Kangourous Câlins : une garderie destinée aux parents étudiants au centre d’un campus
Sur le campus de Pont-de-Bois, la multi crèche « Kangourous Câlins » vient en aide à une quarantaine de familles en accueillant jusqu’à 35 enfants par jour. Cette initiative, réservée au personnel de la faculté et aux étudiants de l’Université de Lille, permet à ces derniers de trouver un équilibre entre vie familiale et vie étudiante.
Située au sein du campus juste à côté de la bibliothèque universitaire, ce n’est pas un bâtiment académique mais bel et bien une crèche qui se trouve dans un espace on ne peut plus étudiant, à mille lieux de ce qu’on s’imagine d’un établissement destiné à accueillir des enfants.
Unique en son genre, Kangourous Câlins serait la seule crèche de France à être localisée dans une université. Un critère important puisque cette localisation constitue un lieu stratégique pour les usagers, en particulier pour les parents étudiants qui ne sont pas toujours véhiculés. En effet, une fois l’enfant déposé, le parent est déjà sur place pour aller en cours. Ainsi, ce système est à la fois un gain de temps, un gain financier et un gain d’énergie.
Accompagner les étudiants dans la difficulté de la parentalité
Si Kangourous Câlins est particulièrement adapté aux parents étudiants, c’est avant tout parce que les inscrits à l’université de Lille ont bien plus de chance de trouver une place dans cette crèche que dans une autre, dans la mesure où cette structure leur est spécifiquement destinée comme nous l’explique Aurore Gontier, présidente de Kangourous Câlins depuis un peu plus d’un an : « Ces étudiants ont la quasi-certitude d’obtenir une place, bien plus facilement qu’en crèche municipale. » Effectivement, la moitié des enfants gardés à Kangourous Câlins sont des enfants d’étudiants tandis que l’autre moitié correspond à des enfants du personnel de l’université. D’autant qu’en France, les places en garderie sont chères. Selon le Haut Conseil de l’enfance et de la famille, une baisse de 50 000 places a été constatée dans les crèches collectives entre 2017 et 2020, et le Conseil national de la refondation dédié à la petite enfance estime qu’il manque encore 200 000 places pour répondre aux besoins.
Un manque de personnel malgré une baisse de la natalité
En ce qui concerne le taux de fécondité, le cas de la France est considéré comme alarmant d’après le gouvernement, puisqu’il n’a jamais été aussi bas depuis 1946. Pourtant, les infrastructures de la petite enfance peinent plus que jamais à trouver de la main d’œuvre ce qui impacte automatiquement la capacité des jeunes parents à trouver une place en crèche.
En d’autres termes, l’Etat veut relancer le taux de naissance alors même qu’il ne semble pas prêt à y faire face. La priorité alors à régler est le problème du manque d’attractivité du métier d’auxiliaire de puériculture en ouvrant des centres de formation mais surtout en revalorisant les salaires. Dans un second temps, il faudrait s’occuper des conséquences de la baisse de la natalité sur les finances publiques et la part de population active en voyant plus large qu’un réarmement démographique. En effet, le recours aux seniors ou à l’immigration sont de très bons moyens pour augmenter la population active.
Dans le cas de Kangourous Câlins, ce qui plaît aux familles étudiantes c’est l’accompagnement que leur assurent les professionnels : la crèche leur propose des « places d’urgence » au cas où ils ont besoin d’une garde rapide de manière ponctuelle, et elle fait preuve d’une flexibilité en fonction des nécessités. L’environnement affectif permet aussi de fournir un cadre rassurant aux parents, par la proximité du lieu de la garderie mais aussi du fait des différentes activités qui rythment la vie de la crèche, raconte Aurore Gontier. « On a eu un carnaval, une fête de Noël avec un spectacle de marionnettes et une fête de fin d’année qui marque la fin de la crèche pour les plus grands qui rentrent à l’école ».
Manque d’investissement des familles étudiantes
Cependant, Kangourous Câlins reste avant tout une crèche associative qui est en partie faite pour les étudiants, certes, mais aussi par les étudiants. De ce fait, chaque acteur doit s’investir dans son bon développement, que ce soit l’équipe de direction tout comme les adhérents tels que les étudiants.
Pourtant, il n’est pas rare de rencontrer certains manquements au règlement de la part de ces derniers. Par exemple, certains parents ne déposent pas leur enfant le matin sans prévenir de leur absence, ce qui entraîne du gaspillage au niveau du nombre de repas ou une place de perdue qui aurait pu être donnée à d’autres. Une situation additionnée au manque de motivation de nombre de parents étudiants, Aurore Gontier déplore : « c’est compliqué de motiver les familles étudiantes car une fois rentré à la maison, l’étudiant a encore des choses à faire […]. Dans les projets, il y a un taux d’absentéisme conséquent alors que chacun peut apporter sa pierre à l’édifice. »
Nathan Kouamelan
Crédit photos: Anoushka Trajkovic
Renoncer temporairement à la parentalité pour un avenir meilleur ?
Les défis auxquels font face les étudiants sont d’une telle ampleur que certains qui avaient pour projet d’avoir des enfants jeunes ont dû y renoncer.
C’est le cas de Martha et Matthieu qui ont attendu d’avoir fini leurs études pour en avoir.
- Quels sont les principaux facteurs qui vont ont empêché d'être parents étudiants ?
Matthieu: Notre emploi du temps et notre manque de moyens financiers. Étudiant à Science Po et ma compagne en fac de droit, nous avions très peu de temps à consacrer à une vie de famille et nous ne roulions pas sur l’or, je faisais des intérims mais ce n’était pas suffisant pour couvrir les dépenses d’un bébé.
- Regrettez vous votre décision, pensez vous que ça vous a apporté quelque chose de prendre votre temps?
Martha: Malgré le fait que nous désirions donner la vie en début de vingtaine, je pense que nous recherchions une complicité par notre faible écart d’âge mais je ne pense pas qu’on aurait pu faire passer les enfants en priorité à cause des études. Aujourd’hui, nous avons toutes les ressources nécessaires pour être présents pour eux, que ça soit financièrement ou au niveau du temps.
- Était ce difficile à gérer ? Avez vous ressenti de la frustration?
Martha : Oui c’est certain, d’un côté nous trouvions ça injuste de ne pas pouvoir se créer un foyer familial alors que nous étions un couple déjà soudé et établi. C’était aussi difficile de devoir gérer la contraception car nous ne souhaitions pas avorter, mais si ça n’avait pas fonctionné, nous aurions gardé un enfant sans moyens, ce qui nous aurais tous mis en difficulté.
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