Comment l’Hospice Comtesse redonne-t-il vie aux souvenirs de Lille ?
Mae Knibiehly
Posted On 14 janvier 2025
Ancien orphelinat et hospice pour hommes jusqu’en 1939, l’Hospice Comtesse, situé au cœur du Vieux-Lille, a traversé les siècles en portant de nombreuses histoires humaines. Aujourd’hui, avec son projet Mémoire Vive, il invite les habitants à contribuer à la mémoire collective du lieu en partageant leurs souvenirs et objets personnels. En renouant avec son passé à travers les histoires des Lillois, l’Hospice Comtesse réinvente notre façon de transmettre et de préserver l’histoire. Florence Raymond, cheffe de la conservation et de la médiation au musée, est la figure derrière cette démarche de mémoire partagée.
“Le projet Mémoire Vive n’est pas un simple hommage au passé”, explique Florence Raymond, “c’est une démarche active, qui transforme le musée en un espace de collecte et de transmission des histoires, de notre histoire.” L’idée est simple, mais ambitieuse : rassembler des souvenirs, des objets, des photos, des anecdotes qui témoignent de la vie passée de l’Hospice Comtesse et de son quartier. En lançant un appel à témoins, le musée invite non seulement ceux qui ont vécu ou travaillé dans l’établissement, mais aussi leurs familles, leurs voisins, et les habitants du quartier.
Un projet collectif qui réunit les générations
Au cœur de “Mémoire Vive” se trouve un engagement profond pour un patrimoine vivant, où le passé dialogue avec le présent. Ce projet unique réunit autour de la recherche des professionnels des archives départementales, des étudiants bénévoles, des associations de commerçants du quartier et aussi des Lillois anonymes qui sont curieux d’aider dans cette recherche historique. Ce dialogue entre générations et communauté, Florence Raymond le voit comme essentiel : « Même si ce n’est pas orthodoxe, je trouve ça intéressant de pouvoir s’autoriser des associations comme ça. Je ne dis pas que c’est plus important, mais c’est tout aussi important à mon sens que le résultat final ». Les Lillois déposent ainsi une part de leur histoire dans les murs du musée, à travers des récits ou objets témoins d’un passé qui parle à tous. Ce projet est aussi une manière de créer du lien entre les générations, en offrant aux jeunes une fenêtre sur l’histoire locale à travers les expériences vécues par leurs aînés.
Quand ADN et archives se rencontrent pour étoffer l’histoire
Pour enrichir cette démarche participative, le musée Hospice Comtesse n’hésite pas à utiliser des outils modernes, combinant les recherches ADN et l’étude des archives. Ce sont ces outils qui vont permettre de redonner vie aux oubliés, de recréer le tissu de la ville et de révéler des visages que l’on pensait disparus. Le musée a donc pu identifier quelques traces laissées par les anciens résidents ou patients, permettant ainsi de reconstituer une cartographie de la population qui a fréquenté les lieux au fil des siècles. Quant aux archives, elles sont minutieusement explorées pour retrouver des documents, des actes, et des récits de l’époque qui donnent un contexte plus riche aux objets et témoignages apportés par les habitants. “C’est un peu comme recoller les morceaux d’un puzzle. Chaque objet, chaque document est une pièce de plus qui nous aide à voir le tableau d’ensemble de la vie qui animait cet endroit”, explique Florence Raymond.
Un musée qui réinvente la mémoire vivante de Lille
Avec “Mémoire Vive”, l’Hospice Comtesse change radicalement la manière dont on peut concevoir un musée d’histoire. Car ici, il ne s’agit pas seulement d’exposer des œuvres, mais de rassembler des voix, des vies, des fragments d’un Lille oublié. En permettant aux Lillois de déposer une part de leur histoire dans le musée, l’Hospice Comtesse devient un témoin vivant de la vie métropolitaine. Il crée une expérience qui va au-delà de la simple visite : il invite chacun à devenir acteur de la mémoire collective, à se reconnecter avec le passé pour mieux comprendre le présent.
Margaux Alexandre
Portrait d’Elise, citoyenne Lilloise engagée
Une fois la porte du musée poussée, Elise accueille et surveille les visiteurs à l’Hospice Comtesse. Elle ne se contente pas seulement d’indiquer le sens de la visite, elle veille aussi à protéger les œuvres du musée pour éviter la perte des objets Lillois. Si elle limite la casse, Elise fait également un travail de médiation puisqu’elle prend soin de répondre aux différentes interrogations des visiteurs à propos du musée et de sa ville. Son intérêt pour la culture, en particulier les musées et les châteaux, l’a poussé à en faire son métier : la voilà au musée de l’Hospice Comtesse. Petit retour en arrière : Elise commence ses études par un BEP en sociologie, puis les termine en licence d’Histoire. Selon elle, son parcours d’études est un bon équilibre dans son métier, car il rejoint la culture mais aussi le social. Grâce à ses connaissances en sociologie, elle sait comment accueillir et s’adapter en fonction de chaque public. Qu’il soit en situation de handicap, jeune, ou âgé : tout le monde est accueilli !
Citoyenne engagée, elle est bénévole sur certains sites et transmet ses connaissances sur l’histoire lilloise.
« On fait attention à ce musée, qui est le plus ancien bâtiment de Lille donc c’est pas rien au niveau du patrimoine, en plus c’est le musée de l’histoire de la ville de Lille […]»
Si le musée est ancien, des conférences et des expositions sont proposées pour redynamiser l’Hospice Comtesse. L’objectif est aussi de faire participer ses visiteurs à entretenir son patrimoine ; en ce moment c’est l’exposition Chambre 207 qui fait vibrer les murs du musée !
Eloïse Matrat
Photos : Nayla Lequeux-Bernard
Vidéo d’Anna De Navailles-Labatut
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