La précarité étudiante survit à la crise sanitaire
Avec la crise sanitaire, la situation financière des étudiants français s’aggrave. De plus en plus de jeunes se retrouvent en difficulté pour acheter de la nourriture. Alors, des organisations ainsi que des mouvements se sont mis en place afin de leur venir en aide.
Files d’attente devant les restaurants universitaires, denrées alimentaires insuffisantes, impossibilité de trouver un job étudiant…Tous ces éléments symbolisent la difficulté financière des étudiants français aujourd’hui. Cette peine à laquelle les jeunes doivent faire face ne date pas d’hier, mais la crise sanitaire n’a fait qu’empirer la situation.
En effet, Différents mouvements ont alors émergé cette année afin de soutenir ces étudiants dans le besoin. Parmi eux, #1CABASPOUR1ETUDIANT dont nous avons rencontré la cofondatrice Marion Dolizy Galzy.
Une initiative en temps de crise
Marion Dolizy Galzy, lyonnaise de 50 ans, a cocréé en février 2021 #1CABASPOUR1ETUDIANT, une initiative solidaire bénévole permettant de mettre en lien des étudiants dans le besoin et des citoyens ayant envie de les aider. Le parrain s’engage alors à offrir régulièrement un sac de course à son filleul.
« Cela faisait plusieurs semaines qu’on voyait des reportages sur les étudiants faisant la queue aux distributions alimentaires », explique Marion. « Le 3 février, je suis au supermarché en rentrant du boulot, on est en couvre feu 18h, il est 17h45. Je croise une jeune fille calculant le montant de ses courses et reposant un paquet de sucre. Je vais à la caisse et je me dis “Zut, j’aurais pu lui proposer discrètement de lui offrir ses courses“. En en discutant avec mon conjoint, je me suis dit que je dois pas être la seule à vouloir aider. Le lendemain, j’en discute avec une de mes amies, Anne, avec qui j’ai ensuite créé #1CABASPOUR1ETUDIANT. »
Ce projet était personnel et local pour les deux créatrices. En voyant l’ampleur que l’initiative a prise, elles ont créé un site, puis des pages sur les réseaux sociaux. #1CABASPOUR1ETUDIANT a ensuite été projeté sur la scène médiatique lorsque Marion a commenté un tweet de Médiavenir, que le compte a retweeté.
Marion et Anne ont voulu créé quelque chose de complémentaire. Un dispositif permettant la personnalisation du besoin du filleul. Marion explique que « des étudiants ont des allergies, et aux distributions alimentaires ils n’ont pas le choix, ils prennent ce qu’on leur donne. » #1CABASPOUR1ETUDIANT permet de répondre à ce problème, notamment.
Plus de 1700 étudiants sont aidés par cette initiative et des inscriptions continuent d’arriver tous les jours.
Faire revivre le lien social
Au delà d’être une aide alimentaire, #1CABASPOUR1ETUDIANT, c’est aussi la création de lien social.
De nombreux couples parrain/filleul profitent de cette rencontre pour discuter ou déjeuner ensemble. Lorsque deux personnes sont affiliées, elles reçoivent toutes les deux un mail mais seul le parrain a les coordonnées du filleul. Il arrive qu’une première liste de courses soit établie lors d’un premier échange au téléphone.
“En en discutant avec mon conjoint, je me suis dit que je dois pas être la seule à vouloir aider”
Parfois les listes sont plus précises, ce qui peut surprendre. Mais, « ce n’est pas parce qu’on est dans la nécessité qu’on a pas le droit d’avoir des demandes et des envies », explique Marion. « On ne cherche pas des livreurs de pâtes et de riz. »
De fabuleuses histoires résultent de ses rencontres. Des parrains aident leurs filleuls à trouver des stages, leurs paient des billets de train pour aller voir leurs parents… Une marraine a même accueilli sa filleule chez elle après avoir découvert l’insalubrité de sa résidence étudiante et l’a aidée à trouver un logement. Des parrains disent avoir l’impression d’avoir un membre de la famille en plus. La santé mentale des étudiants est aussi bien améliorée par la nourriture qui leur est offerte que par l’intérêt et l’affection que les parrains/marraines leur fournissent.
Insuffisance et recherche de parrains
En cette rentrée 2021, beaucoup d’étudiants sont inscrits, mais moins de parrains sont volontaires. Marion explique ce manque par le fait qu’avant la crise sanitaire « déjà 1 étudiant sur 5 vivait sous le seuil de pauvreté, c’est-à-dire 500 000 étudiants en France. Il y avait déjà un drame et aujourd’hui, c’est 560 000 étudiants qui ne peuvent pas boucler leur budget ».
