Le jeudi 13 mars 2025, s’est déroulée « La journée des opportunités » au Bistrot St-So. Organisée par la Métropole Européenne de Lille, elle a pour principe d’accompagner les jeunes entrepreneurs, notamment étudiants, à faire éclore leur projet en leur fournissant les ressources pour faire face aux démarches administratives et aux difficultés à trouver des financements dans un secteur réservé aux privilégiés.
« C’est compliqué au niveau de la création d’entreprises, il y a beaucoup de documents à remplir, il faut déclarer.. c’est pleins de trucs à paramétrer c’est un peu compliqué. » Ici, Elias, 18 ans, évoque avec nous les fiches de déclaration à remplir et les complexités juridiques quand on veut lancer son entreprise. C’est pour cela qu’il est venu au Bazar St-so : chercher un accompagnement pour monter sa structure. Son projet : créer une intelligence artificielle qu’il rendra accessible sur une application dédiée à la communication digitale de différents types de structures. Les jeunes entrepreneurs ont souvent des études à gérer à côté. Certains n’ont donc pas les mêmes moyens et les mêmes ressources que des personnes plus âgées et expérimentées.
Elias, nous partage un des conseils récurrents qu’il a reçu : prendre son temps. « Parce que c’est vrai que je voulais foncer tête baissée. » Prendre le temps, c’est avancer pas à pas dans l’univers du business au sein duquel on peut se perdre si on ne maîtrise pas les codes d’une société vectrice de reproductions sociales. Des reproductions ici incarnées par exemple dans les contacts et les réseaux déjà présents au sein des familles et figées dans un monde encore très fermé et masculin.
Une opportunité pour chaque projet
C’est de ce constat que la MEL est partie comme nous l’explique Magalie, en charge de l’organisation de la journée : le manque d’un événement pour réunir des acteurs qui participent à « l’écosystème de la création de d’entreprise ». Aude, de Lille Avenir entrepreneuriat, explique qu’ils accompagnent ces jeunes de manière personnalisée dans les premières étapes de leur projet. Ils les aident à comprendre l’environnement qui accompagne la naissance des idées et à découvrir ce monde de l’entreprenariat.

Ce qui prime dans le monde de la création d’entreprise se résume simplement : les incubateurs. Ils aident à transformer les idées en un projet concret, nous expliquant comment ces créateurs en herbe peuvent se diriger dans ce monde entrepreneurial. Mais encore une fois, ces jeunes doivent faire le premier pas, savoir vers qui se diriger et de quelle manière.
La visibilité, suivie de près par la question du financement et la complexité des démarches administratives figurent parmi les problèmes récurrents de ces jeunes. Pour beaucoup c’est une exploration en terre inconnue.
“J’ai une idée je vais voir qui ?”
Gabriel, 22 ans, fondateur de l’application « Recepta » a eu quant à lui, 3 minutes top chrono pour pitcher son projet devant les jurés. S’il remporte le premier prix, il lui permettra d’être aidé à hauteur de 1500€ pour développer son application qui aide pâtissiers, boulangers ou encore restaurateurs dans l’organisation de leur enseigne à l’aide de fiches techniques. Il est donc déjà à un stade avancé dans son projet, grâce à certains financements qu’il a obtenu avec « Pépite », un réseau national qui permet de développer son entreprise tout en s’assurant un diplôme universitaire.

Ainsi, cette journée, qui a la volonté de vouloir aider les étudiants à pouvoir comprendre comment concrétiser leur projet, s’inscrit aussi dans un enjeu plus global qui bénéficie à la MEL et son activité sur le long terme. L’idée est donc de garder ces nouveaux entrepreneurs sur son territoire afin d’enrichir son économie et participer à la création d’emplois.
Cet événement, porté par une envie de réussite, tente de déconstruire cette image inaccessible de l’entreprenariat en répondant à une question : « j’ai une idée, je vais voir qui ? ». Après tout, comme le dit Magalie, « l’entreprenariat c’est avant tout une prise d’initiatives ».
Vous êtes intéressés par ce sujet ou vous souhaitez en savoir davantage pour vous aussi vous lancer ? Voici quelques structures qui peuvent vous aider :
Incubateur et Accélérateur de startup | EuraTechnologies
Créateurs d’entreprise – Lille Avenirs
Eva Tolosa-Joas
Crédits photos : Bleuenn Galmiche–Neveu
Édito : A quand la fin du mythe de la « start-up nation » ?
« A à peine 20 ans, dans son piètre appartement étudiant, seul et isolé, ce génie a développé l’idée du siècle et bouleversé à jamais nos vies. » Cette histoire, c’est celle que nous raconte Steve Jobs, Mark Zuckerberg ou Xavier Niel. Mais c’est surtout celle d’un mythe : celui de l’entrepreneur.
L’idée d’un génie, partant de rien et prenant tous les risques et changeant le monde par ces innovations révolutionnaires naît au début du 19e siècle aux États-Unis. Nation de la méritocratie, l’idée d’un Américain méritant par son travail et ayant une place réservée dans la société en fonction de ses efforts est parfaitement incarnée par la figure de l’entrepreneur.
Histoire irriguant nos idéaux, et de plus en plus vendue via les réseaux sociaux comme la solution à une vie prospère, il faut pourtant déconstruire ce mythe ou du moins chercher à comprendre ce qui se cache derrière.
Croire au self-made man, c’est nier l’existence de privilèges profonds mais aussi tous les facteurs extérieurs. Dans la réalité derrière chaque entreprise il y a un travail de groupe, même si, selon le chercheur Anthony Galluzzo, l’objectif est justement de masquer cet aspect collectif. Paroxysme de l’individualisme, la start-up participe activement à justifier une société capitaliste inégalitaire : ceux qui réussissent ont les capitaux, pas les autres qui ne feraient rien.
Bien caché derrière cette idée de réussir par ses propres moyens, se camoufle aussi le large financement public. Pourtant, pas d’Iphone ou de Tesla sans les agences d’État américaines.
Derrière ce mythe de l’entrepreneur, c’est tout le capitalisme et ces valeurs qu’on légitime et perpétue. Nécessaire, ce postulat d’une figure de l’innovateur contre le capitaliste moralise et justifie notre système économique et adopte une véritable fonction idéologique.
Charlotte Chimier
Vidéo : Nina Attalli
Souvent perçu comme un milieu fermé et difficile d’accès, l’entrepreneuriat l’est encore plus pour les femmes envers lesquelles un sexisme s’ajoute souvent aux difficultés financières et matérielles. Mais attention ! Le milieu se féminise malgré tout puisqu’en 2021, les femmes représentaient 43% des créateur.ices d’entreprises en France. C’est le cas de Nolwenn que nous rencontrons à l’occasion de la Journée des opportunités.