Séries Mania, une aventure aux couleurs internationales
Le vendredi 17 mars marquait le début du festival Séries Mania, un des plus grands festivals européens dédiés aux séries. Le tapis a été déroulé au Nouveau Siècle, à Lille, où ont défilé les équipes des différents projets en compétition, pendant que projections, masterclass et conférences prenaient place dans toute la ville des Flandres. Une occasion en or, et gratuite, pour le public de faire le tour du globe assis dans une salle sombre.
Tapis mauve de Séries Mania. Un endroit de découverte, de rencontres et de réunions où se mélangent producteurs, acteurs, réalisateurs. Ils sont Français, Palestiniens, Israéliens, Grecs, Américains, etc. La compétition internationale du festival permet à de nombreuses nationalités de se retrouver pour la même raison : les séries. Si elles se mélangent sur le tapis, sont-elles un moyen de découvrir au monde qui nous entourent ? Peut-on, par l’écran et ces gens qui s’y dévouent, acquérir une ouverture de l’esprit à l’international ?
Déjà, avant de trouver ses spectateurs, les séries sont un instant de la collaboration et le festival le reflète bien. On y propose, dans la compétition internationale, des mélanges culturels, que ce soit les Gouttes de Dieu, une série franco-américano-japonaise, The Power, américano-anglaise ou encore Red Skies, co-écrite par une équipe israélo-palestinienne. Cette dernière est une des plus marquantes de la sélection, car elle offre une nouvelle vision de la seconde Intifada. À travers les deux protagonistes, Ali et Sa’ar, on perçoit une bride de la division de la guerre et des deux camps dans lesquels ils se retrouvent propulsés. Le conflit est certes sur le terrain mais aussi dans leurs cœurs.
Découvrir l’indécouvrable
Les séries apportent de la connaissance sur le monde. Elles nous transportent vers des inconnues, par l’objectif de la caméra. Milky Way, série grecque, illustre cela. Elle ouvre le bal Séries Mania. Vasilis Kekatos, le réalisateur, y conte une Grèce que l’on ne soupçonne pas : un hameau aux cœurs des montagnes. Les adolescents s’y sentent enfermés par les différences générationnelles et les frontières familiales. Le spectateur est embarqué au-delà de la Grèce qu’elle ou il connaît, celle dont les jeunes lycéennes rêvent. Peut-être est-ce là un des avantages de la série. A travers ce format, on peut traverser le globe et découvrir l’indécouvrable. C’est aussi un voyage interne, par les représentations. Comme Vasilis Kekatos l’explique, lui a grandi dans un village tel et il a vu beaucoup de filles disparaître du jour au lendemain à cause d’une grossesse. Il met cela en scène à travers le personnage de Maria, héroïne de Milky Way. Elle rêve de la grande ville et vie. Dépourvue de choix par son entourage, l’adolescente se retrouve bloquée dans le lieu dont elle a toujours voulu s’émanciper. Chaque série peint un portrait différent mais beaucoup se rassemblent autour d’un point : dire ce qui est tu, montrer ce qui est caché.
La guerre en série ?
Peut-on trouver la note juste pour conter la guerre ? La guerre a longtemps été montrée sur le grand écran mais que récemment appropriée par le petit écran. Cela a été une question posée lors de Séries Mania. Dimanche 19 mars, c’est au Théâtre du Nord que deux journalistes, Florence Aubenas et Pierre Haski, se retrouvent pour discuter de la question. Une chose ressort : le point de vue. C’est une guerre des récits. Comme l’explique Pierre Haski, il y a toujours un point de vue, un focus, et cela se reflète dans les différents extraits de série projetés derrière eux. Sans que cela tourne à la propagande, il est important de savoir qui raconte quoi. Une série occidentale par exemple n’aurait pas le même ton qu’une série malienne, même si elles traitent le même sujet. Cela est le cas de Sentinelles, série française sur le Mali où l’on suit une journaliste, elle-même suivant les troupes françaises sur place. La journaliste Florence Aubenas revient d’ailleurs sur l’attitude de sa consœur à l’écran : « Sur le terrain, l’intérêt n’est pas de poser de questions, […] de le voir, pas de le demander ». On a souvent tendance à représenter un conflit à travers l’armée. Pourtant, les forces militaires ne sont pas représentatives d’un conflit, juste actrices. Si on veut vraiment conter la guerre, il faut se détacher du point de vue militaire.
Cependant, les séries sur la guerre nous permettent ce focus sur un bout de territoire. Elles nous font entrer dans des microcosmes de conflit et représentent l’héritage de couches historiques. Elles prennent le temps là où le cinéma se dépêche, pour ne pas perdre le spectateurs assis dans la salle sombre. Et elles nous permettent de prendre du recul sur des conflits parfois lointains, parfois très proches.
Toutes les informations sur le festival peuvent être retrouvées sur le site https://seriesmania.com
Anouk Joubes.
Deux recommandations de séries présentées au festival Séries Mania
Parmi toutes les séries qui ont été présentées et prétendu à un titre au festival, beaucoup sont venues intégrer ma « To Watch List ». Parmi elles, 2 dont je souhaitais vous parler, car elles font écho à des fait d’actualité et apportent des éléments de réflexion supplémentaires par rapport à des problématiques actuelles, telles que le handicap, les standards de beauté toxiques ou le suicide assisté.
Best Interests:
La série Britannique se divise en 4 épisodes de 25 minutes. Est mise en scène une famille qui se déchire à cause d’un choix extrêmement tortureur qui leur est imposé. La fille de Nicci et Andrew (Michael Sheen, qui a reçu le prix du meilleur acteur à Séries Mania pour ce rôle), Marnie, est atteinte d’une maladie qui menace son pronostic vital. Ses parents vont entrer dans une bataille judiciaire face aux médecins qui estiment qu’il est préférable de laisser Marnie mourir. Une représentation du débat sur la fin de vie à une échelle intime, qui force le spectateur à prendre en compte l’aspect personnel et l’impact émotionnel de ce débat.
Mentiras Pasajeras :
Dans cette comédie espagnole, satire des standards de beauté nocifs et dénoncant les injonctions sociétales à la perfection. Lucia, va bientôt être promue directrice d’une entreprise de beauty tech. C’est sans compter sur la trahison de Santi, qui va mener au renvoi de Lucia, cette dernière à tort accusée d’espionnage industriel. Pour ne pas perdre la face devant sa famille, elle va créer un tissu de mensonges, avec l’aide de sa meilleure amie, chirurgienne esthétique.