Au Zoo de Lille, protéger les animaux passe par l’action collective​

Ouvert en 1950, le zoo de Lille est devenu bien plus qu’une attraction locale : il incarne un enjeu crucial pour le bien-être animal et la conservation des espèces menacées. Mais derrière ses enclos se joue une question systémique : comment protéger durablement la faune alors que les moyens financiers et l’attention de l’État restent limités ?

Depuis dix ans, la mairie engage le zoo dans des transformations régulières, guidées par les standards européens de l’EAZA. Les enclos doivent offrir suffisamment d’espace pour l’exercice et la socialisation, et permettre aux animaux de se retirer à l’abri du public. Ces mesures structurelles ne sont pas accessoires : elles conditionnent la capacité du zoo à devenir un acteur crédible de la conservation et à servir de modèle pour d’autres établissements.

Depuis cinq ans, le zoo finance régulièrement des associations engagées pour la protection de la faune, notamment à travers l’organisation des Journées de la conservation, programmées cette année les 20 et 21 septembre. Lors de cet événement, les visiteurs sont invités à effectuer un don libre, dont les fonds sont reversés aux associations présentes.

Le binturong dans son enclos au zoo de Lille.

Le binturong dans son enclos au zoo de Lille.

Chaque année, environ 2000 euros sont ainsi attribués à chaque structure partenaire, parmi lesquelles Arctictis Binturong Conservation, fondée par Pauline Kayser, que nous avons pu rencontrer. Elle protège le binturong, un mammifère discret d’Asie du Sud-Est menacé par la destruction de son habitat.

Lors de notre rencontre, Pauline nous a détaillé ses actions sur le terrain : suivi scientifique des populations, formation des habitants locaux et campagnes de sensibilisation auprès des écoles. 

«Mieux connaître l’animal, c’est déjà commencer à le protéger », a-t-elle expliqué, soulignant que la sensibilisation et la recherche scientifique sont complémentaires.
Cette rencontre illustre l’importance d’une approche plus globale : la protection animale ne se limite pas à la captation de l’attention du public. Elle nécessite des synergies entre institutions locales, associations et programmes internationaux, et une intervention sur les causes profondes des menaces : déforestation, manque de financement et manque de formation. Le zoo de Lille, à travers ses partenariats et ses campagnes éducatives, tente de créer ces ponts et d’agir simultanément sur plusieurs leviers.

Parallèlement, le zoo participe à des campagnes européennes, comme Vietnamazing, qui mettent en lumière la biodiversité vietnamienne et les dangers qui la menacent. Ces initiatives démontrent que sensibilisation et action concrète doivent aller de pair : éduquer le public crée des citoyens engagés, mobilise des ressources pour protéger la biodiversité et permet d’influencer positivement les comportements à long terme.
Pourtant, la route reste longue. 

La fermeture des zoos ne résout rien : la priorité doit être de les transformer en sanctuaires et centres de conservation efficaces. Mais cela ne suffira pas si les législateurs et pouvoirs publics continuent de reléguer au second plan les enjeux climatiques et de protection animale. Pour que la conservation devienne réellement durable, ces questions doivent devenir des priorités politiques, avec des moyens adaptés, un cadre légal renforcé et des plans d’action ambitieux, et cela doit inclure une vraie stratégie de financement, de suivi scientifique et d’éducation des citoyens.

Le zoo de Lille illustre déjà une approche systémique et positive, mais il rappelle que
l’engagement des citoyens, des associations et des institutions doit s’accompagner d’une volonté politique forte et d’un suivi rigoureux. Sans cette mobilisation collective et cette priorité donnée par les pouvoirs publics, la biodiversité continuera de se fragiliser, et la protection animale restera insuffisante face à l’urgence climatique, menaçant des générations d’espèces encore inconnues et vulnérables. Ces enjeux sont cruciaux et nécessitent une action immédiate, structurée et concertée au plus haut niveau politique.

Léane Gouget

crédit photo : Zoé Paris

Zoom sur le binturong : le mammifère au parfum de pop-corn

Les 17 et 18 septembre, le zoo de Lille a consacré un week-end spécial à la conservation du binturong, une espèce encore méconnue du grand public mais classée “vulnérable” par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). En collaboration avec l’association Zooalil, l’événement avait pour objectif de sensibiliser les visiteurs aux menaces qui pèsent sur ce mammifère d’Asie du Sud-Est et sur les actions menées pour sa protection.

Reconnaissable à sa silhouette massive et à sa longue queue préhensile, le binturong occupe les forêts tropicales d’Inde, du Népal, du Bangladesh, du Bhoutan ou encore du Yunnan chinois. Malgré une morphologie évoquant un croisement entre un félin et un petit ursidé, il s’agit en réalité d’un viverridé, un groupe proche des genettes ou des civettes. Son mode de déplacement révèle une adaptation fine au milieu arboré. Excellent grimpeur mais incapable de sauter d’un arbre à l’autre en raison de son poids, il doit régulièrement redescendre au sol pour poursuivre sa progression.

Principalement frugivore bien que classé parmi les carnivores, le binturong adopte un régime alimentaire flexible incluant fruits, œufs, insectes ou petits vertébrés. Cette polyvalence ne suffit toutefois pas à compenser la dégradation rapide de son habitat. La déforestation, combinée au braconnage pour sa viande, sa fourrure ou certains usages en médecine traditionnelle, contribue aujourd’hui à la diminution de ses populations.

Face à ce constat, plusieurs organisations tentent d’améliorer les connaissances sur l’espèce. L’association Arctictis Binturong Conservation mène notamment des recherches de terrain pour mieux comprendre son écologie et élaborer des programmes de protection adaptés.

Reste à savoir si ces efforts permettront réellement de freiner le déclin du binturong, une espèce dont l’avenir se décide loin des regards, dans les forêts d’Asie du Sud-Est.

 Eva Duarte

vidéo réalisée par Camille Allisy.

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