Le choix de l’indépendance artistique au profit de la liberté créative
Tom est à l’origine de la création du label indépendant Howlin’ Banana, et Simon fait partie du groupe de rock indé Cosmopaark. Tous deux appartiennent à l’industrie musicale, et ce de façon indépendante, sans l’aide des majors du disque. Cette démarche, s’inscrivant dans la culture DIY (« Do It Yourself »), implique une réelle autonomisation des artistes. Place à la liberté créative…
Plus de liberté et de diversité : c’est la volonté de certain.e.s dans l’industrie du disque où les trois majors (Sony Music Entertainment, Universal Music Group et Warner Music Group), grandes maisons de disque américaines, prépondèrent. Face à elles, les labels indépendants permettent d’ouvrir la porte aux artistes vers le monde de la musique et vers un public plus spécifique. Chaque label a ses valeurs, son identité, sa patte. Si Marx affirmait que le travail artistique se doit d’être un travail non-aliéné, et d’offrir à l’artiste une autonomie qui le laisse prendre possession de lui-même pour créer, on peut dire que les petits labels indépendants s’inscrivent dans cette démarche.
Une logique à l’encontre de la marchandisation
La volonté des majors se base principalement sur le développement du potentiel de vente d’un.e artiste. À contre-courant, les labels indépendants fonctionnent sur le développement du potentiel artistique et créatif des musicien.ne.s. Les productions d’artistes déjà célèbres sont valorisées par les majors car leur succès, et donc leur rendement économique, sont plus faciles à prévoir que pour des artistes émergents. Tom nous informe que le rôle de dénicheur de talents est alors confié aux labels indépendants, qui prennent le risque de s’investir à 100% pour les artistes en devenir. Le fonctionnement des majors est révélateur du système mondialisé capitaliste qui régit les façons de créer et produire, et peut brouiller l’art par le star-système et le divertissement.
Liberté créatrice à tout prix
« En général les contrats de major sont assez contraignants […] : engagement sur un certain nombre de disques, exclusivité, cession de pas mal de droits, etc. Mais certains gros indés pratiquent des contrats similaires. Par contre chez un “micro-label” comme le mien […] les contraintes sont quasi inexistantes pour un artiste. » (Tom). On pourra lire dans le dictionnaire que la liberté est une absence de contrainte, la possibilité d’agir selon ses propres choix, et l’indépendance. Or, les contrats proposés par les grandes maisons de disques ne riment pas automatiquement avec cette définition. Le « contrat d’artiste » par exemple, implique pour le.la créateur.rice de céder la totalité de ses droits à la major qui finance tout. Si bien qu’il.elle n’a pas son mot à dire sur des aspects majeurs de son projet musical et de son processus de création (enregistrement, exploitation…). Il en est autrement pour les petits labels DIY : « Nous nous sommes vraiment senti.e.s sans contraintes dans le process de création, […] il est pour nous primordial que le label nous laisse nous exprimer d’une manière libre », affirme Simon de Cosmopaark. Travaillant entre autres avec Howlin’ Banana, il ajoute accorder beaucoup d’importance à la relation de confiance que son groupe peut entretenir avec ses labels.
De la place de l’artiste
Pour pouvoir créer, un.e musicien.ne a besoin de son entière liberté d’expression, l’art étant par essence un moyen de s’exprimer. D’où la nécessité de laisser à l’artiste l’espace de création nécessaire pour penser, ressentir, extérioriser, et en retirer un projet créatif. Un.e artiste est un.e artiste dès lors qu’iel met de sa personne dans la confection et/ou l’interprétation d’une œuvre. Il s’agit ensuite de se frayer un chemin et de trouver sa place dans le monde de la musique. Pour Simon, il faudrait en fait redéfinir ce terme de “place”. Trouver sa place selon lui, ce n’est pas essentiellement “percer” dans la musique et acquérir de la notoriété. C’est plutôt faire ressentir des émotions à son public, « créer un lien avec des personnes et qu’elles ressentent quelque chose en écoutant [leurs] chansons ».
Ainsi, les publics peuvent recevoir la musique et les messages qui leur correspondent et peuvent les faire réfléchir. D’autant plus qu’avec l’essor du numérique et des réseaux sociaux, les langues se délient et la place est assez grande pour accueillir le fruit de l’expression de tous.tes.