« Pourquoi vous existez encore si la crise est finie ? », « Les étudiants ont qu’à bosser », « Que font leurs parents ? ». Dans un thread Twitter, Marion répond à ces questions en mettant en avant la hausse de demande dans les distributions alimentaires, la hausse du coût des loyers et le manque de demande de jobs étudiants souples comme le baby-sitting et le soutien scolaire lié à la hausse des parents en télé-travail.
#1CABASPOUR1ETUDIANT sensibilise au parrainage via leurs réseaux sociaux, via des établissements scolaires supérieurs, et aussi grâce à des entreprises donatrices.
« On va continuer », conclut Marion. L’initiative a besoin de parrains, de dons et de représentation médiatique.
Si vous souhaitez soutenir #1CABASPOUR1ETUDIANT, vous trouverez toutes les informations nécessaires sur 1cabaspour1etudiant.fr, ainsi que sur Instagram (@1cabaspour1etudiant), Twitter (@1cabas1etudiant) et Linkedin (1CABASPOUR1ETUDIANT).
Le Ch'ti panier, quésaco?
Afin d’en apprendre plus sur cette lutte de la précarité étudiante, le ch’ti panier est aller interviewer Juliette Paco volontaire responsable des ch’timis paniers et Lamine Rahmouni. Vidéo réalisée par Axelle Dusart.
ZOOM
La précarité vue sous un autre angle associatif
Quelles sont vos revendications ?
« Concernant la précarité étudiante, ce qu’on dit à l’UNEF c’est qu’elle existait bien sûr avant la crise sanitaire, mais qu’elle a été totalement accentuée par les confinements, que les étudiants la ressentaient d’autant plus. Et l’inaction du gouvernement face à ça, le fait de fermer les facs délibérément sans investir pour avoir plus de profs, plus de salles, et un vrai protocole sanitaire, mais juste dire rentrez chez vous, c’est un choix de ne pas investir dans la jeunesse, de ne pas mettre les moyens là où il faudrait, et donc de les laisser exposés à une précarité très forte. Face à ça on avait lutté l’année dernière pour un retour en présentiel ave un vrai protocole qui tenait debout. On a aussi lutté pour l’exonération des loyers en cité-U notamment à la fin de l’année scolaire 2019-2020. On a aussi lutté sur la question du repas à un euro par exemple, au Crous pour tous, pas juste pour les boursiers, que ça soit une mesure étendue, on a gagné sur ça l’année dernière et maintenant le gouvernement est revenu sur cette histoire de repas à un euro à la rentrée. »
Quelles actions menez vous et comment?
« Alors l’année dernière la situation était particulière parce qu’il y avait très peu d’étudiants sur les facs mais ça ne nous a pas empêchés de toujours chercher à rassembler les étudiants, on a quand même mobilisé 200 étudiants le 16 mars pour une manifestation. On a aussi fait beaucoup d’assemblée générale, bon bah voilà ça montrait que le sujet de la précarité et les attaques qui visent à nous précariser, nous étudiants, nous a fait réagir. On a cherché à avoir un mouvement important évidemment aussi pour aller discuter avec les étudiants, les inciter à se mobiliser etc. C’était assez intéressant et important. Il faut un mouvement d’ensemble. Une réponse collective et massive des étudiants pour se mobiliser sur ces questions-là. Parce qu’en fait c’est en imposant un rapport de force important, c’est en étant des centaines, des milliers à se mobiliser dans la rue, en assemblée générale, dans des rassemblements sur les facs, à porter les revendications qu’on a qu’on pourra gagner quelque chose, c’est par le rapport de force que la situation évolue et c’est absolument pas en donnant des crédits au gouvernement comme ça alors qu’en fait ils ont jamais rien fait leur but c’est absolument pas résoudre la précarité étudiante mais de faire des polémiques stériles sur un prétendu islamo-gauchisme, des polémiques et des argumentaires qui sont dignes de l’extrême-droite. C’est par la force des étudiants, par leur nombre, par leur mobilisation, par leur détermination qu’on pourra obtenir des choses et qu’on pense que ça pourra se débloquer. »
Propos recueillis par Léa Zeru le 18 octobre 2021.
Si vous souhaitez soutenir #1CABASPOUR1ETUDIANT, vous trouverez toutes les informations nécessaires sur 1cabaspour1etudiant.fr, ainsi que sur Instagram, Twitter et Linkedin.
Fantine Descard.