Le Secours populaire de Lomme, reflet d’une aide humanitaire plus que jamais indispensable
Depuis un an maintenant, la pandémie de Covid-19 a conduit un nombre record de personnes dans une situation de pauvreté. Là où les milliards débloqués par l’Etat ne suffisent plus, l’aide humanitaire reste parfois la seule solution. C’est le cas à Lomme où le Secours populaire s’adapte à la hausse sans précédent de la précarité.
Licenciements, baisse de revenus, impossibilité de trouver un emploi… Depuis le début de la crise, une grande partie de la population a du mal à boucler ses fins de mois. Selon des estimations de plusieurs associations, au moins 1 million de personnes se seraient ajoutées aux 9,3 millions de pauvres* recensés par l’INSEE en 2018. Pour essayer de limiter cela, l’Etat a mis en place dès le premier confinement un fond de solidarité pour aider les entreprises, un dispositif de chômage partiel et des aides pour les plus précaires. L’Etat a également créé de nouvelles aides à destination des jeunes et a mis en place une distribution de deux repas par jour à 1 euro au Crous pour tous les étudiants.
* : taux de pauvreté : 1063 euros par mois et par unité de consommation (1 UC pour le premier adulte du ménage, 0,5 UC pour les autres personnes de plus de 14 ans et 0,3 UC pour les moins de 14 ans).
Une dépendance vis-à-vis des associations caritatives
Vous l’aurez compris, les aides financières ne manquent pas, pourtant elles ne suffisent pas pour une partie des plus précaires qui se tournent vers les structures humanitaires. Ces structures sont sollicitées plus que jamais partout en France comme le Secours populaire de Lomme où la hausse de demande d’aide est indéniable selon son président Jean-Marc Sergheraert. Le nombre de clients de l’épicerie solidaire de cette immense association située à l’ouest de Lille a été multiplié par 10 depuis le début de la pandémie. « Lors du premier confinement, il y avait entre 200 et 300 mètres de queue sur le trottoir. » Une situation à laquelle l’association a dû s’adapter en emménageant en octobre dernier dans un entrepôt de 5000 m² permettant notamment une plus grande capacité de stockage de dons et d’accueil.
L’antenne lommoise du Secours populaire a aussi créé des événements particuliers en proposant par exemple des colis de nourriture destinés aux étudiants, des sacs d’un kilo de vêtements à deux euros ou encore l’ouverture d’une friperie pendant le confinement qui a attiré 700 personnes dès le premier jour. Le succès de ces événements résume bien la dépendance d’une partie des plus précaires à l’aide humanitaire. « Les gens nous attendent et dès qu’on fait un évènement ils viennent participer », explique le président de l’association. Une dépendance que partage une bénéficiaire (que l’on préfère qualifier ici de « clients ») rencontrée à la Boutik Pop, une boutique solidaire de prêt à porter neuf au sein de l’association. Pour elle, l’Etat fournit énormément d’aides surtout en ce moment mais malheureusement ce n’est pas suffisant au vu des charges à payer et du coût de la vie.
Elle vient donc régulièrement acheter à moindre prix des produits vendus en supermarché et des vêtements neufs qu’elle ne peut pas se payer ailleurs pour « rester présentable en société », dit-elle.
Les étudiants et les personnes âgées nouvellement concernés
Avec la pandémie, de nouvelles catégories de personnes ont recours à l’aide humanitaire et associative. Depuis peu, les étudiants et les personnes âgées se font de plus en plus visibles au sein des différents magasins du Secours populaire de Lomme comme nous explique une salariée de l’association. « Ce sont souvent des habitués qui viennent faire leurs courses à l’épicerie solidaire, des visages connus depuis plusieurs années parfois. Là pour la première fois on a vu des étudiants. » Les personnes âgées, souvent seules, sont aussi devenues nombreuses ici profitant de faire leurs courses à moindre coût pour avoir de l’interaction sociale. Cependant, plusieurs bénévoles et salariés rencontrés dans les différentes boutiques de l’association reconnaissent qu’il y a un manque de sensibilisation de certaines catégories ayant basculé dans la précarité sur le fait qu’elles peuvent bénéficier de leurs services.
Les confinements successifs ont aussi permis une multiplication des donations matérielles aux associations, un effet bénéfique souligné par Jean-Marc Sergheraert : « Les gens ont eu le temps de trier et de faire des travaux, donc ils ramènent plus. » De quoi continuer la lutte face à la précarité et atteindre l’objectif rêvé pour le président du Secours populaire de Lomme : « Le jour où plus personne aura besoin de nos services, nous aurons gagné notre combat. »
Lino Prestimonaco
Zoom : Retour aux origines du Secours populaire
Le secours populaire est une association française à but non lucratif qui agit auprès des victimes de l’illégalité sociale, des catastrophes naturelles, de la misère, de la faim, etc… Comment le Secours populaire est-il devenu une association centrale dans l’humanitaire au fil des années?
Quelques dates clefs :
1- 1923 : création de la section française du Secours rouge international, qui se veut être la « Croix-Rouge du peuple ». Cette section se mobilise pour les millions de veuves et d’orphelins blessés de la Grande Guerre.
2- 1945 : création du Secours populaire par la fusion du Secours populaire de France et des colonies (ancienne section française du Secours rouge), et de l’Association nationale des victimes du nazisme (ANVN). Dans l’association sont présents des hommes et des femmes qui ont connu la vie clandestine de la Seconde Guerre Mondiale.
3- 1959-1980 : le Secours populaire va se confronter aux défis d’une autre ampleur lors des Trente Glorieuses et du choc pétrolier. Il interviendra auprès des victimes du tremblement de terre d’Agadir en 1960, mais interviendra aussi auprès d’autres victimes pour le franquisme en Espagne, du coup d’Etat au Chili en 1973 entre autres. Au cours des années 70, l’association organise la récupération de surplus agricoles pour les familles plongées dans le chômage dû à la fermeture programmée des mines du Nord. Cette action inspirera dix ans plus tard Les Restos du cœur.
4- 1980-2000 : en 1991-1994, le Secours populaire sera nommé Grande Cause nationale avec 29 autres associations. Cette association est toujours active en 2021 et est devenue au fil des années l’une des principales associations française luttant contre l’insécurité et l’isolement.
Sarah Leroy
Vidéo réalisée par Baptiste David