Tipimi, c’est “toi et moi” en ch’ti, mais c’est aussi le nom de cette association atypique ouverte à Fives il y a 6 ans. Concept moderne et hors du commun, elle comprend plusieurs services axés sur la consommation responsable, écologique et économique à plusieurs échelles, et est également une objethotèque, une « bibliothèque pour les objets ».
Quand on est enfant, on apprend rapidement à prêter ses jouets et ses crayons de couleurs. Mettre en commun ses biens permet de tisser des liens sociaux et d’élargir ses possessions, même si ce n’est que le temps d’un après-midi. Mais pourquoi arrête-t-on de prêter et partager en grandissant ?
C’est la réflexion que se sont faite Diane Kraft et Sébastien Liebart, deux collègues de longue date qui ont longtemps travaillé ensemble dans différentes entreprises avant d’avoir l’idée de cette objethotèque. S’essoufflant tous les deux dans leur carrière et partageant un important intérêt pour l’environnement, ils décident de travailler communément sur la consommation, « un sujet qui parle à tout le monde », nous explique Diane, cofondatrice de Tipimi.
Comment ça marche ?
En 2017 ils lancent donc leur plateforme, Tipimi.fr, afin de mutualiser, mettre en commun et optimiser les biens des adhérents. Ces derniers doivent payer une cotisation annuelle de minimum 10 euros, qui peut être augmentée selon leur bon-vouloir. Aujourd’hui, ils sont au nombre 500 sur la plateforme Tipimi.fr.
Après l’adhésion, chacun met sur la plateforme des photos des objets qu’il ou elle souhaite mutualiser avec les autres membres. Lorsque quelqu’un souhaite emprunter un bien, une notification est envoyée au propriétaire qui peut alors organiser un rendez-vous avec l’emprunteur dans un onglet discussion. Une durée déterminée est établie pour le prêt, et une autre notification est envoyée aux adhérents la veille du retour. « On peut facilement voir où sont nos objets, chez qui, quand ils reviennent, explique Diane. Avant Tipimi je prêtais seulement à mes amis proches, mon voisinage, et je ne savais pas forcément où ils étaient quand je voulais m’en servir. Aujourd’hui je prête à des étrangers et finalement tout revient toujours, je sais où ils sont etc.»
Espace Restauration et Boutique ©Alice Jacquet
De nouveaux réflexes
Lorsque l’on prête ainsi ses biens, on prend rapidement conscience de leur valeur, « on fait plus attention lorsque l’on veut acheter quelque chose, on peut mettre plus cher dedans, faire attention à là où l’objet a été produit, si il est réparable ou non… », détaille la cofondatrice. Il est important de se rendre compte de la surabondance de nos biens, surtout quand ils restent au fond de notre placard la plupart du temps. Le but de l’association est de déconstruire le réflexe « j’ai besoin, j’achète » en revenant aux emprunts. Restreindre de la sorte le consumérisme, pourrait sur le long terme réduire la demande et ainsi la production. Dans le contexte environnemental actuel, cette action à petite échelle est un exemple qu’il faudrait suivre à plus grande ampleur. Nous manquerons bientôt de ressources, que ce soit pour produire ou exporter des biens. Apprendre dès maintenant à les mettre en commun est un bon exercice, puisqu’il s’agira sûrement de la norme dans quelques décennies.
Des difficultés de communication
Bien que l’initiative soit bonne et les adhérents satisfaits, l’association peine à accueillir de nouveaux prêteurs/emprunteurs. De nombreuses campagnes de promotion ont déjà été réalisées, mais peu sont ceux qui les ont remarquées. Les membres restent majoritairement des habitants de Fives et alentours. « Ça reste très difficile de faire connaître le projet auprès des étudiants » explique Diane, alors qu’ils restent un des publics qui pourrait le plus bénéficier de ce système de mutualisation des biens. L’association avait tenté de joindre les étudiants de l’Université de Lille, avec laquelle ils ont un partenariat depuis la rentrée 2021. L’adhésion est prise en charge par l’Université, et l’inscription des étudiants est donc gratuite.
Cette difficulté à parvenir à d’éventuels nouveaux membres est d’autant plus dommage que ces emprunts sont l’occasion de tisser des liens sociaux. Lorsque l’on emprunte un livre ou un jeu, on peut demander conseil ou échanger avec le prêteur, observer des points communs. En bref dans notre société d’hyperconsumérisme, le projet de Diane et Sebastien est un moyen de lutter contre les réflexes de dépenses inutiles.
Sidonie Rahola-Boyer
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Louer pour mieux consommer
La location peut être utilisée comme passerelle vers l’accession à la propriété. L’attrait de la location, à long terme est elle, à la hausse pour de nombreuses raisons : de la diminution du besoin de posséder, à une variété d’avantages spécifiques.
Pourquoi louer ?
Ce n’est pas un commerce nouveau, mais en période de crise, cela permet de réaliser des économies. On loue au lieu d’acheter en raison des circonstances individuelles et des tendances générationnelles. Certains vont faire le choix de louer simplement parce que c’est plus facile que de passer par le processus d’accession à la propriété.
Désormais, la location se pratique pour n’importe quel objet, entre particuliers, véhicules, mobilier ou vêtements. Il semble que nous soyons passés dans une société du jetable.
Avantages de la location
Découvrir le produit sans devoir l’acheter
De nombreuses personnes recherchent une expérience de consommation plus que la propriété. Par exemple, l’appareil à fondue est intéressant parce qu’on veut partager un repas et un bon moment. Le fait qu’il nous appartienne importe peu, c’est l’usage qui compte. La location correspond à l’air du temps, c’est un mode de consommation malin. Pourquoi garder une scie sauteuse qui ne sera utilisée que quelques minutes par an ?
L’emprunt de biens est une consommation collaborative
Une préférence pour l’entraide, la consommation collaborative : un ensemble de pratiques qui privilégie les relations entre particuliers contre le commerce normal. D’autres branches de ce marché se sont développées, à l’instar du covoiturage. Les gens veulent consommer mieux. C’est un commerce plus écologique, un commerce durable, qui a du sens. Et qui met les gens en relation.
Pour d’autres c’est peut- être aussi la volonté de liberté, de contourner le système marchand qui est à la base du commerce collaboratif. Plutôt que de donner de l’argent à une grande enseigne, on va louer les outils de son voisin. On privilégie l’entraide. Un commerce dans l’air du temps.
L’économie collaborative et la location permet d’améliorer la qualité de vie de notre planète. Ce mode de consommation vertueux répond au besoin de flexibilité des ménages. La location devrait continuer à prendre de l’ampleur dans les années à venir.
Anna Damay
Vidéo, ©Alice Jacquet