bleu Nord, il ajoute : « Nos stocks fondent comme neige au soleil. On a du mal à organiser des collectes dans certains magasins, à cause du coronavirus. Toutes les salles qui souhaitent lancer ce type de démarche sont donc les bienvenues. Il n’y a jamais trop de solidarité. »
Comme si la crise permettait quelques opportunités, quelque illusion d’une arrivée à la fin d’un tunnel long de 7 mois et 30 jours. Comme s’il n’avait jamais été plus évident qu’aujourd’hui de s’unir autour de valeurs communes pour contourner l’impasse et continuer à vivre.
Léo Maillard.
Le baisser du rideau, ou l’agonie d’un monde
Fermez les yeux. Visualisez les salles des musées, théâtres, cinémas, concerts qui vous ont tant fascinés. Sans bruit. Sans lumière. Sans vie. On y est. Le 28 octobre 2020, alors que le gouvernement annonce un second épisode du confinement, les artistes et acteurs du monde culturel voient renaître un sentiment bien familier : l’angoisse. Déjà vivement atteints par la première vague de l’épidémie, ils sont aujourd’hui à feu et à sang.
Comment maintenir une telle industrie en vie lorsque son essence même – le public – s’en trouve privé ? Vivre. Cela ne se cantonne pas au simple fait de respirer. Oscar Wilde le disait : c’est quelque chose de rare. « La plupart des gens se contente d’exister ». L’existence – déjà fade – a perdu de son panache, depuis qu’un prétendu pangolin a paralysé le temps. Ce qui nous anime, nous, Humanité, ce sont les rires, les peurs, les pleurs, tout. Pourvu que ce soit ensemble. Or nous ne le sommes pas. Nous avons troqué le réel contre l’imaginaire, le présentiel contre le distanciel, et la vie contre l’existence.
Toutefois, même lorsque l’incertitude entrave la passion, notre genre est si beau qu’il garde espoir. Il affronte, encaisse, et se relève. Les artistes redoublent de créativité, et savent la mettre à profit en attendant de refouler les parquets, d’incarner des personnages, d’exposer leurs oeuvres, pour mieux embrasser le futur. Alors quand viendra la fin de cette crise, permettons-nous de remonter ce rideau, de faire revivre ce monde qui, paradoxalement, nous rend tellement vivants.
Valentine Machut.
Photos : Sarah Khelifi.
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