La Primaire Populaire appelle la gauche à s’unir pour 2022
La Primaire Populaire est un projet ayant vu le jour en mars 2021. C’est un rassemblement de citoyens qui prônent l’union de la gauche en vue de l’élection présidentielle de 2022. Rencontre avec Yanis Khames, membre du bureau, pour mieux comprendre les enjeux et les limites de ce processus.
« Humanistes de tous les partis, unissez-vous ! » C’est à cela que ressemble le cri du cœur de la Primaire Populaire. Dans notre société, où la crise sociale et climatique devient de plus en plus critique, la gauche et les écologistes partent au combat divisés, rendant presque impossible une victoire lors de l’élection présidentielle de 2022.
Ce ne sont pas moins de 7 candidats qui ont annoncé leur candidature, et aucun d’eux ne se détache clairement dans les sondages. Tandis que l’insoumis Jean-Luc Mélenchon peine à atteindre la barre de 10%, Yannick Jadot et Anne Hidalgo sont respectivement crédités de 7 et 5%. Les autres candidats déclarés, quant à eux, n’atteignent même pas les 2%. Face à ce constat, et refusant d’être à nouveau spectateurs d’un duel Macron / Le Pen annoncé depuis des mois, des citoyens se décident à agir.
Yanis Khames, 23 ans, assistant d’éducation à Saint-Denis et membre du bureau de la Primaire Populaire, l’explique : « Comme ces personnes [les candidats de gauche], par ego ou pour d’autres raisons ne s’allient pas pour faire gagner nos valeurs, alors nous, membres de la société civile, qui voulons absolument avoir un avenir vivable, allons faire en sorte qu’ils s’unissent. »
Pour construire cette Primaire Populaire, ses organisateurs ont débattu avec les forces politiques de gauche pour « parvenir à la confection d’un socle commun de 10 mesures ». Ce socle a ensuite été adopté unanimement par tous les grands partis, du PCF à EELV en passant par LFI et le PS. Yanis Khames : « Cette phase a également permis de faire ressortir les sujets avec lesquels ils ne sont pas d’accord comme la laïcité, le nucléaire ou encore l’Europe. Cependant, d’après nous, ces sujets sont dépassables au vu de l’urgence sociale et climatique qui secoue notre pays.“
Un projet qui peine à s’imposer
A ce jour, quelque 140 000 personnes se sont inscrites, bien loin de l’objectif de 300 000 que les organisateurs s’étaient fixé. Un chiffre non négligeable certes, mais est-il suffisant pour faire le poids face à 7 candidats d’ores-et-déjà déclarés ? Si ceux-ci ne souhaitent pas participer à la Primaire Populaire et maintiennent leur candidature à la présidentielle, n’y a-t-il pas un risque de diviser plus encore, en ajoutant un 8e candidat à gauche ?
Pour Yanis Khames, cette projection est prématurée au vu de l’avancée du processus : « Aujourd’hui, il n’est pas question de division, l’heure est à la discussion et au débat. La question se posera à partir du 30 novembre et nous verrons si les candidats vont accepter ou non de participer à la primaire. Nous prenons le pari qu’ils prendront conscience de la responsabilité historique qui est en jeu et qu’ils s’engageront dans le processus. »
La gauche est certes divisée, mais elle apparaît également affaiblie : En additionnant les scores probables de tous ses candidats, celui-ci se situe entre 25 et 30%, ce qui est loin de garantir à la gauche, même unie de remporter l’élection présidentielle. La mission de la Primaire Populaire va donc bien au-delà de la mobilisation des militants et électeurs. Elle souhaite également redonner de l’espoir à toutes celles et ceux qui se sont abstenus, déçus notamment par les divisions : « Aujourd’hui, pour moi, la gauche est divisée mais elle n’est pas faible. J’ai la conviction que la gauche peut l’emporter en mai 2022. Cependant, il est clair que beaucoup d’électeurs ont été déçus. Nous devons faire en sorte qu’ils se remobilisent pour porter nos valeurs, faire de la politique différemment, et c’est ce que nous faisons. »
Rencontre avec les militants de la Primaire Populaire
A partir du 30 novembre, une fois les candidats à la Primaire Populaire connus, il sera temps de voter pour déterminer celui qui représentera le bloc social et écologiste en mai 2022. Pour ce faire, les électeurs vont participer à un scrutin au jugement majoritaire, méthode inédite qui consiste à attribuer une mention à chaque candidat allant de « A rejeter » à « Très bien ». La personne élue sera donc celle qui aura été la mieux évaluée par une majorité. Elle devra ainsi composer dans l’intérêt d’un plus grand nombre d’électeurs, même ceux qui avaient plébiscités un autre candidat. Cette solution a pour objectif d’assurer une meilleure représentativité, et donc diminuer l’abstention. Selon Yanis Khames, « ce mode de sélection va permettre de faire émerger une équipe de France de l’écologie et de la justice sociale », et ainsi privilégier le collectif à l’individuel.
A ce jour, personne ne peut prédire si la Primaire Populaire atteindra son objectif final d’instaurer une République plus écologique, sociale, et démocratique. Cependant, elle aura au moins permis de redonner espoir à des dizaines de milliers de Français, et la conviction qu’un nouveau projet politique est possible.
Pour en savoir plus sur la Primaire Populaire, http://www.primairepopulaire.
Arthur Guillamo
Une primaire populaire, mais pas chez tous les candidats
Ils sont dix, cinq candidats et cinq candidates, réunis au sein de cette primaire populaire. Dire que leurs avis divergent sur l’initiative serait un euphémisme.
Parmi les seize candidats proposés, seuls quatre sont officiellement « candidats Primaire Populaire ». C’est-à-dire qu’ils ont officiellement annoncés leur soutien et leur candidature au sein de cette primaire qui n’est pas reconnue par les divers partis politiques de gauche. Pierre Larrouturou avait motivé sa candidature à Ouest-France avec ces mots : « Je suis persuadé que jouer collectif nous permettra de construire un très beau projet. » A la veille de la clôture des parrainages il est en tête parmi les quatre candidats « officiels ».
Les autres candidats en revanche sont parrainés sans leur accord. Jean-Luc Mélenchon annonçait même le 9 juillet dernier : « Non, vous ne m’imposerez pas votre système. J’ai appris que vous avez l’intention d’organiser des primaires avec des candidats, des gens qui ne veulent pas être candidats. Je ne veux pas être candidat dans cette primaire. »
Il s’agit là de l’opposition la plus marquée mais d’autres candidats ont aussi annoncé ne pas souhaiter participer à cette primaire pour des raisons différentes. Ainsi Christiane Taubira a annoncé qu’elle se retirait de la Primaire Populaire pour ne pas fragmenter encore plus la gauche. « […] je ne peux pas venir contribuer à l’éparpillement », s’est-elle justifiée sur France Inter alors qu’elle est en tête des parrainages avec François Ruffin qui, de son côté, a annoncé ne pas vouloir être candidat à la présidentielles de 2022.
Noah Gaume