La promesse d’inclusion concilie handicap et travail
Posted On 15 janvier 2022
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Les trois témoignages s’affilient à la défense du droit au travail pour tous. Le long de la rivière du Doubs, Gilles Grosperrin dirige un Établissement et Service d’Aide par le Travail où sont proposées des activités de montage et de conditionnement adaptées aux personnes en situation de handicap. Sur les routes d’une commune rurale, Marie-Claude raconte son expérience en milieu protégé tandis qu’à la frontière belge, Ombeline Gille organise des ateliers en partenariat avec l’institut médico-professionnel des Papillons Blancs de Lille.
Tous les trois établissent un bilan des difficultés d’admission et d’adaptation sur le marché du travail pour les personnes en situation de handicap. Gilles Grosperrin dépeint l’engagement institutionnel des ESAT, ces Établissements et Services d’Aide par le Travail qui accueillent des personnes dont l’habilité professionnelle ne correspond pas aux attentes des entreprises ordinaires. L’ESAT tel que ETP Synergie de Dole se saisit de la problématique d’accès au travail et adapte ses formations et activités rémunérées. « On estime que les structures sont inclusives, pour permettre aux personnes les plus éloignées de l’emploi d’y accéder », avance Gilles Gosperrin.
A quelques conditions cependant, puisque l’inclusion implique un comportement social compatible avec les activités. Le directeur d’ETP Synergie rappelle une condition effective de l’insertion : « On évalue les capacités à adhérer au travail ». Ce que Gilles Grosperrin appelle « pré-requis sociaux » correspond entre autres au respect des horaires et des règles de sécurité. Son statut de salarié d’ETAPES, l’organisme gestionnaire, lui permet de penser le potentiel inclusif : «On embauche par défaut. Il n’existe pas de critères d’admission mais plutôt des critères de non- admission».
Marie-Claude reconnaît la diversité des activités proposées en ESAT, ayant alterné durant sa vie les ateliers de conditionnement, les travaux de sous-traitance, les espaces verts : « son dada » est la soudure, considérée comme : « quelque chose de plus valorisant ». Aujourd’hui devenue employée municipale à la mairie de son village, elle énumère, avec l’aide de sa sœur, les souvenirs de son accueil en ESAT. Les yeux étincelants, la gorge nouée et les sourcils froncés, la parole se libère au fil des heures. Les anecdotes se succèdent jusqu’à former une expérience du milieu protégé extraordinairement féroce et significative.
La sœur de Marie-Claude signale la nécessité d’une aide extérieure pour accéder sainement aux formations et apprentissages proposés : « Je me suis plus battue pour elle dans la vie que pour moi- même ». Au travers d’un récit non dépourvu d’affects, elle considère l’apport limité des structures : « Les ESAT sont un moyen d’occuper les gens, mais ce n’est pas un moyen de les épanouir ». Grâce à un partenariat avec l’institut médico-professionnel des Papillons Blancs de Lille, Ombeline Gille échange régulièrement avec des personnes en situation de handicap et admet également une marge de progression des institutions. Son propre projet inclusif éclot en métropole.
La porteuse du projet « La Cuisine de Jeannette », qui vend des compotes anti-gaspillages, affirme que les personnes en situation de handicap veulent se rendre utiles mais sont souvent invisibilisées :
« C’est rare qu’on les mette en lumière ». Ombeline Gille souhaite donc prouver la possibilité d’inclure des personnes en situation de handicap au sein d’activités professionnelles. « Le but est de les intégrer à la démarche entrepreneuriale : participer au choix du logo, des couleurs ou aux vidéos sur les réseaux sociaux », énonce-t-elle. La jeune femme envisage également de soutenir des personnes en difficulté d’accès à l’emploi : « J’essaie de créer une association et de faire un chantier d’insertion ».
Élodie Niclass.
L’association Le Mouton à 5 Pattes est située dans le quartier de Lambersart à Lille et a pour volonté de rapprocher des personnes avec Autisme de l’emploi. 50 bénévoles de 16 à 48 ans se sont regroupés car touchés de près ou de loin par ce handicap. C’est avec des collaborations et de l’écoute de chacun qu’ils répondent aux besoins des concernés. Gérard Labbe, son fondateur a répondu à nos questions :
Quel est le fondement de votre association ?
« Nous sommes des bénévoles, vivons des adhésions, des appels à projets et nous avons également un partenariat durable avec le Centre Ressources Autismes Nord Pas de Calais. Il y a un constat simple : entre 76 et 90% des personnes avec autisme sont sans emploi. Ils sont 600 000 de tout âge… soit 1% de la population française, c’est un enjeu social et économique majeur qui nous occupe depuis 2016. »
Comment encouragez-vous leur insertion professionnelle ?
« Pour y parvenir, nous réalisons 5 missions : sensibiliser les lieux d’accueil ou les entreprises intéressées, rencontrer les personnes avec autisme pour bien cerner leurs besoins et leurs particularités, les accompagner dans leur parcours, vérifier l’ajustement de l’environnement de travail, enfin, maintenir dans l’emploi pour que ce soit gagnant pour la personne et l’entreprise. »
Que peuvent faire les entreprises ?
« S’informer, s’ouvrir aux handicaps, changer de regard et sortir des préjugés. Beaucoup pensent encore que la personne avec autisme crie et fait des crises ou, a contrario, qu’elles sont toutes des génies de l’informatique comme dans Rain Man. Ces entreprises doivent au moins essayer, rencontrer des talents méconnus. Ces personnes apportent beaucoup aux managers et entreprises parce que les aménagements produisent de la valeur et bénéficient à l’ensemble des équipes. »
Thomas Vandamme.
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