Depuis avril 2019, l’association d’éducation populaire lilloise L’Établi vient en aide aux habitants des quartiers en transformation urbaine de la région. Elle se donne pour but d’aider ces derniers à être acteurs des changements de leur environnement et d’établir une discussion avec les élus.
Lorsque l’on arrive dans les locaux de L’Établi, dans le sud de Lille, on découvre deux bureaux chaleureux où tout respire la bonne humeur. Celle-ci est nécessaire pour aider les habitants à participer aux changements en cours et qui les concernent. En effet, l’association est partie d’un constat simple : de nombreux citoyens, dont le quartier est en transformation urbaine, s’excluent eux-mêmes de la prise de décision. Certains n’aiment pas participer aux réunions ou encore prendre la parole en public ; beaucoup ne se sentent pas légitimes dans le processus de décision, alors que les projets en discussion vont avoir des conséquences directes sur leur vie quotidienne. C’est pourquoi L’Établi a été créé. « Notre volonté est d’aider les habitants à construire et non pas à subir » la transformation de leur quartier, explique Aurélie Kopitsch, cheffe de projet et membre fondatrice de l’association. Pour atteindre son but, L’Établi utilise « l’éducation populaire ». Il s’agit d’un mouvement qui véhicule le principe que « tout le monde peut apprendre quelque chose à quelqu’un d’autre, quel que soit son âge et la façon de l’apporter, pas forcément scolaire ».
Un rôle de médiation
D’après Mme Kopitsch, les trois grands objectifs de l’association sont : « Aider les citoyens à mieux comprendre le monde qui les entoure, les faire contribuer à la transformation de leur environnement et enfin de réparer la démocratie participative. » Ce dernier élément désigne l’ensemble des démarches qui visent à associer les citoyens au processus de décision politique. L’Établi intervient en priorité auprès des habitants des quartiers en transformation urbaine, grâce à des projets créés après un « diagnostic partagé » réalisé auprès de la population. Ces initiatives concernent les résidents de tous âges, depuis l’école jusqu’au conseil citoyen. « Notre rôle est d’être un médiateur entre les habitants et les élus », explique la cheffe de projet.
L’Établi a créé un jeu de sept familles avec les métiers et les institutions de la transformation urbaine, pour mieux expliquer aux enfants d’un quartier de Wattignies.
Photo : Valentin Valette
Pour y parvenir, mettre les citoyens et les pouvoirs publics en confiance est primordial. Dans l’ensemble, les premiers sont généralement heureux de travailler avec l’association car la transformation de leur propre quartier et la possibilité d’y participer les intéresse grandement. Quant aux élus, leur réaction peut varier selon les territoires, malgré le fait que depuis la loi Lamy de 2014 sur la politique de la ville, la participation des habitants à l’évolution de leur quartier est obligatoire. Sur le plan géographique, L’Établi est actif sur l’ensemble de la région mais surtout dans le sud du département du Nord et dans le Pas-de-Calais : « Actuellement, on intervient sur une trentaine de territoires. » Toutefois, la demande augmente contrairement aux effectifs de l’association.
L'incontournable question du financement
L’Établi possède treize salariés et fonctionne principalement grâce aux subventions publiques, qui proviennent notamment de l’enveloppe dédiée aux quartiers prioritaires. Les crédits spécifiques pour la politique de la ville sont donnés pour un an et renouvelables deux fois. L’association perçoit également de l’argent pour former des jeunes qui accomplissent un service civique. Lorsque l’on demande à la cheffe de projet comment l’association s’en sort financièrement, elle répond : « Pour l’instant ça va, les subventions nous ont permis de grossir. » Elle ne cache toutefois pas son espoir de trouver un financement plus pérenne sur le long terme afin de développer encore plus ses actions, pour le moment limitées par la contrainte budgétaire.
Pierre Lucotte
Qu’est-ce que la démocratie participative ? Est-ce vraiment une solution face à la défiance des citoyens envers les institutions et les élus ? Hugo Scalabre vous explique tout dans cette vidéo.
Immersion au cœur d’une action d’éducation citoyenne avec l’Etabli
Rendez-vous à Wattignies dans un quartier en pleine transformation. Plus précisément, dans « l’école d’attente » Guillaume Apollinaire. « Attente » tout simplement parce que depuis septembre les enfants sont placés dans cette école provisoire en attendant qu’une plus récente soit construite.
Depuis le 18 octobre, l’Établi réalise avec les jeunes La Gazette, une sorte de journal qui explique de manière vulgarisée les différents aménagements du quartier. Le but ? Aider les enfants à comprendre les futurs changements de leur environnement « On parle du changement et de la construction », confie une élève de CM2 du groupe d’activité. Des aménagements comme un ascenseur sont notamment attendus et certains sont prêts « à se casser une jambe rien que pour l’utiliser ».
Après un bon goûter composé de clémentines, cookies et chocolat chaud, « c’est l’heure de se mettre au travail ! » crie l’une des jeunes du projet. L’activité commence toujours par l’interview d’une personne qui participe au chantier. « On a déjà interviewé un architecte et les animateurs de la garderie ». Maintenant les élèves pourront se vanter d’avoir « cuisiné » des jeunes journalistes en herbe car tel l’arroseur arrosé, « Valentin et Elsa, c’est vous qu’on va interviewer ».
Ensuite, c’est le jeu des 7 familles. Fini les familles Dupont ou Durand, cette fois c’est « la famille qui accompagne » ou encore « la famille qui construit » qui forment le jeu. Grâce à cette activité ludique, l’Établi explique le rôle des différents intervenants dans les 9 travaux du quartier : du conseil citoyen à l’architecte en passant par la carreleuse, les enfants acquièrent une vision globale du monde qui les entoure.
Elsa Sename