Une liberté dont le monde a besoin
Le public n’est pas une entité uniforme, il n’y a pas une voix au nom d’un public, mais aussi de multiples voix pour des publics underground, des subcultures.
Ainsi, les petits labels « indés », en libérant le potentiel créatif des artistes, leur laissent la liberté de s’exprimer entièrement, sans diluer leur talent dans la volonté de faire du profit.
On comprend l’importance de la parité dans les représentations, et de l’intérêt de laisser la liberté aux artistes de trouver leur place pour, aussi peut-être, laisser une chance à leur public de trouver la leur.
Clara Garaud
Photo de Une © Bas van Daalen
Zoom sur :
Les moyens pour se faire connaître en tant que label indépendant
Célébrité sans label, un rêve de labeur, mais réalisable !
Si la signature chez un label de musique est vue comme le grand tournant d’une carrière musicale, elle n’en est pas moins contraignante. Être indépendant, libre musicalement et financièrement fait rêver beaucoup d’artistes… Mais cette aspiration ne rime pas forcément avec notoriété. Pour autant, cette ambition n’est pas impossible, mais comment y parvenir ?
Contacter une structure d’accompagnement musical
À la différence d’un label, les structures vous accompagnent dans votre projet musical (conception intégrale de vos chansons, protection de vos droits d’auteur, travail sur l’image, etc.) il vous reste seulement à diffuser vos productions. Ainsi, ce soutien vous permet de produire des maquettes professionnelles sans avoir besoin d’un label.
Les applications
Il n’est plus nécessaire aujourd’hui de savoir jouer des instruments de musique ou bien de connaître ses cours de solfège par cœur. Des studios en ligne proposent des collections complètes d’instruments ou de Beats pour laisser à votre créativité la place pour se développer.
Une fois enregistré, votre chef-d’œuvre trouve sa place dans la multitude de plateformes de streaming comme Spotify, iTunes, Deezer, YouTube… Vous serez certes loin du top 20 des artistes les plus écoutés dans le mois, mais ces applications vous permettront de vous faire connaître avec les playlists « découvertes de la semaine » ou encore « nouveauté » .
Ça y est, vous avez produit et diffusé vos productions en attendant d’être en tendance YouTube soyez actif !
Les réseaux sociaux
Les réseaux sociaux sont aujourd’hui « the place to be » pour gagner en visibilité et entretenir un lien avec votre communauté. Tenez les informer sur l’avancée de votre travail, vos sorties d’albums, vos concerts… Photos, vidéo, story, live, Instagram et Facebook seront vos alliés. Pour percer avec vos musiques les « Reels » Instagram et l’application Tik-Tok sont faits pour vous. Pour enflammer la communauté internet associer une chorégraphie à votre musique et le tour est joué !
Participer aux tremplins musicaux
Les tremplins sont des concours ouverts à tous les genres musicaux. Le festival Insula laisse la chance à l’artiste sélectionné de se produire en format DJ Set sur la scène principale du festival. Les tremplins musicaux vous permettent de réaliser des nouvelles expériences, mais aussi de décrocher des opportunités. Le tremplin Summer Chance récompense l’artiste vainqueur en le laissant se réaliser sur la scène du V and B Fest’ le samedi 26 août 2023 aux côtés de DJ Snake, Damso et bien d’autres… Et remportera également un accompagnement artistique personnalisé d’une valeur de 5 000€.
Être artiste sans label demande donc de porter de multiples casquettes : image médiatique, gestion des contrats, représentations et créations musicales, etc. Mais si ce projet requiert beaucoup de temps et d’implication, cela ne le rend pas impossible ! Le rappeur français « Rilès » a été découvert grâce à YouTube. De même pour l’américain « Chance the Rapper » aujourd’hui détenteur de trois Grammy Awards. Alors pourquoi pas vous ?!
Mélanie Hervé
Vidéo – Interview de Alice Bruguière
Membre du groupe les Ogres de Barback composé de 4 frères et soeurs musiciens et musiciennes, Alice Bruguière répond à nos questions sur leur label indépendant Irfan, fondé en 2001.
Bastien Grossin