Face à l’isolement des étudiants, les Français se mobilisent
Privés de cours en présentiel depuis novembre, les étudiants ne cessent d’appeler à l’aide face à leur détresse grandissante. Certaines initiatives sont donc mises en place par des entreprises, associations ou communautés pour les sortir de cet isolement social : c’est le cas du café associatif du Bus Magique à Lille.
Voilà plus de quatre mois que les étudiants du supérieur n’ont pas eu le droit de retourner en cours en présentiel, à quelques exceptions près. Rares sont les chanceux qui échappent au distanciel forcé, parmi lesquels on compte les étudiants de classe préparatoire, qui ont cours dans les lycées qui eux, sont encore ouverts, ou encore les BTS.
Exit la maxime « métro-boulot-dodo », qui a été remplacée par « visio-boulot-dodo » : source d’angoisse, de détresse et surtout de vide social. En effet quand la fin des cours coïncide avec le début de l’interdiction de sortir, voilà les étudiants contraints d’enterrer toute perspective de vie sociale jusqu’au lendemain matin. Or, quand cette dernière n’existe pas non plus pendant la journée, on se retrouve face à un isolement social le plus complet, celui-là même qui en fait sombrer plus d’un dans une grosse déprime, quand ce n’est pas une dépression.
La détresse des étudiants en a touché plus d’un, et on a rapidement vu fleurir des initiatives citoyennes pour les aider à sortir de leur isolement : cafés, bars, espaces de coworking, restaurants ont ouvert leurs portes aux jeunes pour leur permettre de travailler autre part que dans leur logement étudiant.
Face à l’appel à l’aide des étudiants du supérieur, la réponse du gouvernement est pour beaucoup insuffisante. Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, avance l’argument d’un bonbon laissé sur une table d’amphithéâtre, qui pourrait être mangé par quiconque et participer à la transmission du virus ; tandis que Sarah El Haïry, secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et de l’Engagement, prétend pouvoir mettre fin au désespoir étudiant avec le Service Civique et un vague « engagement sociétal ».
La réponse des citoyens
Incomprise par son gouvernement, la jeunesse semble ne plus pouvoir se tourner que vers la société civile. Ainsi, certains commerçants en mal de clients ont décidé d’ouvrir leurs locaux pour accueillir les étudiants, leur offrant une possibilité de travailler avec des pairs, chose très prisée ces derniers temps. Des espaces de travail collectifs, une connexion internet et parfois des boissons chaudes : ce sont ce que pourront trouver les étudiants qui décident de se rendre dans les structures qui ont mis en place des dispositifs solidaires.
Solidaire, c’est le maître mot de Julie, porteuse de projet du Bus Magique, un café associatif qui a ouvert ses portes l’espace de quelques semaines, en septembre, entre deux confinements. Les valeurs portées par le Bus Magique, c’est un mélange entre le renforcement du lien social, le respect de l’environnement et la promotion de la culture. Malheureusement, la pandémie a enterré les espoirs de Julie, qui s’est vue contrainte de fermer ses portes dès novembre.
Après avoir profité de cette fermeture forcée pour peaufiner les travaux avec les bénévoles du café, la péniche qui accueille le Bus Magique est restée bien vide, au grand dam des porteurs de projet. C’est ainsi que depuis la fin du mois de février, les bénévoles ont décidé d’ouvrir la péniche comme espace de coworking : une manière de s’inscrire dans le projet initial du café, en manque de lien social.
Depuis début mars, les étudiants sont aussi les bienvenus : après une réservation en quelques clics sur le site du Bus Magique et une adhésion d’un euro, il est possible de venir profiter du cadre idyllique proposé par Julie et ses collaborateurs. Travailler presque les pieds dans l’eau de la Deûle, avec la possibilité de rencontrer de nouvelles têtes dans un cadre accueillant et inspirant : voilà ce que propose la péniche.
Les initiatives de ce genre pour briser l’isolement des étudiants et autres citoyens condamnés au distanciel se font de moins en moins rares : des associations qui luttent habituellement contre la précarité des sans-abri se sont mises à organiser des distributions alimentaires pour les jeunes. Chacun peut apporter son aide, à son échelle, en se mobilisant aux côtés des syndicats étudiants également, qui sont nombreux à proposer une aide sociale, alimentaire et psychologique pour les étudiants en détresse. Après plus d’un an de crise sociale sur fond de pandémie aux traits par moments apocalyptiques, la solution se trouverait alors dans la solidarité citoyenne ?
Philippine Quentin
Zoom : l’importance des relations sociales
« L’homme est un animal social », cette phrase d’Aristote beaucoup utilisée et un peu bateau fait aujourd’hui plus sens que jamais. A l’heure de la distanciation, des masques et des confinements nombreux sont ceux qui regrettent de ne plus pouvoir autant socialiser qu’avant.
Robert Waldinger, un psychiatre américain a été l’un des directeurs d’une étude longue de 75 ans, menée par Harvard sur le bonheur. Le but était de suivre 268 personnes durant toute leur vie pour évaluer leurs accomplissements, leur santé physique et mentale et leur bonheur.
Ce qui est ressorti de cette étude c’est notamment l’importance des relations sociales. Il apparaît que ceux qui mènent une vie sociale importante, avec leur famille ou leurs amis, sont plus heureux que ceux qui vivent dans une solitude non choisie. Jusque là c’est logique. Mais ces derniers ont aussi plus de problèmes de santé, tombent plus facilement malades et ont une espérance de vie moins importante.
La philosophie, avec Aristote, a déjà prouvé que le social est intrinsèque à l’Humain, doté du logos, la capacité à interagir, raisonner et communiquer avec l’autre.
La science prouve aujourd’hui que les relations sociales ne sont pas seulement caractéristiques de l’homme mais aussi nécessaire à sa bonne évolution ; en bonne santé et heureux.
Alors en ces temps troubles, ne négligez pas les relations sociales, les contraintes sont réelles mais nous disposons aussi de nombreux outils ; jeux vidéos, réseaux sociaux, applications qui peuvent servir le social.
Créez des relations, entretenez les ; c’est bon pour la santé !
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Des solutions face à la précarité étudiante
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