L’accueil des migrants dans les Hauts-de-France : l’histoire d’une mobilisation fructueuse
Connaissez-vous la fable du colibri ? C’est l’histoire d’une forêt qui prend feu en laissant les animaux impuissants face au désastre. Tout en sachant qu’il ne peut y arriver seul, le colibri s’active à chercher quelques gouttes d’eau pour éteindre le feu. Le plus important pour lui étant de « faire sa part ». Depuis 2014, la crise migratoire ne cesse de s’empirer et à l’instar du colibri, des femmes et des hommes dans les Hauts-de-France s’efforcent d’apporter leur aide aux migrants.
Rappel des faits : dans les années 2010, l’Europe et l’Asie notamment doivent gérer les importants mouvements des populations obligées de fuir en raison de l’instabilité politique et de la guerre dans leurs pays. Cela touche notamment les Syriens victimes des conflits actuels au Moyen-Orient. Il est aussi question de Kurdes apatrides qui fuient l’oppression en Turquie et en Irak. Dans les Hauts-de-France on retrouve aussi quelques Pakistanais, Afghans et Soudanais.
Loin de pouvoir peser sur les politiques internationales, certaines associations des Hauts-de-France se mobilisent pour agir à leur échelle comme à Grande-Synthe, une ville située à quelques kilomètres de Dunkerque. Cette commune est depuis quelques années le lieu de rassemblement de centaines de migrants dont le nombre ne cesse d’augmenter. Ici, ce sont principalement des Kurdes qui vivent à proximité du lac du Puythouck dans des tentes insalubres, souvent détruites par les CRS pour faire évacuer les lieux (6 interventions en 5 mois).
Mais cela, c’est sans compter sur l’intervention du maire de Grande-Synthe, Damien Carême. L’homme qui a attaqué l’État pour « inaction » a pris la décision pendant la période hivernale de mobiliser le gymnase et des places en CAES (centre d’hébergement). En créant de petits espaces pour accueillir, il met en lumière « ce qui marche » pour gérer sans frictions les migrants, les protéger du froid mais aussi, des tensions liés à la situation et aux passeurs. Il faut noter que les migrants ne souhaitent pas s’établir ici, ils considèrent l’Angleterre comme un Eldorado. Et cela, malgré les avertissements de migrants ayant réussi la traversée, qui désignent la situation anglaise comme pire que celle du Puythouck.
Découle de cette politique une aide considérable pour les associations et pour chaque bénévole qui souhaitent agir. C’est le cas pour l’association ALEDS qui défend l’idée que chacun peut agir à son échelle. Comme le dit la présidente de l’association, Keltoume Chagar : « Il faut mettre en application la fable du colibri, tout le monde peut faire sa part. » Les bénévoles de l’association se réunissent une fois toutes les deux semaines sur Lille pour cuisiner un repas chaud et préparer des colis alimentaires. Les bénévoles qui partent rencontrer les migrants à Grande-Synthe peuvent alors profiter des dispositifs mis en place par le maire Damien Carême. Et cela, au moins pendant l’hiver, au terme duquel les migrants sont appelés à retourner au Puythouck.
Pour comprendre comment la mobilisation de chacun constitue une réponse dans la crise migratoire, voici l’exemple d’une journée d’action avec l’association ALEDS.
La réponse à l’accueil des migrants dans les Hauts-de-France se fait par la mobilisation d’acteurs divers. Le schéma se reproduit aussi à Angres : l’Église de la ville accueille des migrants soudanais qui dorment dans les bois et les associations viennent à leur rencontre délivrer des repas, des couvertures et autres.
Pour ceux qui souhaitent agir, c’est donc tout à fait possible. Il ne s’agit pas de résoudre un conflit géopolitique mais d’intervenir ensemble et chacun à son échelle.
Ilies Sidlakhdar
Hors cadre
« L’arme la plus forte c’est le bouche à oreille »
Sofiane, 22 ans, étudiant en troisième année de management et entrepreneuriat n’est pas un jeune comme les autres. Après avoir découvert l’association Aleds et contribué à des actes de bénévolat à leurs côtés, Sofiane a le déclic. Pour lui « une assoc’ c’est difficile d’accès, ça touche un public restreint ». Il décide alors de se lancer dans des collectes spontanées, pour faire marcher son réseau. Il intègre donc ses proches dans les actions qu’il mène, l’objectif étant d’amasser de nombreux dons pour les céder ensuite à des associations qui se chargeront de la redistribution.
Sofiane, qui agit hors des sentiers battus, est à l’initiative de nombreuses récoltes de vêtements destinées aux migrants. Il communique à travers réseaux sociaux, carnet d’adresse et flyers pour lancer des appels aux dons. De Valenciennes à Lille en passant par Dunkerque, Sofiane roule ensuite d’un bout à l’autre des Hauts-de-France pour réunir un maximum de biens. Pour lui « les montagnes sont faites de petits cailloux », une manière de dire que si chacun donnait un peu de son temps, même en dehors d’une structure associative, il serait possible d’inverser rapidement la tendance.
Salomé Laurent