Une « Digital Detox » pour réguler son temps d’écran
La société, et tout particulièrement la jeunesse, passe un temps considérable derrière les écrans. Que ce soit celui d’un smartphone, d’un ordinateur ou encore d’une tablette, ils sont omniprésents. Pour ne rien arranger, la situation sanitaire actuelle ne fait qu’accroître le temps passé dessus. Une déconnexion totale pourrait-elle être servir de cure ?
Un simple coup d’œil dans la rue suffit pour observer que la plupart des passants marchent un téléphone à la main. Les écrans, particulièrement les smartphones, sont devenus notre couteau suisse, utiles aussi bien dans le quotidien professionnel que pour se divertir ou encore se tenir au courant de l’actualité. Tous ces besoins différents auxquels cet outil répond l’ont transformé progressivement en une sorte de drogue.
Surconsommation numérique
En 2019, une étude menée par l’institut BVA rapportait que plus de 70 % des Français se disaient dépendants vis-à-vis de leurs outils connectés. Cette même étude révèle que le Français moyen passe plus de 4 heures par jour devant un écran, et qu’il en a souvent plusieurs allumés simultanément. Ce temps de connexion grimpe à 6 heures pour les 18-34 ans, allant même jusqu’à plus de 7 heures quotidiennes pour les cadres.
La pandémie actuelle nous pousse encore davantage vers nos ordinateurs ou nos téléphones pour suivre nos cours, travailler ou encore maintenir un semblant de lien social. Mais cette surconsommation apporte son lot de problèmes : la nomophobie (peur d’être séparé de son téléphone) ou encore le FOMO (Fear Of Missing Out) et plus simplement le niveau d’anxiété augmenté chez beaucoup par le recours intensif aux réseaux sociaux. Une cure potentielle, baptisée « Digital Detox » permettrait de se libérer de cette addiction aux écrans.
Une désintox par le sevrage
Pierre-Olivier Labbé, un journaliste s’étant imposé une coupure numérique de 90 jours dans le cadre d’un documentaire, explique que « des stages de déconnexion sont organisés par les gens qui bossent 18h par jour sur des écrans dans la Silicon Valley ». Comme souvent, le concept d’origine est américain. L’idée est simple : se ressourcer, se concentrer sur soi mais à une seule condition, il faut se séparer catégoriquement de son téléphone. M. Labbé précise « qu’il y a un vrai manque, comme avec la clope » au long de l’expérience. Le principal constat qu’il tire de sa « détox » peut paraître évident, mais mérite d’être souligné : « J’ai retrouvé du temps pour ne serait-ce que m’ennuyer », dit-il en ajoutant « cette génération a oublié de s’ennuyer ». On conditionne notre cerveau à rejeter la créativité qui peut naître de tous ces petits moments de vide que l’on choisit de combler.
« Il y a un vrai manque, comme avec la clope. »
Cette coupure forcée est-elle donc indispensable ? Ce n’est pas forcément ce que pense Pierre-Olivier Labbé qui met principalement l’accent sur le fait « qu’il faut être capable de réguler, de trouver une utilisation raisonnable ». Il ajoute que cette régulation « est totalement indispensable » dans l’éducation que l’on donne aux plus jeunes et que c’est avec eux « qu’il faut être vraiment vigilant ». Il précise qu’un enfant de moins de 11 ans ne devrait pas posséder de smartphone personnel avec accès à Internet. La Digital Detox ne serait donc pas l’unique solution et le flair des professionnels du tourisme ne les a pas trompés. En effet, les chambres sans wifi sont maintenant plus chères que les chambres avec une connexion.
Jean-Baptiste Breen
Zoom sur… le syndrome FOMO (Fear Of Missing Out)
Un sentiment d’irritation après avoir raté un événement, une contrariété face à un large menu de restaurant, une envie irrépressible de consulter son téléphone… Ces situations vous sont familières ? Vous pourriez souffrir d’un mal bien connu : le syndrome FOMO.
La peur de rater quelque chose (ou Fear Of Missing Out en VO) est une forme d’anxiété sociale qui touche une grande partie de la population mondiale, sans distinction d’âge ou de classe. Mais selon une étude de l’Université de Glasgow, les jeunes aujourd’hui subiraient encore plus une exigence pour être constamment disponibles. A cela s’ajoute un sentiment de frustration, de lassitude, ou encore une baisse d’estime de soi.
Si le phénomène n’est pas nouveau, ses répercussions se sont amplifiées depuis une vingtaine d’années. Et pour cause : les réseaux sociaux ont tout changé. La pandémie de Covid-19, bien sûr, n’arrange rien. Obligation d’utiliser Internet pour socialiser, anxiété de passer à côté de sa vie, peur panique du manque de denrées alimentaires… Le marketing aussi, avec ses ventes privées et « dernières chances », profite largement de ce Mal du siècle 2.0.
Mais alors, dans un monde sur-connecté, est-il possible de vivre sereinement ? Au lieu d’une digital detox radicale, certains préfèrent le concept de JOMO (Joy of Missing Out). Repéré par le New York Times, ce mouvement préconise une utilisation raisonnée du téléphone et du web, le tout sans culpabilisation. Lâcher prise de temps en temps, afin de mieux savourer sa re-connexion, numérique et personnelle.
Prune Benedini
Etudes de l’Université de Glasgow : http://eprints.gla.ac.uk/120206/7/120206.pdf
du New York Times : https://www.nytimes.com/2018/07/12/style/joy-of-missing-out-summer.html
A-t-on raison d’avoir peur de la technologie ?
Vidéo réalisée par Jeanne Leriche
Photos Prune Avemani