Dans un contexte de défiance croissante envers les médias, des journalistes, associations ou des établissements scolaires, multiplient les ateliers d’éducation aux médias. Leur objectif : donner aux citoyens, en particulier aux jeunes, les clés pour mieux comprendre comment l’information est produite, et développer leur esprit critique.
Face à la multiplication des fake news et à l’affluence d’informations non vérifiées sur les réseaux sociaux, ces initiatives se révèlent plus essentielles que jamais. Elles visent non seulement à expliquer le fonctionnement des médias, mais aussi à fournir des outils concrets pour exercer un regard éclairé sur l’actualité. Il est devenu essentiel de maîtriser les mécanismes du journalisme et d’apprendre à vérifier les informations.
L’un des principaux objectifs de ces ateliers d’éducation est d’éclairer sur le métier de journaliste. Ils permettent d’aborder la manière dont sont traités les sujets, dans les règles de déontologie journalistique. La majorité de ces sessions se déroulent en milieu scolaire : pendant deux heures, des journalistes viennent partager leur expérience avec les élèves. Ces interventions sont rendues possibles grâce à des subventions, ou parfois grâce aux financements des établissements eux-mêmes.
Mais ces ateliers ne se limitent pas à expliquer le quotidien des journalistes. Ils offrent aussi des conseils pratiques pour mieux naviguer dans le flot d’informations : Comment différencier une info vérifiée d’un contenu humoristique ou publicitaire ? Comment vérifier une source ? Comment analyser une image ? Ces compétences sont essentielles, à l’ère des fake news et de l’accélération de la désinformation sur les réseaux sociaux.
Développement d’outils pédagogiques originaux
Pour Laurence Gaiffe, responsable de l’éducation aux médias et à l’information de l’ESJ Lille, les sujets abordés lors de ces ateliers sont très diversifiés : « Les groupes et les équipes éducatives choisissent les sujets, qui peuvent porter sur le sport, la culture, les relations filles/garçons ou encore le traitement de faits divers », explique-t-elle.
Pour rendre cet apprentissage plus concret, l’ESJ Lille a développé des outils pédagogiques originaux comme les jeux « Enquête Express » ou « Bouclage Express », ainsi que des vidéos éducatives disponibles sur leur chaîne YouTube. L’objectif est clair : apprendre en faisant. « On amène les participants à choisir des sujets et à les traiter, avec l’aide de journalistes, sous format audio, vidéo, écrit… », ajoute Laurence Gaiffe.

Souvent, les ateliers permettent de faire évoluer la perception des médias chez les participants. « Les premières sessions peuvent révéler une certaine défiance face au métier de journaliste. » Les projets permettent de mieux illustrer la démarche méthodique et rigoureuse que doivent suivre les journalistes. En étant mis dans la peau de reporters, la complexité du métier et ses contraintes sont montrées, ce qui change leur regard sur la profession. « C’est ce que nous constatons dans les formulaires de bilan ».
Pour aller encore plus loin, l’ESJ Lille a lancé une étude en partenariat avec une doctorante de l’Université Catholique de Louvain en Belgique. L’objectif est de mesurer l’impact réel de ces ateliers sur la façon dont les jeunes abordent l’information. Les résultats de cette étude, attendus pour 2026, permettront d’évaluer concrètement les progrès réalisés.
Article de Héloïse Bouzin
En savoir plus : Désinformation et Méfiance, Le Grand Malaise des Médias
Les Français sont de plus en plus méfiants vis-à-vis des médias et des journalistes. Un problème majeur à l’heure où les avis invérifiés et les fake news circulent de toutes parts sur les réseaux sociaux. À l’automne 2024, à l’occasion de la 38ᵉ édition du baromètre La Croix – Verian – La Poste, l’institut de sondage s’est une fois de plus penché sur la défiance face aux médias. Une défiance qui ne cesse de croître, puisque seulement « 32 % des Français pensent que l’on peut avoir confiance dans ce que disent les médias sur les grands sujets d’actualité ».
Désormais, les manières de s’informer ont changé : les gens délaissent les médias traditionnels que sont la télévision, la radio et les journaux au profit des réseaux sociaux. Comme l’indique Vie publique, en France, en 2023, « 62 % des Français s’informent aujourd’hui via les réseaux sociaux ». La méfiance des Français envers les médias les pousse vers ces plateformes, sans que les informations qu’ils consultent soient forcément vérifiées. Et cette tendance ne semble pas s’inverser, puisque le PDG de X, Elon Musk, souhaitait rendre la plateforme « radicalement libre d’expression » lors du rachat de Twitter en 2022. Ce choix implique qu’aucune censure ne soit appliquée à aucun niveau, laissant ainsi la porte ouverte à la désinformation.
En définitive, les médias traditionnels doivent s’adapter en développant davantage de contenu sur les réseaux sociaux pour retrouver la confiance perdue des Français.
Article de Enzo Balmat
Vidéo de Inès Soleau
Crédit photo : Matthieu Durand