« Avant on tissait du tissu, aujourd’hui on tisse du lien » raconte Dimitri Broders, pilote du projet de l’association des Manufactures Tissel à Roubaix. Au cours d’une visite, il nous présente ce nouveau projet de collaboration entre des entreprises s’inscrivant dans un modèle d’économie circulaire et souhaitant proposer une nouvelle façon de travailler ensemble.
Débuté en septembre dernier et pour une durée de minimum dix-huit mois, l’association copilote le projet avec la mairie en investissant les locaux de cette ancienne usine textile datant du XIXe siècle. Elle a pour principale mission d’aider les entreprises à se développer de manière responsable en se basant sur le modèle de l’économie des « 3R ». Premièrement, Réduire, les émissions polluantes, en se basant notamment sur l’éco-conception. Ensuite, Réutiliser, en favorisant la seconde main, et enfin Recycler.
Un lieu créé pour ses acteurs
Si l’objectif est de relancer une activité industrielle à Roubaix, ce lieu s’adresse aux entreprises, un « B to B », c’est-à-dire du business to business. Ici, lorsqu’on intègre le lieu, on ne loue pas simplement un bâtiment, on adhère véritablement à un projet collectif. On compte aujourd’hui une vingtaine de personnes travaillant sur ce site tout récent, mais Dimitri Broders affirme son optimisme en espérant jusqu’à 200 personnes d’ici 5 ans.

L’économie de demain, c’est faire les choses ensemble
Un espace de coworking est en construction pour permettre d’accueillir des entreprises extérieures, les inspirer, et créer avant tout une « communauté apprenante ».
Le but est aussi de « créer des rencontres qui n’auraient pas lieu en dehors de ce cadre », ce qui est l’âme même de ce lieu. L’ancienne usine est aussi située dans un des quartiers prioritaires de la ville. Ainsi, elle souhaite s’ouvrir aux habitants du quartier, en leur proposant un emploi en son sein ou bien des services à leur destination.
Dimitri Broders nous parle au détour d’un couloir de l’idée d’un « repair-café » qui pourrait proposer aux habitants des environs de venir faire réparer leurs appareils électro-ménagers ou autres affaires abîmées.
L’idée dans ce projet est d’aller à contre-courant de la tendance depuis 2020 à privilégier le télétravail plutôt que le travail collectif dans un même lieu. Selon les chiffres de Statista, en 2017, seulement 25% des salariés français travaillaient à distance occasionnellement ou régulièrement, contre 36% en 2022. Dans un lieu où l’innovation est visée, il semble essentiel de maintenir le lien entre les acteurs et encourager les entreprises à rester dans la métropole française. Cela permet avant tout de créer de l’emploi pour les habitants de la région, mais aussi de développer un savoir-faire et de nouvelles manières d’aborder l’entreprenariat de façon plus éthique et écologique.
Des projets pour l'avenir
L’association déborde d’idées à ce sujet. Successivement, Dimitri Broders visualise un restaurant pour réunir toutes les personnes qui travaillent ici, pourquoi pas un espace séminaire dans ce coin du bâtiment pour accueillir des entreprises qui souhaiteraient s’inspirer de ce modèle d’économie circulaire… « Une communauté apprenante, c’est s’enrichir les uns les autres et pour ça, il faut se retrouver à des endroits. »
Rendez-vous alors dans quelques mois pour constater l’avancée prometteuse de ce projet collectif, inspirant et qui donne avant tout espoir dans l’économie de demain.
Ambre Padiolleau
Zoom sur le CFA
Apprendre au cœur de Tissel
« S’enrichir les uns les autres » est l’une des règles d’or de l’association Tissel. Un mantra auquel le CFA (Centre de Formation d’Apprentis) de Roubaix a su s’associer.
Depuis la rentrée, une centaine d’apprentis suivent leur formation dans les locaux de Tissel.
Interessé par par cette « communauté apprenante« , le CFA de Roubaix a contacté l’association pour se joindre à elle, explique Dimitri Boders. C’est maintenant l’un des acteurs principaux du site.
Les étudiants suivent une formation dans les filières de la peinture ou du sol, des secteurs qui sont en tension. Un vaste espace leur est dédié pour qu’ils puissent s’entraîner et une partie des matériaux dont ils ont besoin est récupérée des autres entreprises.
Pour ce CFA, Tissel est un endroit stratégique. Être au cœur de ce projet permet aux apprentis de rencontrer des acteurs de l’économie circulaire et durable. Ils pourront par la suite faire perdurer ce modèle économique écologique. Leur connaissance de celui-ci favorisera aussi leur insertion professionnelle.
Le centre a pour projet de créer une formation d’isolation par l’extérieur, l’énergie étant un enjeu majeur de notre siècle. Celle-ci serait la première en France.
L’ambition est de devenir un CFA « fer de lance ». Être le premier à avoir intégré une économie circulaire lui permet d’avoir une longueur d’avance sur les autres centres de formation, qui pourront à leur tour s’ancrer dans ce type de réseau d’avenir.
Johanne Prats