Mathilde Behague cherche emploi particulier pour satisfaire un besoin d’aider
C’est en plein cœur de Lille, une journée ensoleillée pour un 5 février, que nous rencontrons Mathilde Behague. En recherche d’emploi, elle a bénéficié des services de la Cravate Solidaire en janvier dernier. Rencontre avec cette femme qui fait de l’altruisme son maître mot et de l’insertion professionnelle sa vocation.
Une coupe à la garçonne soignée, un sourire caché par le masque mais que l’on devine par les plissures au coin de ses yeux clairs, une voix posée et calme. C’est à la fois timide et assurée que se présente Mathilde, 46 ans, lors de l’entretien. Lensoise et mère de deux adolescents, elle est coquette et fière de présenter sa tenue pièce par pièce, tenue qu’elle a obtenue de la Cravate Solidaire.
Dans n’importe quel métier exercé, Mathilde Behague s’est toujours attachée à rendre service aux autres. De cheffe de rayon à Auchan à commerciale pour une entreprise de matériel bureautique, l’humain est au centre de ses objectifs, derrière la rentabilité et le chiffre. Néanmoins après plus de vingt ans passés dans ces domaines commerciaux, la pression du résultat lui pèse de plus en plus. Elle décide de penser à elle et de se réorienter : « Mes enfants ont eu 16 et 17 ans et il était temps que je pense à moi et à ma fin de carrière. J’ai voulu donner du sens à mon travail, c’est comme ça que je suis partie dans l’insertion professionnelle. »
“Je voulais aider les autres »
Quand on lui demande pourquoi spécifiquement l’insertion professionnelle, elle répond sans hésiter : « Je voulais aider les autres. » C’est ainsi qu’après son poste de commerciale et trois mois de chômage, Mathilde obtient un contrat de 16 mois à Pôle Emploi. Prise de passion pour l’insertion, elle est pourtant contrainte de quitter ce poste le 31 décembre dernier, terme de son contrat. Au-delà de son altruisme débordant, Mathilde Behague montre un attachement particulier à la notion d’emploi, elle-même connaissant le chômage. Une étape qu’elle veut constituer en véritable expérience pour accompagner au mieux les personnes en recherche d’emploi qu’elle suivra.
C’est pendant cette période creuse qu’elle va décider de faire appel à la Cravate Solidaire.
Reprendre confiance en soi
C’est au 3/5 allée Léonard de Vinci à Lille que se situe la Cravate Solidaire, une association qui lutte contre la discrimination à l’embauche et facilite l’insertion professionnelle.
Mathilde Behague en sortira « avec la banane », explique-t-elle en riant. Elle décrit un endroit convivial et des personnes bienveillantes : « Quand on est au chômage c’est compliqué. A un moment donné, la confiance s’effrite, on est toujours en position de devoir se vendre. Là, l’association nous donne l’occasion de nous exprimer librement, sans jugement et sans devoir rendre des comptes. » Elle ajoute être dorénavant plus confiante face à ses entretiens d’embauche, enrichie des conseils de l’association. Après son passage à la Cravate Solidaire, son entretien d’embauche se passe bien mais n’aboutit pas, le poste ne lui correspondant finalement pas. Opiniâtre, d’autres entretiens l’attendent dans la semaine. Mathilde donnera des nouvelles par message : « Mon entretien de cet après-midi pour un poste de conseillère en mission locale est positif. »
Quant à la discrimination à l’embauche, Mathilde explique ne l’avoir jamais rencontrée. Ayant une double casquette vis-à-vis de l’emploi (chômeuse et ex-conseillère en insertion professionnelle) elle accorde toutefois une place importante à l’apparence : « Même si la tenue n’est pas foncièrement importante, c’est aussi une marque de respect. Si un recruteur estime que sur un entretien d’embauche on ne fait pas l’effort vestimentaire, il se dit que l’on ne saura pas faire l’effort dans notre métier. » C’est dans cet état d’esprit qu’elle recontactera l’association pour y être bénévole et encore une fois : apporter son aide.
“Même si la tenue n’est pas foncièrement importante, c’est aussi une marque de respect”
Si pour Mathilde Behague la Cravate Solidaire est la solution pour les personnes en recherche d’emploi, le problème de la discrimination à l’embauche n’est pourtant pas réglé. Il apparaît être traité sur la forme, avec le don de vêtements, mais non sur le fond, véritable engrenage de la société de l’apparence. L’homme est-il contraint à juger une personne dans les secondes où il la rencontre ou est-ce le produit d’une construction sociale ? La Cravate Solidaire nous montre que l’apparence compte et elle a le mérite d’essayer de mettre tout le monde sur un même pied d’égalité.
Léa Bouquet
Vidéo : Faire face aux discriminations à l'embauche avec La Cravate Solidaire
L’édito - Que gagne-t-on à travailler ?
9% des actifs sont au chômage selon le Bureau International du Travail (BIT) au troisième trimestre 2020. En cette période de crise économique, le travail est plus que jamais au centre du débat public. Mais au fond, que gagne-t-on à travailler ? Évidemment, le travail cherche à répondre à nos besoins primaires. Manger, boire, se loger. Cela peut pourtant sembler assez dégradant : la peine endurée ne nous permettrait que de subvenir à nos besoins et d’acheter des biens consommés immédiatement après. Néanmoins le travail peut aussi nous donner le sentiment d’être utile, d’avoir de la valeur et d’appartenir à la société. L’Homme a-t-il un « besoin de travail » pour accéder au Bonheur ? 8 français sur 10 aiment leur travail selon un sondage réalisé en 2017 par la CFDT auprès de 200 000 personnes. Est-ce être trop optimiste que d’avoir foi dans le travail ? Pas selon Alexandre Dumas : « Le travail est indispensable au bonheur de l’homme ; il l’élève, il le console ; et peu importe la nature du travail, pourvu qu’il profite à quelqu’un. » Cependant, 51% des personnes interrogées affirment que leur charge de travail est excessive. Est-ce que trop de travail tue le travail ? En tout cas, son utilité n’est plus à démontrer.
Benoît Chavatte